Par Abdelhamid Gmati De plus en plus d'Européens choisissent de passer leur retraite au soleil, et souvent à l'étranger. La Tunisie est très prisée par les retraités qui ont envie de changement, de dépaysement ou plus simplement pour des raisons économiques. Quelques milliers de Français profitent d'une retraite paisible et ensoleillée en Tunisie. « Nous sommes de plus en plus souvent consultés par des retraités désireux de s'installer au Maroc ou en Tunisie », dit-on à la Maison des Français de l'étranger qui dépend du ministère des Affaires étrangères. Déjà en 2010, ils étaient 4.000 retraités à avoir déjà traversé la Méditerranée pour s'installer chez nous. Ils apprécient le climat très agréable, une vie beaucoup moins chère qu'en France, et une retraite tranquille ici. Mais qu'en est-il de nos retraités ? Les données disponibles montrent clairement que les retraites ne constituent pas une source de revenus suffisante pour une grande partie des personnes âgées en Tunisie. Le niveau très faible du revenu des personnes âgées et la pauvreté qui l'accompagne sont donc une réalité inquiétante. Leurs revenus ne leur permettent pas de subvenir à leurs besoins. Le taux de couverture des personnes âgées est faible, dû à des niveaux de couverture passés très bas. C'est ce qui explique notamment les taux d'activité après l'âge de la retraite. Plusieurs personnes retraitées continuent à travailler pour compenser la faiblesse de leur pension de retraite, voire l'inexistence de celle-ci. En 2012, le nombre des retraités du secteur public était de 183.296, dont 87% sont des hommes et 13% des femmes. Toujours en 2012, le nombre total des retraités du secteur privé a atteint 303.404 pensionnés de droit direct dont 249.616 au régime des salariés non agricoles (Rsna). En effet, 58 % des retraités ont une pension inférieure au Smig de 2012. Et ils doivent payer des impôts sur cette maigre pension. Ceci est dû à une carrière validée courte et/ou un salaire de référence faible. Par rapport aux régimes d'autres pays, les caisses tunisiennes présentent un taux de cotisation relativement faible (le taux de cotisation apparent est de 11,3 %). Dans le régime des salariés non agricoles, la pension maximale est de 80 % de la base, obtenue après 30 années de cotisation seulement. Dans le régime général du public, la pension maximale est de 90 % obtenue après 40 années de cotisation (ce qui est rare). En 1994, le régime tunisien était excédentaire de 12 millions de dinars. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, et les caisses sociales affichent des déficits inquiétants minant le système des retraites, de la protection sociale et de l'assurance maladie. D'aucuns préconisent comme solutions de réduire les pensions et de reculer l'âge de la retraite. Passe encore pour ce qui concerne l'âge de la retraite. Ce serait même une bonne idée concernant certains métiers comme pour les artistes, les journalistes et ceux qui fonctionnent par l'esprit. Des comédiens mis à la retraite continuent à donner le meilleur d'eux-mêmes après les 60 ans fatidiques. On voit bien des politiques continuer à être productifs à un âge très avancé. Nos dirigeants actuels les plus en vue, y compris ceux de l'opposition, ont largement dépassé les 60 ans. Mais c'est à revoir concernant les métiers physiques qui éreintent le corps et ne permettent pas le même rendement passé un certain âge. Mais songer à réduire les pensions est inacceptable d'autant que ces pensions sont réellement insuffisantes. Les grèves successives dans pratiquement tous les secteurs traduisent un malaise profond vu l'érosion du pouvoir d'achat des travailleurs. Des travailleurs qui ont le soutien des organisations syndicales et font entendre leurs voix et leurs revendications. Pourtant, aucune organisation syndicale ne s'intéresse aux retraités dont le nombre excède souvent celui de certains revendicateurs. Un certain nombre de personnes âgées, dont le tonus ne faiblit pas, s'insurgent et ne veulent plus être perçues comme des boulets. Ils rappellent qu'ils ont travaillé pendant trente ans, qu'ils ont cotisé, payé des impôts et contribuer à faire la Tunisie actuelle. Et ils veulent faire entendre leurs revendications. Comment ? En faisant comme les autres travailleurs et en décrétant une grève générale. Mais une grève des retraités, comment ça marche ? Une grève, c'est un arrêt de travail, moyen de pression pour amener un employeur à satisfaire des revendications. Les retraités, eux, n'ont pas d'employeurs, ni d'emploi. Alors ? Simple : dans un premier stade, ne rien faire et mener une vie végétative de farniente. Car les retraités ne sont pas inactifs. Plus de 90% vivent en famille. Le couple travaille, le grand-père s'occupe à accompagner les enfants au jardin d'enfants ou à l'école ; la grand-mère, elle, s'occupe de l'entretien du foyer, de la cuisine, du lavage, etc. Pour cette catégorie, un arrêt de leurs occupations aurait des conséquences néfastes sur le couple, les enfants et la famille. D'autres retraités font du bénévolat au sein de certaines organisations sociales. Ceux qui vivent seuls effectuent des travaux indépendants, comme donner des cours (informatique, langues, maths) ou dans les services à mi-temps. Dans un deuxième temps, ils pensent faire la grève de la faim. Là, ça risque de faire mal : que penseraient les fameuses organisations internationales d'un pays qui affame ses personnes âgées ? Tout ceci pour dire que le peuple tunisien en a marre de ces grévistes qui détruisent le pays. Peut-être en connaissance de cause et de manière délibérée.