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Aziz Krichen: Quelques idées pour faire face à la crise
Publié dans Leaders le 30 - 03 - 2020

Du fait de l'extrême gravité du moment actuel, j'estime qu'il faut mettre en avant deux principes de conduite collective:
• D'abord, éviter les attaques outrancières et les polémiques improductives. L'heure est au rassemblement, pas à la division;
• Ensuite, se pénétrer de l'idée que les circonstances exceptionnelles exigent des réponses exceptionnelles, qui peuvent aller jusqu'à la remise en cause radicale des anciennes manières de faire. C'est seulement en ce sens que les situations de crise majeure peuvent être profitables, car elles peuvent transformer un «mal» en «bien», ne serait-ce qu'en partie.
Nous sommes aujourd'hui confrontés à une multitude de problèmes, notamment sur le plan sanitaire et sur le plan économique et social. Je ne possède aucune compétence particulière en matière de santé publique. A cet égard, comme tous les Tunisiens, j'attends avec impatience que se constitue un conseil scientifique indépendant (comprenant des médecins, des virologues, des biologistes, des statisticiens, etc.), capable d'éclairer les citoyens et les décideurs. Je conçois que ces différents spécialistes soient entièrement pris par la lutte au quotidien contre la pandémie. Mais nous avons aussi cruellement besoin de vision d'ensemble, de connaissances précises et de stratégies curatives appropriées.
Je répète que je ne possède pas de compétence spéciale en santé publique. Mais cela n'interdit pas les observations à caractère général.
Les mesures sanitaires
1 – Sur le terrain, le gouvernement tunisien a adopté la politique de prévention suivie partout ailleurs : le confinement. Il ne s'agit pas ici de mettre en cause ce choix, mais simplement de rappeler qu'il n'est pas suffisant. Le confinement est indispensable pour juguler la propagation du virus. Mais il doit également s'accompagner de mesures adéquates garantissant l'approvisionnement régulier des populations en biens alimentaires de première nécessité. Si les choses se passent jusqu'ici plutôt correctement au niveau du Grand Tunis, ce n'est pas le cas dans plusieurs régions de l'Intérieur. Les dispositifs de confinement mis en place – fermeture de marchés, fermeture d'abattoirs, interdictions diverses frappant le transport interurbain et interrégional. – empêchent de facto les citoyens de faire leurs courses et de s'alimenter. Cela a déjà provoqué des situations de quasi émeute ici ou là et le phénomène risque de s'aggraver avec la prolongation de la période de confinement. Comme le virus, la pénurie aussi peut tuer.
2 – Dans les conditions présentes, il serait malvenu de dénoncer qui que ce soit. Objectivement parlant, les deux volets – le confinement d'un côté, l'approvisionnement de l'autre – sont contradictoires. C'est comme si l'on voulait en même temps fermer et ouvrir. La difficulté est bien réelle. Il faut pourtant la surmonter. Cela peut se faire de deux façons:
• Le gouvernement doit revoir sa copie et arrêter des dispositifs cohérents;
• A l'échelle des municipalités et des gouvernorats, les citoyens devraient s'organiser – en liaison avec les municipalités et les gouvernorats – pour chercher et trouver des solutions concrètes.
3 – Ces comités citoyens locaux ou régionaux devraient aussi prendre en charge la fourniture gratuite de rations alimentaires aux familles qui se retrouvent sans ressources. S'ils ne le faisaient pas, on risquerait de laisser le champ libre aux détestables pratiques clientélistes habituelles.
4 – Au-delà du confinement et de l'approvisionnement, il faut aussi donner un contenu effectif à la politique sanitaire. Le pays paraît aujourd'hui dénué de tout, même du matériel le plus élémentaire : masques, gels, gants, blouses, thermomètres, appareils respiratoires, etc. Etant donné l'urgence, on ne peut sans doute pas éviter d'importer. Mais on doit aussi décider de commencer à produire par nous-mêmes ce dont nous avons besoin. Le rôle du gouvernement à ce niveau est clair : il doit réquisitionner un nombre suffisant d'entreprises, publiques et privées, et leur donner l'ordre de produire ce qui nous manque. Plusieurs pays, y compris les plus libéraux, se sont engagés dans cette voie. Nous devons nous y engager à notre tour sans plus tarder.
