Sous la pression des frappes de la coalition internationale, Daech procède à un repli tactique en Libye. Un découpage de la Tunisie en zones sécuritaires selon le danger potentiel a été entrepris pour mieux répartir les moyens humains et matériels A huis clos, et au grand dam de l'Association tunisienne des journalistes parlementaires (Atjp), qui craint un retour progressif à l'opacité, s'est déroulée hier une importante séance d'audition de hauts cadres du ministère de l'Intérieur par la commission parlementaire de l'organisation de l'administration et des affaires des forces armées. Sur demande de la partie sécuritaire, la commission a décidé, aux deux tiers de ses membres, le caractère secret de l'audition et donc le déroulement de la séance en l'absence des journalistes. Selon le président de la commission, Jalel Ghedira (Nida Tounès), les cadres du ministère devaient exposer, en toute transparence et devant les parlementaires uniquement, la situation sécuritaire du pays. A ce titre, et malgré le caractère délicat du dossier en examen, l'Atjp n'a pas manqué d'exprimer sa désapprobation : «Nous craignons que les séances publiques des commissions deviennent l'exception, et que les commissions à huis clos deviennent, quant à elles, la règle », a néanmoins répondu l'Atjp. Menaces intérieures et extérieures A la fin de la séance et à la sortie des membres de la commission, les responsables du ministère ont révélé aux journalistes une partie des informations pouvant être divulguées. Les hauts fonctionnaires de la « dakhilia » ont donc expliqué aux élus qu'un découpage de la Tunisie en zones sécuritaires selon le danger potentiel a été entrepris, et ce, pour mieux répartir les moyens humains et matériels. Adel Ben Hassen, responsable des études stratégiques au sein du ministère de l'Intérieur, a déclaré que la Tunisie fait face à des «dangers et des menaces intérieurs et extérieurs plus ou moins grands». « A l'intérieur, nous ne devons pas fléchir face aux cellules dormantes et autres réseaux terroristes très actifs en termes d'enrôlement et d'embrigadement, explique ce cadre sécuritaire. A l'extérieur, Daech opère un repli tactique en Libye sous la pression des frappes de la coalition internationale. Nous devons donc prendre nos précautions, surtout qu'il existe désormais deux Etats en Libye. La même source confirme la mort de Ahmed Rouissi, principal suspect dans l'affaire des assassinats de Chokri Belaïd et de Mohamed Brahmi. Mais encore. La menace vient essentiellement des nombreux camps d'entraînement de terroristes existant sur le territoire libyen voisin et des restes de foyers terroristes notamment d'Aqmi qui persistent et se terrent à la frontière ouest avec l'Algérie. Les responsables sécuritaires ont également affirmé que les jihadistes tunisiens de retour de Syrie, d'Irak et de Libye représentent un très grand danger pour le pays. Ces éléments dangereux rompus aux armes et aux actes terroristes, une fois de retour au pays, peuvent recruter de nouveaux jihadistes parmi les jeunes et faire bouger les cellules dormantes disséminées un peu partout dans le pays. Répression des agressions contre les forces de sécurité La délégation du ministère de l'Intérieur aurait, par ailleurs, dévoilé devant la commission les contours du projet de loi demandé par la police destiné à mieux protéger les forces de l'ordre dans l'exercice de leur mission. Baptisé projet de loi de «répression des agressions contre les froces de sécuricé», il aurait fait l'objet de quelques révisions à la demande du gouvernement. Le texte proposé par le ministère de l'Intérieur devrait passer prochainement devant un Conseil ministériel restreint puis devant le Conseil des ministres. «La philosophie générale du texte part des recommandations de la huitième conférence des Nations unies qui s'est tenue à La Havane en 1990 », explique Adel Ben Hassen. Elle vise, selon lui, à reconnaître la fonction sociétale des forces de sécurité. Pour Ben Hassan et ses collègues, « c'est la police qui permet au citoyen d'exercer ses libertés, d'où la nécessité de la protéger avant tout ».