à préserver un pan de notre histoire qui ne doit pas disparaître» Les métiers traditionnels, à l'instar de la dinanderie, l'orfèvrerie, l'ébénisterie, la ferronnerie,... risquent de disparaître car peu de jeunes maîtrisent aujourd'hui les savoir-faire traditionnels. Récemment, afin de restaurer l'intérieur d'immeubles anciens datant de l'époque coloniale, les autorités locales ont dû faire appel à des artisans étrangers pour refaire les plafonds en stuc. La secrétaire générale de l'Institut des métiers d'art a été conviée par l'association El Madaniya pour parler de l'expérience française en matière de valorisation des métiers anciens et des savoir-faire traditionnels. Interview Mme Hélène Marie Fremont, vous êtes la secrétaire générale de l'Institut des métiers d'art de Paris. Quel rôle joue-t-il dans la valorisation des savoir-faire traditionnels? Cette structure, qui est placée sous la tutelle de trois ministères, le ministère de la Culture, le ministère de l'Education nationale et le ministère de l'Artisanat, a été créée en 2010 par le premier ministre pour préserver les savoir-faire traditionnels face à l'industrialisation des secteurs d'activité économique. Notre mission est de faire de la veille et de fournir des informations sur tout ce qui se rapporte aux métiers d'art en France. Nous avons au sein de l'institut un centre de ressources humaines qui accueille, oriente et apporte conseil aux jeunes et professionnels intéressés par les métiers d'art. Notre mission est d'accompagner la mutation de ce secteur qui se trouve au carrefour de la culture et de l'économie et qui présente des enjeux de formation importants. Il existe en France près de 5.000 formations et 200 métiers d'art entre les métiers de la terre, du métal, du cuir, du textile... La mentalité a changé. Ce ne sont pas les recalés et ceux qui n'ont pas achevé leurs études qui s'orientent vers les différentes formations sur les métiers d'art. 50% des jeunes qui ont achevé leurs études choisissent aujourd'hui de se reconvertir et de suivre une formation pour apprendre un savoir-faire traditionnel. Nous venons d'achever avec les ministères de la Culture et de l'Economie la nomenclature des métiers d'art qui a été actualisée. Nous avons recensé tous les métiers d'art qui existent en France jusqu'aux métiers rares. Notre rôle est de faire la promotion de ces métiers pour en faire des métiers d'avenir. Nous organisons, chaque premier week-end d'avril, les journées européennes en France. Des artisans installés dans des ateliers expliquent aux visiteurs comment ils travaillent et comment, à partir du savoir-faire traditionnel, ils font preuve de créativité pour concevoir des produits modernes et contemporains. Pouvez-vous nous parler de l'objet de votre visite en Tunisie ? Comme je l'ai expliqué précédemment, notre mission est de revaloriser les métiers d'art et les savoir-faire anciens qui sont en voie de disparition, à l'instar des verriers, des plumaciers, des souffleurs de verre, des ébénistes... Citons l'exemple du patrimoine immobilier ancien. Il est très important de préserver des métiers comme les sculpteurs sur bois, les staffeurs, ceux qui réalisent les stucs des plafonds, les ferronniers, etc. pour pouvoir restaurer les immeubles anciens. Préserver ces métiers revient à préserver un pan de notre histoire qui ne doit pas disparaître. Nous avons établi un partenariat avec les meilleurs maîtres d'art de France qui se sont engagés à former, pendant trois ans, de jeunes professionnels afin de leur transmettre leur savoir-faire et leur expérience dans plusieurs spécialités traditionnelles. En Tunisie, nous avons été conviés par l'Association El Madaniya pour parler de notre expérience et de notre mission qui consiste à préserver les savoir-faire traditionnels. Vous avez rencontré le ministre de l'Education nationale, Néji Jalloul, et la ministre de la Culture, Latifa Lakhdar. Avez-vous discuté d'un programme de partenariat commun ? La ministre de la Culture, Latifa Lakhdar, encourage la préservation des métiers d'art et la protection de tout ce qui a trait au patrimoine. En Tunisie, le même problème existe. Il y a une disparition progressive des métiers et des savoir-faire traditionnels typiquement tunisiens qu'il faut revaloriser. On ne peut pas construire l'avenir sans le passé. A l'instar de ce que nous avons fait en France, nous avons proposé à la ministre de valoriser les métiers et savoir-faire traditionnels, en établissant une nomenclature de tous les métiers traditionnels existant en Tunisie. L'association El Madaniya a, par ailleurs, obtenu le feu vert du ministre de l'Education pour créer un lycée d'excellence qui dispensera une formation purement technique dans diverses spécialités traditionnelles. Notre objectif est de faire bénéficier l'association de notre expérience. Nous avons effectué plusieurs visites sur le terrain afin de nous faire une idée sur les programmes des centres de formation professionnelle tunisiens et nous avons pu remarquer que la formation est majoritairement axée sur la théorie. Le prochain lycée qui sera créé devra proposer une formation purement technique. Il s'agira, comme ce qu'on fait en France, d'apprendre aux jeunes à réinvestir les métiers anciens et de leur apprendre à maîtriser les savoir-faire traditionnels en faisant preuve de créativité.