Tunisie – Saïed appelle à mieux contrôler les financements étrangers illégaux des partis    Audition de Khouloud Mabrouk : les précisions du parquet    AMEN BANK : Assemblée Générale Ordinaire 2023 — Renforcement général et excellent rendement    Samir Dilou : il n'y a aucune base juridique pour interdire le traitement médiatique de l'affaire de complot    Tunisie – El Fouledh : Arrestation de 23 personnes pour sabotage et vol    Tunisie – La situation épidémiologique de la rage est effrayante et le ministère de la santé préconise l'intensification de l'abattage des chiens errants    Tunisie – Démarrage de l'exploitation du nouveau service des archives du ministère de l'intérieur    Tunisie – Le bureau de l'ARP adopte le budget de l'assemblée pour 2025    France : Une marque marocaine dans le TOP 10 des ventes en 2023, malgré les actes de sabotage    Le Croissant Rouge met en garde contre la propagation de maladies infectieuses à G-a-z-a    Les ministères de l'éducation et des technologies unis dans la lutte contre la fraude aux examens nationaux    Hamma Hammami : Kaïs Saïed opère de la même façon que Zine El Abidine Ben Ali    Changement climatique: Ces régions seront inhabitables, d'ici 2050, selon la NASA    Algérie-Qatar : Avec 3,5 milliards de dollars fini le casse-tête du lait à l'importation, et c'est pas tout…    Nabil Ammar : Renforcer les liens économiques tunisiens à l'international    Allergies aux pollens : Que faire pour s'en protéger ?    Près de 6 000 mères ont été tuées à G-a-z-a, laissant 19 000 enfants orphelins    Mohamed Trabelsi, nouvel ambassadeur de Tunisie en Indonésie    En 2023, le coût par élève est passé à 2014,7 dinars    Volée il y a 30 ans, une statue de Ramsès II récupérée par l'Egypte    Vandalisme à l'ambassade de France à Moscou : une fresque controversée soulève des tensions    Kenizé Mourad au Palais Nejma Ezzahra à Sidi Bou Said : «Le Parfum de notre Terre» ou le roman boycotté    Pourquoi | De la pluie au bon moment...    Accidents de travail : Sur les chantiers de tous les dangers    Centre de promotion des Exportations : Une mission d'affaires à Saint-Pétersbourg    Echos de la Filt | Au pavillon de l'Italie, invitée d'honneur : Giuseppe Conte, un parcours marqué par de multiples formes expressives et une poésie romanesque    Safi Said poursuivi suite à son projet pour Djerba    WTA 1000 Madrid : Ons Jabeur défie Slovaque Schmiedlová    L'Espérance de Tunis vs Al Ahly d'Egypte en demi-finale de la Coupe d'Afrique des clubs Oran 2024    Volley | La Mouloudia de Bousalem vice-champion d'Afrique : Un cas édifiant !    Le ST reçoit l'USM samedi : Un virage majeur    Ligue des champions – Demi-finale retour – Mamelodi Sundowns-EST (demain à 19h00) : Pleine mobilisation…    Météo : Temps passagèrement nuageux et températures entre 18 et 26 degrés    Mahdia : recherches en cours de pêcheurs disparus en mer    OneTech : clôture de la cession de son activité d'emballage pharmaceutique Helioflex au profit du groupe Aluflexpack AG    CONDOLEANCES : Feu Abdelhamid MAHJOUB    Artes : chiffre d'affaires en hausse de près de 22%    La Tunisie invitée d'honneur au Festival international du film de femmes d'Assouan 2024 : En l'honneur du cinéma féminin    Aujourd'hui, ouverture de la 9e édition du Festival International de Poésie de Sidi Bou Saïd : Un tour d'horizon de la poésie d'ici et d'ailleurs    L'EST demande une augmentation des billets pour ses supporters    Nominations au ministère de l'Industrie, des Mines et de l'Energie    Le Chef de la diplomatie reçoit l'écrivain et professeur italo-Tunisien "Alfonso CAMPISI"    Géologie de la Séparation : un film tuniso-italien captivant et poétique à voir au CinéMadart    Hospitalisation du roi d'Arabie saoudite    L'homme qui aimait la guerre    Foire internationale du livre de Tunis : vers la prolongation de la FILT 2024 ?    Soutien à Gaza - Le ministère des Affaires religieuse change le nom de 24 mosquées    Un pôle d'équilibre nécessaire    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Un ministre et trois secrétaires d'Etat, ce n'est pas l'islamisme au gouvernement
