L'entreprise de reconstruction de la sélection commence peut-être à avoir de l'allure. Elle en aurait encore davantage si certains joueurs se décidaient aussi à suivre le mouvement. L'histoire ne dit pas encore si l'équipe de Tunisie est en train de se relancer. Ou encore si elle est sur la bonne voie. La maîtrise collective, la solidité défensive, la cohérence, l'engagement physique et le mental découlent souvent d'une certaine logique. On ne manque pas de le constater dans chaque match: c'est d'un jeu à grosse dominante technique qu'a vraiment besoin la sélection. Tout est fondé là-dessus et de façon générale sur la possession de la balle. Ce qui revient à dire que quelles que soient les tâches défensives ou offensives, ou les gestes à accomplir, les joueurs ne devront jamais avoir de problème avec le ballon. Donc, n'être jamais en difficulté pour bien faire repartir le jeu de derrière, là où tout commence. Contre le Japon et la Chine, la prestation n'était pas la même. Deux matches, deux équipes. La différence ne se faisait pas en effet sur les petits détails, mais plutôt sur les fondements du jeu. On retiendra la première mi-temps suffisamment prometteuse du deuxième match. Mais on ne saura encore passer sous silence les insuffisances et les défaillances qui ont marqué le premier match. Pendant ce temps, les questions essentielles pour l'avenir de la sélection restent toujours sans réponses. On s'interroge encore sur l'absence de buteur spécifique bien que l'on sache qu'il est une personnalité rare, difficile à appréhender, parce que très originale dans sa structure mentale et sa définition technique. Les buteurs d'élite ne se ressemblent pas même s'ils appartiennent à la même école de pensée. On se demande aussi pourquoi le système offensif de la sélection reste d'une pauvreté sans nom et son organisation générale ne ressemble des fois à rien. Un zeste de 4-3-3 ici, un résidu de 4-2-3-1 là, une animation à géométrie variable, tout étant dans tout et son contraire. Il ne faut pas chercher ailleurs les raisons d'un vrai malaise et d'une profonde interrogation sur une sélection dont les clubs ne travaillent pas suffisamment les fondamentaux. Le football tunisien ne parvient toujours pas à dégager les créateurs dont le jeu a tant besoin. La vérité de base est que la philosophie de l'équipe devrait reposer aussi bien sur la notion de duel et de combat que sur la technique et la maîtrise du ballon. Les joueurs auraient ainsi besoin de comprendre que le match en lui-même n'est que la conséquence de toute une série d'attitudes et l'adoption de valeurs. S'ils sont convaincus que ces valeurs sont avant tout des valeurs de jeu, de créativité et d'inspiration, ils auraient déjà une partie de la solution. Au fil du temps, on ne sait pas vraiment si l'étiquette correspond à la qualité réelle du produit. Une carrière de footballeur d'élite se gère par l'aptitude indiscutable à être un joueur de haut niveau. Quelle logique? Mais, quand le groupe reste le même, on ne voit pas les problèmes arriver. Et comme on ne les imagine pas, on ne les anticipe pas. C'est pourquoi la règle sportive qui dit qu'on ne change pas une équipe qui gagne n'est pas toujours aussi vraie. Une équipe qui gagne, ça se change. Dans de justes proportions bien sûr. Pour apporter une nouvelle dynamique. Certainement. Pour valoriser le mérite. Assurément. Pour autant, les choix de Leekens ne font pas l'unanimité. La présence de certains joueurs au sein de l'équipe n'est pas justifiée. L'absence d'autres l'est encore davantage. Nous pensons tout particulièrement au gardien du CSS, Rami Jéridi, qui aurait de toute évidence mérité d'être dans l'effectif bien avant ceux qui s'y trouvent déjà. Lors du deuxième match disputé contre la Chine, les défaillances étaient d'ordre individuel. Il y a, au fait, trop d'écarts entre les joueurs qu'on voit et entend et ceux dont on a réellement besoin. Ceux dont la compétence est plus souhaitée que la présence. Certes, le football a été mis en sélection entre parenthèses, mais il n'a jamais cessé de respirer. Même s'il est privé, par moments, de l'équilibre et de la justesse du jeu souhaités, de la solidité nécessaire, de la force mentale indispensable, de l'impact physique désiré dans certains grands rendez-vous, et surtout de la continuité voulue dans les résultats. L'entreprise de la reconstruction commence peut-être à avoir de l'allure. Elle en aurait encore davantage si certains joueurs se décidaient aussi à suivre le mouvement. Après le feu de brousse, l'herbe repoussera. On veut l'espérer. Mais peut-on vraiment être persuadé que le terrain vert reprendra bientôt ses droits ?