Par Hamma HANACHI Les dimanches se ressemblent souvent, les uns sont parfois plus tristes que d'autres, le dernier en date a été plus lourd que d'autres. Ciel bas, esprit plombé par des événements écrasants. La radio reprend les tops de l'actualité. Trop de malheurs, les horreurs s'ajoutent aux désastres, après les attentats contre les dessinateurs du journal Charlie Hebdo à Paris, celui de Copenhague vient confirmer la détermination des islamistes radicaux. Un petit pays, exemple de la tolérance, qui tient à ses principes démocratiques est de nouveau victime du terrorisme islamiste, incontrôlable et international. Incroyable, tout le monde a suivi les péripéties de l'auteur de l'attentat, Omar-El Hussein, un acte qui se présente comme un remake identique à celui de Paris. Le réalisateur Lars Vilks, l'artiste suédois menacé de mort pour avoir dessiné la caricature de Mahomet en 2007, se trouvait à la réunion au centre culturel Krudttonden de Copenhague où se déroulait un débat sur la liberté d'expression «Art, blasphème et liberté d'expression», il est sorti indemne de la fusillade et à la lumière de ses déclarations, il semble plus que jamais décidé à continuer à lutter pour les libertés fondamentales malgré les menaces répétées (sa tête a été mise à prix au printemps 2013). Après l'attentat de Charlie Hebdo, Vilks se fait filmer en train de redessiner les caricatures sur un site d'extrême droite. Des plumes célèbres dénoncent la croisade du dessinateur endurci, des voix s'élèvent contre le réalisateur qui s'est tourné définitivement vers l'extrême droite. Polémique et controverse alimentent les rédactions. Les attentats de Paris et de Copenhague provoquent évidemment des commentaires et des analyses. Après ces vils actes individuels, un nouveau mot, une stratégie ou une attitude éclôt, il va connaître un usage fréquent et une gloire certaine. Cette stratégie adoptée par les jihadistes s'appelle «La méthode du loup solitaire», autrement dit des actes individuels comme ceux commis à Paris le 7 janvier et à Copenhague le 14 février. Les islamistes somaliens Shebab, Al Qaida ou Daech appellent à adopter cette méthode misant sur les actes meurtriers individuels. Farhad Khosrokhavar, auteur de La Radicalisation (Edition de la Maison des sciences de l'homme), explique ce phénomène de la naissance des loups solitaires (l'Express). La bête immonde porte désormais un nom. A suivre. En ce dimanche, on repousse les images de meurtres, les infos catastrophiques, l'exaltation des libertaires et l'agitation des assassins liberticides, les nouvelles atterrantes et les réactions des commentateurs, les morts recensés et les blessés vivants. On choisit simplement de vivre pleinement en musique. Alors on se dirige vers Arte, la chaîne culturelle. Comme tous les dimanches, l'émission Maestro est au programme d'avant-soirée. Au pupitre le prodige Gustavo Dudamel, il dirige l'Orchestre philharmonique de Chicago. On se frotte les mains de joie, d'autant plus que le pianiste Herbie Hancock en est exceptionnellement le soliste. L'orchestre joue George Gershwin. Réjouissant ! Rien de tel pour oublier le monde qui vous entoure, un style reconnaissable à des kilomètres à la ronde, rythmes syncopés, afro-jazz entraînant, de la gaieté dans l'air, variations et rythmes, Funny comme disent ses compatriotes. Dudamel entame Un Américain à Paris, musique qui a illustré le film de Vincente Minnelli, 6 Oscars (1951). Les spectateurs applaudissent à tout va, tous ont l'air de reconnaître la musique. Gershwin est un compositeur qui a vécu comme un météore, mort trop jeune à l'âge de 38 ans. Il est l'un des grands pianistes du siècle passé. «J'ai un étudiant qui laissera sa marque en musique [...] Le garçon est un génie, il n'y a aucun doute», dira de lui son professeur, Hambitze. Herbie Hancock monte sur scène, costume noir, cravate rouge, lunettes à écailles et sourire discret, il commence un air connu de tous, Rhapsody in blue, l'ensemble de clarinettes entame le morceau, suivi des trompettes, H. Hancock est d'un calme remarquable, aucun signe d'agitation, dos droit, l'œil sur le pupitre, il joue sans prêter attention à ce qui l'entoure, touches délicates, mouvements lents de tête, tout le monde se tait. Nous reviennent des images de Hancock à Carthage, jouant du Gershwin, souriant devant son piano (souvenirs heureux des sessions mémorables du Festival de Carthage). Le virtuose fait réagir les spectateurs de Chicago. Dudamel est aux anges, il dirige rapidement, sautille comme un chat. Heureux. Il nous fait partager son bonheur. Oublié le blues de dimanche, il laisse place à la rhapsodie en bleu. Les infos Ça sera pour demain.