Le discours du sélectionneur national glisse vers un parallélisme trompeur George Leekens nous ressort de plus en plus souvent une lapalissade comme pour renvoyer l'assaut des médias, inquiets de constater que le jeu des Aigles de Carthage ne décolle pas. Son argumentaire s'articule depuis un certain temps sur l'impossibilité d'égaler la qualité du jeu de nations aussi fortes que l'Allemagne ou le Brésil, et sur le rappel de la situation où se trouvait son équipe avant son arrivée. Voilà en gros ce qu'il a déclaré après la rencontre de Gaborone contre le Botswana, vendredi dernier (0-0). «C'était difficile comme je l'avais prévu, en plus d'un déplacement assez long. On retourne avec le sourire. Ce n'est pas notre meilleur match, loin s'en faut. Mais que voulez-vous ? On ne joue pas comme l'Allemagne ou comme le Brésil ? Il faut voir où on était. Et puis on n'est ni l'Allemagne ni le Brésil. On en est loin, même. Ce n'était pas très beau à voir. Mais la pression était là, c'était comme une finale. Je suis très heureux et très fier d'être l'entraîneur de la Tunisie». Ce n'est plus un exploit La qualification en phase finale de la coupe d'Afrique des nations 2015 a été plus facile que prévu, soit. On doit quand même savourer le fait que le team national ne soit pas resté jusqu'à la dernière minute des éliminatoires à courir derrière le ticket des qualifs. Et cela lui était arrivé plusieurs fois, il ne faut pas l'oublier. Toutefois, tant bien que mal, la Tunisie parvenait toujours à se qualifier. Cela lui était arrivé à 17 reprises, dont 12 consécutivement. Ce n'est plus à vrai dire un exploit quand bien même il arrive de plus en plus couramment à des ténors de l'Afrique de manquer la grand'messe continentale (l'Egypte qui sera absente à Malabo pour la troisième fois consécutive, le Cameroun à la dernière édition...).Devenir l'Allemagne ou le Brésil ? Non, M. Leekens, ce n'est pas ce qu'on vous demande. Se qualifier après un aussi pitoyable match que celui de vendredi à Gaborone où le mot d'ordre était visiblement «service minimum» n'augure rien de bon. En phase finale, l'hiver prochain en Guinée équatoriale, la musique va changer, le niveau des participants n'ayant rien à voir avec les éliminatoires. Oui, nous ne sommes ni l'Allemagne ni le Brésil, mais nous sommes en droit de prétendre à une sélection qui sait jouer au foot, qui rassure son public, capable de lui donner de la joie, et pas uniquement par les résultats mais aussi par un jeu cohérent et un état d'esprit positif. C'est-à-dire guère renonciateur et versant dans la médiocrité. La CAN, c'est demain Face à l'équipe la plus faible du groupe G, les copains de Yassine Chikhaoui n'ont guère rassuré. Au contraire, leur jeu parut régresser même s'il leur manquait Khazri, Msakni et Khelifa. Doit-on sacrifier le jeu sur l'autel d'un réalisme poussé à l'extrême ? Cet ultra-réalisme qui s'installe confortablement dans le foot tunisien — bien avant l'arrivée du Belge George Leekens, d'ailleurs — ne mène pas très loin. On a pu s'en apercevoir depuis au moins une dizaine d'années lors des phases finales de la CAN et à l'occasion des éliminatoires de la Coupe du monde. Sans un projet de jeu, cherchant à s'appuyer sur le système D, sur un rafistolage et en vivotant au jour le jour, les horizons de l'équipe de Tunisie ne peuvent être que bouchés. Leekens prend goût à une formule qui ne convainc plus, tout simplement parce qu'il n'a pas été engagé pour porter son équipe à hauteur de l'Allemagne ou du Brésil. S'il est soulagé par la tournure des évènements — et cela, on peut aisément le comprendre — il faudra en revanche qu'il fasse l'effort de convaincre sur la qualité incertaine du jeu produit par ses joueurs que ce soit à Gaborone, ou à Monastir et à Dakar contre le Sénégal. Puisse la rencontre de mercredi prochain à Monastir contre une Egypte éliminée, et où les Aigles évolueront pour une fois libérés de toute pression, enlever définitivement quelques doutes et installer la confiance indispensable. Car la CAN commence le 17 janvier prochain, soit dans deux mois. C'est demain...