Les premières victimes de la torture sous Bourguiba et Ben Ali diront tout ce qu'elles ont sur le cœur mercredi par-devant les enquêteurs de l'IVD, lors de séances d'écoute à huis clos Du côté de l'Instance vérité et dignité présidée par Sihem Ben Sédrine, on se prépare à entamer, mercredi 27 mai, les premières séances d'écoute des victimes de la dictature et de la torture qui ont déjà déposé leurs dossiers auprès de l'Instance. Les séances d'écoute se tiendront au siège de l'Instance à Montplaisir sous la supervision de quelque 28 chercheurs (juristes, sociologues et psychologues) formés par l'IVD. L'opération écoute des victimes s'effectuera sur la base d'un questionnaire comprenant 70 questions préparées par la commission d'enquête et d'investigations relevant de l'IVD ou ce qu'on peut appeler les juges d'instruction de l'Instance. Les séances d'écoute se dérouleront à huis clos et chacune d'elles durera le temps qu'il faut à la victime pour livrer aux enquêteurs les informations ou les données qu'elle jugera utiles à l'appui de sa requête. Mais, en principe, une séance d'écoute ne devrait pas dépasser une demi-journée au vu du nombre des dossiers déposés qui est estimé jusqu'ici à près de 12.500 (ce nombre va augmenter puisque l'Instance poursuit toujours la réception des dossiers). Une source informée auprès des associations de la société civile spécialisées dans la justice transitionnelle confie à La Presse : «Malheureusement, les sections régionales dont la présidente de l'IVD a annoncé l'ouverture pour la semaine écoulée (à Kasserine, Sidi Bouzid, Sfax et Gafsa) sont toujours inopérantes et l'on ne sait pas si l'Instance a décidé de prendre à sa charge les frais de séjour à Tunis des victimes qui viendront de l'intérieur du pays faire leurs dépositions devant les enquêteurs. Notre crainte est de voir plusieurs victimes dans l'impossibilité de se déplacer à la capitale pour répondre aux invitations que leur adressera l'Instance. C'est la raison pour laquelle nous appelons avec insistance Sihem Ben Sedrine à accélérer la désignation des coordinateurs régionaux et à publier le plus tôt possible les noms des candidats. La raison est simple : il faut que les victimes et les associations de la société civil sachent à qui ils vont avoir affaire. Il y va de la crédibilité et de la réputation de ces mêmes candidats et aussi du respect du principe de la transparence, règle fondamentale de l'action de l'Instance et de ses sections régionales». L'impératif de sécuriser les données révélées par l'IVD Se pose un autre problème. Il s'agit de la sécurité des données livrées par les victimes à l'Instance et que cette dernière stocke dans ses ordinateurs. «L'Instance est tenue d'informer les victimes et l'opinion publique sur ce qu'elle a entrepris ou va entreprendre en vue de protéger la base de données à sa disposition contre les arnaqueurs qui peuvent tout effacer. Il est également de sa responsabilité de révéler le nom de la société de sécurité informatique qui sera chargée de l'affaire», souligne notre source. Il est à préciser que d'autres séances d'écoute publiques seront tenues à l'issue des séances qui démarrent mercredi prochain, mais avec l'accord des victimes. Mais avant de parvenir aux séances publiques, les enquêteurs vont tenir des séances d'écoute qui seront consacrées aux personne accusées de torture ou de violation des droits de l'Homme et aussi des séances d'écoute au cours desquelles parleront les témoins qui seront cités par les victimes. Et si l'on essaye de quantifier le travail qu'auront à accomplir les 28 enquêteurs de l'Instance, on peut dire, sans nous tromper, que leur tâche est considérable au vu du nombre des dossiers et aussi des moyens financiers mis à la disposition de l'Instance. Cette dernière a déjà dépensé les 10 milliards que lui a accordés le gouvernement Mehdi Jomaâ et a déjà soumis une demande de rallonge de l'ordre de 19 milliards au gouvernement Essid, dans l'espoir de les encaisser dans le cadre de la loi de finances complémentaire pour 2015.