L'événement est certes dramatique et insolite dans nos murs, mais il aura dévoilé, encore une fois, l'impromptitude de certains médias nationaux à couvrir ce genre de drame avec professionnalisme et sérénité, et le même manque de professionnalisme, peut-être volontaire, du côté d'autres médias étrangers cette fois, qui ne cherchent pas à informer autant qu'à induire en erreur et manipuler l'opinion internationale. Sept soldats tués par le caporal, lui-même mis hors d'état de nuire, et dix autres blessés, dont un grave, dans la fusillade qui a eu lieu pendant la cérémonie matinale du salut du drapeau. Le bilan, encore provisoire, est lourd. Il aura fallu attendre la conférence de presse donnée par le ministère de la Défense vers 13 heures pour détenir l'information complète et officielle. Avant cela, plusieurs informations ont couru dans tous les sens, la plupart privilégiant la thèse terroriste et l'attaque de la caserne militaire de Bouchoucha par un groupe de terroristes, selon le scénario du musée du Bardo ou encore celui de l'attaque du domicile de l'ancien ministre de l'Intérieur, Lotfi Ben Jeddou, à Kasserine, en 2014. On ira jusqu'à dire que les terroristes se sont introduits dans une mosquée et une école primaire, semant la terreur dans les rangs des élèves. Ce qui fut démenti par les officiels et les habitants du quartier. France 24 d'abord a eu la primeur de diffuser à la va-vite une information erronée dans l'intention sans doute de faire le buzz et surtout de faire parler de la Tunisie comme d'une destination toujours à risque où les actes terroristes, de surcroît du côté du Bardo où se trouvent le Parlement et le musée, comme ils ont tenu à le souligner, se suivent et se succèdent. L'allusion à l'attentat du 18 mars dernier dans l'enceinte abritant l'Assemblée des représentants du peuple et le musée, ayant fait une vingtaine de morts parmi les touristes, est, selon toute évidence, forte? L'information sera aussitôt relayée par d'autres chaînes, notamment Al Jazeera. Du côté des médias nationaux, à ce niveau de la couverture médiatique on joue la carte de la prudence et de la patience. A raison. L'événement est trop grave pour être traité dans la précipitation. Et l'expérience a servi cette fois pour ne pas tomber dans le piège du suivisme par rapport aux médias étrangers et de la course au scoop. Dès 8h20, soit dix minutes après les premières infos, les médias officiels, TAP et Radio nationale, démentent l'attaque terroriste de l'extérieur et annoncent que la tuerie a été perpétrée par un soldat à l'intérieur de la caserne. Mais ce ne fut pas le cas au moment de la conférence de presse donnée par le ministère de la Défense nationale. Les médias nationaux vont y faire mauvaise figure. L'attente a trop duré. L'impatience des journalistes d'un côté et la retenue du porte-parole du ministère, le commandant Belhassan Oueslati, qui s'est interdit de divulguer à la hâte des informations non vérifiées, se sont transformées en un véritable brouhaha. Une cacophonie. Loin de toute considération corporatiste, l'impatience des journalistes est tout aussi compréhensible. Et comme le dit l'adage : la nature a horreur du vide. Trop de retenue laisse immanquablement la place aux rumeurs, à la désinformation et partant à la gabegie.