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 16 - 02 - 2015


Par Hatem M'RAD*
Beaucoup de démocrates, progressistes et libéraux, qui ont soutenu Nida Tounès et Béji Caïd Essebsi, dans l'espoir, justement, de défendre un modèle de société moderne et séculier et écarter les islamistes traditionalistes du pouvoir, ont manifesté beaucoup de réticences, sinon une violente « allergie » à l'association d'Ennahdha au nouveau gouvernement Essid. Ils s'estiment lésés et sacrifiés en tant qu'électeurs au profit d'une hypothétique combinaison politicienne douteuse, manigancée derrière les rideaux par Essebsi et Ghannouchi, deux animaux politiques qui ne sont pas nés d'hier. Les démocrates électeurs de Nida-Essebsi n'acceptent pas, sur le plan de la logique, de chasser les islamistes par une porte et de concéder à les faire rentrer par l'autre. Une question de logique politique, voire d'éthique intellectuelle. L'idée que l'islam politique soit présent dans un gouvernement laïque et moderniste effrayait tous ceux qui ont eu à combattre l'islamisme et ses méfaits depuis la révolution, voire qui en ont subi son ire.
N'exagérons pas les choses et restons dans la mesure. Un ministre et trois secrétaires d'Etat n'impliquent pas l'islam politique au gouvernement, surtout dans un Etat dirigé par un parti séculier disposant de la majorité au Parlement, de la présidence et de la direction du gouvernement. Il n'y a pas d'alliance en bonne et due forme entre Ennahdha et Nida Tounès dans le gouvernement Essid, qui vient juste d'être désigné. Il y a eu certes un semblant d'alliance électorale, très informelle d'ailleurs, entre Nida, Afek Tounès et l'UPL sur quelques points très vagues pour une action urgente. Mais Ennahdha n'était pas associé à cette entente électorale, même si on n'ignorait pas ses échos dans l'antichambre préélectorale.
Si Ennahdha voulait faire une alliance avec Nida Tounès, il n'aurait pas accepté si peu, c'est-à-dire l'entrée au gouvernement juste d'un seul ministre et de trois secrétaires d'Etat, alors même qu'il représente presque la moitié de l'électorat du pays et un poids sociologique indéniable. Ghannouchi lui-même parlait d'une « participation symbolique » d'Ennahdha au gouvernement, montrant par-là que l'essentiel pour son parti était qu'il ne soit pas trop marginalisé, entendons qu'il ne soit pas la cible principale du gouvernement. Si Ennahdha voulait réellement conclure une alliance, elle aurait demandé une meilleure part du gâteau. Elle aurait demandé, outre les portefeuilles, un programme commun, qui puisse tenir compte de ses grands choix idéologiques. Une alliance formelle d'Ennahdha avec Nida Tounès et ses alliés aurait d'ailleurs gêné ses propres partisans dont une bonne partie n'a pas accepté l'idée d'une « participation symbolique » au gouvernement, qui ne sied pas au poids d'Ennahdha dans le pays. De toutes les manières, Ennahdha s'attachait dur comme fer moins à une quelconque alliance qu'à un gouvernement d'union nationale, mieux acceptable par ses propres troupes, et mieux à même d'édulcorer l'impact de Nida Tounès dans le pays.
