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Entre croyances, fabulations et psychose
Maisons hantées
Publié dans La Presse de Tunisie le 12 - 01 - 2015

Il y a rarement une ville en Tunisie où l'on ne parle pas d'au moins une maison hantée par les djinns. Certains foyers se sont départis de cette étiquette funeste à coups, paraît-il, d'exorcisme à répétition, d'autres en sont restés condamnés à jamais. Quel crédit accorder à ce phénomène ?
Le simple énoncé de «maison hantée» fait rire les uns et crisper les autres d'une peur toute bleue. C'est que la société tunisienne reste très divisée sur la question. Certains y croient dur comme fer, d'aucuns n'y prêtent pas la moindre petite attention. A chacun ses raisons, on va dire. Car notre enquête ne se propose pas pour finalité de dire si le phénomène existe ou non (c'est peine perdue : une réalité pour les uns, un simple commérage pour les autres, qui croire?), mais de se faire l'écho de ces convictions qui maintiennent en vie ledit phénomène et le perpétuent d'une génération à l'autre, décade après décade.
Religion et contes de... djinns
Il faut dire que le texte coranique reconnaît l'existence des djinns, il leur accorde même toute une sourate du même nom, classée 72e sur le Livre. Dès le sixième verset, le ton est donné : «... et des individus d'entre les humains recouraient à des individus d'entre les djinns, lesquels ne faisaient qu'aggraver leur humiliation» (traduction de Jacques Berque). Ici, on ne peut que comprendre que le Créateur prévient ceux qui ont recours à toutes sortes de sortilèges (utiliser les djinns à des fins maléfiques, jeter un sort à quelqu'un, etc.) que malheur et humiliation sanctionneront leur œuvre méphistophélique. Force donc est de prendre la chose très au sérieux sauf, évidemment, dans le cas où on ne croit pas au Livre Saint, mais ça, c'est une autre affaire. Ainsi, selon le Coran, les djinns existent bel et bien, n'en déplaise aux sceptiques.
Petits enfants, nous écoutions tous les contes que nous débitaient nos grand-mères pour nous endormir. Mais ce n'était pas tous les soirs des contes de fées, parfois, aussi, des contes de djinns. Généralement, c'est de maisons hantées qu'il s'agissait, alors que le non-dit était de nous inviter à nous tenir bien sages sous peine de provoquer le courroux des djinns et d'avoir à subir les conséquences. Oui, mais le mal est fait : nous sommes nés et avons grandi avec l'idée que les djinns sont tout près de nous, sinon chez nous, du moins dans la maison du voisin ou... un peu plus loin. Raison pour laquelle chaque ville du pays est réputée avoir au moins une maison hantée.
Pourquoi les maisons ?
En fait, il n'y a pas que les maisons qui sont dites «hantées», les individus aussi sont parfois dits «habités» par les djinns, auquel cas c'est l'asile de La Manouba qui s'en charge. Passons. Et donc, dans les fables de nos grand-mères, telle maison est dite hantée car un meurtre y a été perpétré et que la victime —ou son esprit— y revient tout le temps. Une piètre fabulation que les hommes de religion récusent. D'après un imam auquel on s'est adressé, trois raisons essentielles font que tel foyer est susceptible d'être hanté par les djinns : a) les maisons abandonnées depuis très longtemps ; b) les maisons très, très sales, ou carrément éclaboussées d'excréments ; c) les maisons sur lesquelles on a jeté un sort. Et notre imam d'ajouter : «Quand quelqu'un rentre chez lui en disant : "Assalamou alaykom", le chef des djinns leur dit : "Partez, vous n'êtes pas admis ici" ; et quand on commence son repas par "Bismellah", le même chef leur dit : "Partez, il n'y a rien à manger ici"».
Les Américains dans le coup
Ce serait complètement faux de prétendre que seules les sociétés africaines et arabo-musulmanes croient en l'existence des djinns. La société américaine est probablement celle qui croit le plus en un tel phénomène. Souvenez-vous des innombrables films dits d'horreur et qui tournent tous autour de maisons hantées. Beaucoup d'entre vous n'ont sûrement pas oublié le fameux La chambre 114 d'un hôtel de Los Angeles, une chambre présentée comme étant lourdement hantée par les esprits. Vous-vous dites, peut-être, que ces films sont destinés aux amateurs de sensations fortes. Non. Le cinéma comme la littérature d'un pays donné renvoient l'image réelle de sa société. D'ailleurs, auriez-vous oublié le best-seller de William Peter Blatty publié en 1971 sous l'intitulé : The Exorcist et qui fut très vite porté à l'écran tant son succès était total? D'après les critiques, ce film raconte l'histoire réelle d'une fille habitée par un démon qui, sans l'intervention d'un exorciste chevronné, aurait fini par détruire sa bien-aimée ou garder à jamais dans son cœur...