5 – Les politiques suivies par l'Etat depuis des décennies ont littéralement détruit le secteur de la santé publique (hôpitaux, laboratoires, centres de recherche) en réduisant drastiquement les financements. Dans les semaines et les mois qui viennent, nous allons chèrement payer ces politiques à courte vue. Il est par conséquent légitime d'exiger du gouvernement actuel qu'il s'engage formellement à changer d'orientation et à promouvoir des politiques qui redonne au service public (dans la santé, mais aussi ailleurs : enseignement, transport, etc.) la place centrale qu'il devrait toujours occuper.
Les mesures économiques
L'idée directrice, sur ce plan, est d'indiquer quelles sont les grandes décisions économiques à prendre (1) pour faire face à la pandémie et (2) pour engager le pays, demain, dans une vraie politique de développement et de souveraineté.
1 – Décréter un moratoire sur la dette. A cet égard, on peut tirer argument du fait que même des responsables de la Banque mondiale et du FMI sont sur cette ligne.
2 – Contrairement à ce que fait le gouvernement, ne pas recourir à de nouveaux emprunts extérieurs. Ceux-ci ne serviraient en réalité qu'à réduire encore plus nos marges de manœuvre et à aggraver notre dépendance.
3 – Modifier les statuts actuels de la Banque Centrale, qui lui interdisent de prêter directement à l'Etat.
Dictées par le caractère exceptionnel de la période que nous traversons, ces trois premières mesures – complétées éventuellement par un grand emprunt intérieur – seraient de nature à régler le gros des besoins de l'Etat en matière de financement des programmes de soutien à mettre en œuvre.
4 – Arrêter complètement les importations non nécessaires (produits de luxe, voitures, biens de consommation courants, etc.), pour équilibrer la balance commerciale et la balance des paiements.
5 – Réprimer sévèrement les importations illégales de biens de consommation de masse. La cible principale à ce stade n'est pas la petite contrebande transfrontalière, mais la contrebande à large échelle telle qu'elle est organisée depuis des années par des affairistes véreux ayant pignon sur rue.
(Les deux dernières mesures visent à protéger les producteurs nationaux et à leur ouvrir de nouveaux espaces de croissance et de développement.)
6 – Arrêter une stratégie nationale pour développer l'industrie pharmaceutique de façon à satisfaire entièrement – dans un premier temps – nos besoins en médicaments de base.
7 – Pour garantir l'approvisionnement du pays en produits agricoles de première nécessité, commencer par libérer les prix des céréales – ces prix sont fixés d'autorité par l'administration –, de façon qu'ils puissent couvrir les coûts de production et autoriser un minimum de profit au bénéfice des paysans, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Une telle valorisation devrait permettre l'amélioration des rendements et l'augmentation des productions. Et c'est l'un des principaux leviers à utiliser pour aller, demain, vers l'autosuffisance alimentaire, sans laquelle aucune souveraineté n'est possible.
8 – Pour être pleinement efficace et englober l'ensemble de la production vivrière, cette dernière proposition doit s'accompagner de mesures vigoureuses d'assainissement des circuits de distribution. Ceux-ci – notamment les marchés agricoles de gros à l'échelle régionale et nationale – sont aujourd'hui sous la coupe de « habattas », véritables caïds qui font la pluie et le beau temps en matière de fixation des prix de vente, grugeant aussi bien les producteurs ruraux que les consommateurs urbains. S'ils ne sont pas mis sur le champ hors d'état de nuire, les prix vont continuer à s'envoler, au risque, encore une fois, de provoquer localement de véritables émeutes dues à la faim.
Ces diverses mesures relèvent du simple bon sens, voire du patriotisme le plus élémentaire. J'ai estimé nécessaire de les rappeler, alors que le pays est menacé. Depuis 2011, aucun gouvernement n'a eu le courage politique de les prendre à son compte, même partiellement. Maintenant qu'il est question de vie et de mort, l'hésitation n'est plus acceptable.


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