Qu'est-ce alors que le gouvernement Essid ? C'est une coalition de cinq partis représentant plus des 3/4 du Parlement. Une coalition qui correspond potentiellement à 180 députés, même si 167 d'entre eux seulement ont voté la confiance. Si bien que l'opposition ne représente plus que 38 députés sur 217. Le gouvernement est composé de 41 membres : 25 membres représentant les partis politiques associés, mais 16 membres d'entre eux sont désignés pour leur profil indépendant, y compris dans les ministères de souveraineté. Au vu de l'ensemble de ces données, le type de gouvernement qui apparaît à nos yeux, avec force, s'identifie davantage à un gouvernement d'union nationale qu'à un gouvernement d'alliance. L'opposition est ici marginalisée, même si elle sera vraisemblablement peu accommodante. Dans un tel gouvernement de presque union nationale, le poids d'Ennahdha, réel ou potentiel, sera plus ou moins dispersible, lui aussi, dans les nécessités de l'union.
En somme, il ne s'agit ni de faire un choix entre l'islam politique et la sécularisation, ni d'un quelconque « compromis historique » entre deux postulats contraires qui s'excluent. N'exagérons pas. On n'aura pas affaire à Ennahdha majoritaire et arrogant de la Troïka, mais à Ennahdha minoritaire au profil bas par la force des choses. Personne n'est dupe. Ennahdha a besoin de se recomposer en s'associant au gouvernement. Il souhaite « acheter » une trêve politique lui permettant de se réorganiser et de se réadapter au nouveau contexte. Personne n'abandonne ses postulats.
De quoi s'agit-il alors ? Il s'agit juste de « gouverner », au sens plein du terme, de créer un gouvernement de presque union nationale, un gouvernement de combat, non idéologique, qui aura à affronter de grands défis dépassant la taille d'un seul parti : le terrorisme, le jihadisme, la misère, le développement, la drogue, le marché parallèle, la mafiocratie, la mise en place des institutions et réformes vitales. Pour cela, il fallait en payer le prix politique. C'est la loi du genre.
Face à de tels défis gargantuesques, un gouvernement doit être prêt à gouverner, même avec le diable s'il le faut, si cela peut pacifier un pays, permettre la survie d'une société, la sécuriser, la stabiliser, la mettre sur les rails et lui redonner confiance et espoir. Si jamais Ennahdha voudrait revenir à ses « premières amours », en cherchant à imposer de nouveau la tradition moyenâgeuse au gouvernement et dans le pays, il serait invité à quitter le gouvernement. S'il s'avère dans ce cas difficile de constituer une nouvelle majorité, on peut toujours recourir à l'arme de la dissolution. La dissolution, un procédé très coûteux, il est vrai, fera réfléchir deux fois élus et partis.
On ne choisit pas ses alliés (Ennahdha était l'adversaire d'hier), on ne choisit même pas toujours ses adversaires (Al-Jabha est un allié culturel à l'opposition). C'est la conjoncture et la contrainte politique qui s'en chargent. Les démocrates ne peuvent pas, d'un côté, appeler de leurs vœux la mutation des islamistes, réclamer leur transformation dans une orientation plus politique, plus démocratique, moins théologienne, et refuser, d'un autre côté, de collaborer conjoncturellement avec eux, lorsqu'ils acceptent de participer à un gouvernement d'union nationale, de faire des compromis et des concessions. Même si la vigilance à leur égard reste, à l'évidence, impérieuse.
Il faut rappeler que, depuis la révolution, la Tunisie a résolu tous ses graves problèmes politiques par des compromis et des consensus : la Haute instance de Ben Achour, le gouvernement Essebsi, la Constitution, le Dialogue national, le gouvernement Jomâa. Le gouvernement Essid ne fait pas exception. Ennahdha a été associé dans toutes ces phases, pourquoi ce qui était accepté hier ne l'est plus aujourd'hui?
En tout cas, un ministre et trois secrétaires d'Etat, non seulement ce n'est pas l'islam politique au gouvernement, mais, en plus, lorsqu'ils permettent d'obtenir d'un coup 180 voix de soutien au Parlement, ce n'est pas si mauvais que cela pour Nida Tounès, en termes de pertes et profits. Même si Ennahdha peut toujours abandonner le navire et ne pas suivre le cap.
A chaque jour suffit sa peine
(* Professeur de science politique)


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.