Exorcisme musulman
Pour chasser les mauvais esprits d'une demeure (parfois un magasin), il existe chez nous un cérémonial particulier : c'est la Rouqyya, c'est-à-dire qu'une poignée d'hommes de foi passent la majeure partie de la nuit dans la maison touchée par le phénomène et formulent des prières appropriées, mais lisent surtout dans sa totalité la Sourate «Al Baqara». Partant du principe que le Coran est le mieux qu'il y a pour chasser les djinns d'un foyer, ceux-ci s'en trouvent lamentablement délogés, non sans tenter de résister au début de la séance.
Fabulations et psychose
Or, le phénomène est parfois fabriqué de toutes pièces. C'est que certaines gens, par intérêt ou juste pour faire l'intéressant, s'amusent à tisser des histoires à dessein d'épater et d'en rire par la suite. C'est le cas (entre centaines d'autres) de l'incroyable villa de Den Den. C'était arrivé au milieu des années 1970. Construite sur l'avenue principale, assez grande et surmontée d'un étage, la villa, dès la fin des travaux, était proposée à la vente. Dans le même temps, un persifleur n'avait pas trouvé mieux que de lui coller l'étiquette de maison hantée. Durant un peu plus d'une décennie, quiconque se montrait intéressé de l'acheter était vite informé de sa macabre réputation. Le comble, c'est que l'auteur de cette fabulation avait fait des émules aveugles : beaucoup colportaient la même histoire sans que personne ait eu le temps de vérifier la chose. Tant et si bien que le pauvre propriétaire avait dû revoir nettement à la baisse le prix initialement demandé. Et toujours rien, pas d'acquéreur. A Den Den, les habitants, arrivés devant la villa, s'en éloignaient vite en traversant la rue de peur d'être rattrapés par un djinn diurne. La psychose était réelle. Jusqu'au jour où la maison trouva un locataire : c'était le ministère de l'Intérieur qui en avait fait le poste de police de la région. Le premier soir, les gens se demandaient si le pauvre agent de permanence n'allait pas finir sa nuit à l'asile psychiatrique. Il n'y eut rien de tel ... Quelque temps plus tard, la villa fut vendue enfin. L'histoire des djinns venait d'être balayée une fois pour toutes.
Des djinns adorables !
Mais il paraît que les djinns, ou esprits, ne sont pas tous méchants et malveillants, il y aurait aussi ceux dits bienveillants. Ecoutez cette histoire un peu particulière dans son genre que nous a livrée une dame d'un certain âge aujourd'hui : «Nous étions juste de retour d'un voyage de noces, mon mari et moi. Nous attendait notre appartement flambant neuf où on devait passer notre toute première nuit. Il y eut chez nous beaucoup de monde auquel on avait offert gâteaux, sodas et autres friandises. A la fin, l'évier de la cuisine était rempli de vaisselle sale. J'étais fatiguée, j'avais laissé ça pour le lendemain matin. Le film de mon voyage de noces défilait encore devant mes yeux, et le sommeil m'avait pour ainsi dire abandonnée. A minuit exact, j'ai entendu un bruit bizarre me parvenant de la cuisine. J'ai secoué mon mari pour l'avertir, mais il ronflait comme un mufle. Le bruit devenait de plus en plus net : c'était celui de l'eau de robinet qui coulait normalement et celui de la vaisselle. J'étais morte de peur. Je me suis blottie contre le dos de mon mari et ai ramené la couverture sur nos têtes. Le lendemain matin, dans la cuisine, j'ai manqué juste de perdre connaissance : la vaisselle était très propre et bien rangée, alors que le robinet était bien fermé. Tu te rends compte ? Des djinns avaient fait ça à ma place?...». Mais alors?... C'est formidable !... Avoir une femme de ménage sans salaire ni Cnss, que demandent les femmes ?... «Ah non, merci !... Je préfère être seule à laver la vaisselle de toute une caserne plutôt que d'avoir des djinns chez moi... Le surlendemain, j'ai quitté l'appartement pour un autre».
Science et croyances
Vous le savez tous : la science et les croyances sont des ennemies jurées. Quand la science s'écrie : «Mais arrêtez donc ces sornettes à dormir debout!», les croyances lui répliquent : «Ah, oui?... Tu as peut-être résolu tous les maux de l'humanité...». C'est une guerre éternelle et sans fin. La science ne croit pas aux choses dites occultes, alors que l'homme déclare être témoin de maints phénomènes mystérieux. Quoi qu'il en soit, voici ce que nous dit un scientifique : «C'est tout simplement une fixation, une hantise : quand quelqu'un entend dire que telle maison est hantée, il ne peut plus ne pas y croire, il va même de son côté exagérer le phénomène». Mais tout de même, la bonne dame a trouvé bien propre sa vaisselle. «Mais c'est elle qui le prétend !... T'as pu vérifier quoi que ce soit, toi?». Non, pas encore. Mais j'y vais tout de suite ...


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