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«Il faut rétablir la croissance sans pour autant creuser le déficit budgétaire» Entretien avec: Sri Mulyani Indrawati, directrice générale et directrice des opérations à la Banque Mondiale
En visite en Tunisie du 17 au 19 mars à la tête d'une délégation de haut niveau du groupe de la Banque mondiale, Sri Mulyani Indrawati, directrice générale et directrice des opérations à la Banque mondiale, dit avoir trouvé auprès du président de la République et du président du gouvernement une conscience claire de l'urgence des réformes économiques. «Il faudra, dit-elle, rétablir la confiance.Il faudra maximaliser et optimiser le secteur privé de l'investissement pour qu'il donne tout son potentiel et soulager ainsi la contrainte budgétaire sur l'Etat». Entretien. Quelles sont les appréciations de la Banque mondiale des fondamentaux de l'économie tunisienne après une période de transition au cours de laquelle le pays a subi plusieurs chocs ? Le gouvernement fait face à un grand déficit budgétaire de l'ordre de 10% qui n'a pas été traité, et si ce déficit n'est pas maîtrisé, cela risque d'engendrer une perte de confiance en la capacité de l'économie à retrouver le chemin de la croissance. Ce déficit provient du côté des revenus qui n'ont pas été totalement recouverts, peut-être aussi à cause de la lenteur de la croissance. Dans le passé, le taux de croissance était de l'ordre de 4 à 5%, il est aujourd'hui à moins de 2%, ce qui va rendre la situation plus difficile pour créer plus d'emplois. Conjugué à l'inflation, le déficit courant génère une pression sur le gouvernement pour pouvoir financer le déficit budgétaire à travers les flux de capitaux. Ces considérations doivent être à la base du programme gouvernemental qui doit être mis en place : comment rétablir la croissance économique sans pour autant creuser le déficit budgétaire et sans aggraver la situation de la balance commerciale extérieure. Il s'agit aussi de faire une croissance qui assure une meilleure égalité entre les régions. Je pense que ce sont là de grandes priorités. Il y a aussi la contrainte lancinante de l'endettement extérieur... Si le déficit poursuit sa tendance haussière, le niveau de la dette, actuellement aux alentours de 50%, continuera à s'accélérer et pourrait atteindre 60% d'ici les 5 prochaines années. Quels sont selon vous les axes de réformes prioritaires auxquels la Tunisie devra s'attaquer immédiatement ? Je pense que la priorité pour rétablir la croissance et pour faire de cette croissance une croissance inclusive est de redonner confiance aux gens et au secteur privé de l'investissement. Ce qui est important, c'est d'améliorer l'environnement des affaires et d'avoir une plus grande capacité à attirer les investisseurs à travers par exemple le développement du partenariat public-privé. Il faudra maximaliser et optimiser le secteur privé de l'investissement pour qu'il donne tout son potentiel et soulager ainsi la contrainte budgétaire sur l'Etat. Ceci va être crucial pour la Tunisie. A cet effet, il faudra travailler sur la réforme du système bancaire et financier. La nouvelle équipe gouvernementale vous semble-t-elle porteuse d'un projet rassurant et consistant pour une dynamique de réforme ? J'ai rencontré le président de la République et le chef du gouvernement , tous deux reconnaissent l'urgence de progresser avec ces réformes afin de rétablir la confiance et de créer de l'emploi. Ils reconnaissent également les domaines prioritaires où ils doivent entreprendre ces réformes. Cela inclut le volet budgétaire, le climat des affaires, le déséquilibre régional, le système de l'enseignement et de la formation des compétences qui permettent de créer une meilleure qualité d'emploi. Reste cependant posée la question des capacités et des moyens à mettre en place. La Banque mondiale est à ce titre prête à aider la Tunisie. Justement quel est l'apport supplémentaire de financement que pourrait apporter le groupe de la Banque mondiale pour soutenir l'effort des autorités tunisiennes au cours des cinq prochaines années ? Un programme de coopération avec la Tunisie pour le prochain quinquennat est en cours de finalisation. Il est prévu dans ce cadre d'allouer à la Tunisie une enveloppe de l'ordre de 4 milliards de dollars. Ce montant sera destiné au financement de plusieurs secteurs ciblés dans le cadre de ce partenariat, tels que la gouvernance locale, le développement régional, l'amélioration du système bancaire, à travers notamment la recapitalisation des banques publiques et le financement des PME.