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Pour un lexique de la révolution
Publié dans Leaders le 20 - 04 - 2011

Ayant vécu une cinquantaine d'années sous l'emprise du totalitarisme ; conséquence corrélative de l'interférence entre le pouvoir politique et « le monopartisme », les Tunisiens n'avaient pas eu, ou rarement eu, l'occasion, de « cogiter » librement sur le sens de quelques concepts politiques, sociaux et religieux. Ni le cadre juridico-politique, ni la dictature de l'Etat, ne permettaient une telle réflexion, sauf, bien sûr, au sein des études académiques et scientifiques, dûment contrôlées d'ailleurs. Aujourd'hui que la glorieuse « révolution » tunisienne du 14 janvier 2011 a libéré les âmes et les esprits, l'opportunité est l'on ne peut plus propice pour se poser des questions sur quelques notions qui touchent directement au devenir politique du pays.
Il est du ressort, voire du devoir, des intellectuels et des spécialistes, entre autres, les juristes, les philosophes, les sociologues, les historiens…de participer à cette réflexion collective sur la nature et les objectifs de notre révolution et surtout sur l'idéal politique dont nous rêvons, alors que nous venons d'arracher le droit de participer pleinement dans la construction de la Tunisie de demain. Toutefois, la diversité des obédiences politiques et les disparités des croyances et des idéaux ne permettent nullement un consensus universel sur quelques notions de base dont le rôle devrait expliciter l'enjeu politique qui tourmente la nation entière.
La tourmente est frappante chez des jeunes et des moins jeunes, chaque fois où des débats animés sur les ondes des chaînes nationales abordent le régime politique que nous cherchons à instaurer dans le pays ou bien la nature du scrutin qui élira la constituante ou encore les axes fédéraux de la constitution que nous sommes sensés préparer dans quelques mois. Les intervenants hésitent, se trompent ou bien confondent entre des notions juridiques, principalement, dont le sens demeure incertain et assez mal développé dans l'esprit des communs et même chez ceux qui prétendent « détenir le savoir ». Des erreurs et des confusions, voire des aberrations, conscientes ou par ignorance, font état de graves intentions, en guise de polémiques scientifiques qui frisent souvent la cacophonie. Quelques-uns spéculent déjà et préparent leur campagne électorale, d'autres luttent infatigablement contre une tendance politique bien précise, plus grave encore, des tendances religieuses fondamentalistes, libérées par la révolution, mènent une guerre sans répit contre «la sécularisation» de l'Etat.
D'ailleurs, les discussions les plus véhémentes, au cours desquelles des querelles font rage, tournent autour du rapport entre « le temporel et le spirituel » : Devrait-on admettre, comme le stipulent les principes de la laïcité, la séparation entre ces deux pouvoirs ? Ou bien faudrait-il se référer à l'islamisme fondamentaliste qui prône un système islamique politico-religieux dont l'objectif principal est d'imposer la charia comme loi fondamentale de l'Etat ? Dans la mêlée, les intervenants débattent d'une cascade de définitions, souvent erronées, des notions qui sont en rapport, en l'occurrence « la laïcité », « la sécularisation », « l'athéisme », « l'Etat de droit divin », « l'Etat de droit », « le régime parlementaire », « le régime présidentiel », « scrutin de liste et scrutin uninominal »…
Cet état de fait, nécessite, ipso facto, l'intervention de spécialistes afin de contribuer à éclaircir ces notions et surtout à en relever les ambiguïtés. Parmi ces notions, celle de « la laïcité » est nettement la plus débattue ces derniers jours. Elle engage les Tunisiens dans des débats souvent sectaires et dogmatiques autour de thèmes analogues : « Laïcité et sécularisation », « Laïcité et athéisme » « Etat laïc et Etat de droit islamique ? », « La Tunisie est-elle un pays islamique ou bien de religion musulmane? »…
On ne peut prétendre apporter une réponse définitive et idéale à cette notion ambiguë et pluridimensionnelle. Retenons, toutefois, ses origines historiques et tâchons de la débarrasser de ses analogies qui prêtent à confusion.
Qu'est-ce que la laïcité ?
Etymologiquement :
Le mot « laïc » est issu du latin laicus: le commun qui appartient au peuple. En matière de théologie, le laïc désigne, depuis le Moyen Âge, toute personne de la communauté qui n'appartient pas à l'ordre religieux qui doit être initié, contrairement au clergé instruit et consacré par son état religieux.
Historiquement :
Dans ses dimensions politiques, le concept de laïcité, en tant que séparation du pouvoir spirituel (ecclésiastique) et du pouvoir temporel (séculier), est ancien. Cependant, il fut conçu, officiellement, dans le corpus philosophique du siècle des lumières. La philosophie des Lumières se déclarait, de ce point de vue, ouvertement laïque, refusant d'être servante de la théologie, bien que la plupart des philosophes de cette époque fussent des disciples des écoles des jésuites et des scolastiques appartenant à l'Eglise. Les ouvrages des penseurs, écrivains et philosophes de cette époque ne manquèrent pas de critiques adressées à cette institution, au clergé et à la religion chrétienne d'une façon générale. L'ennemi principal des philosophes n'était autre que le christianisme auquel ils lui reprochaient d'être antirationnel dans tout ce qu'il rapportait.
La Révolution française concrétisa, ultérieurement, le vœux des philosophes des Lumières en réservant dans «la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen » du 26 août 1789, l'Article 10 qui stipulait que « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ». La constitution de 1791 corrobora cet article et établit la liberté des cultes : catholique, protestant et judaïque.
Désormais, les monarchies constitutionnelles et les régimes républicains adoptent le principe de la laïcité afin de garantir la liberté de conscience et le droit d'exprimer ses convictions religieuses. Par ailleurs, la laïcité, assure la neutralité de l'Etat en matière religieuse. Ce dernier ne peut et ne doit privilégier aucune tendance religieuse. La laïcité devient donc une valeur fondatrice et un principe irréversible de la République
Laïcité et tolérance
En référence à la philosophie des Lumières, l'intolérance religieuse constituait l'attitude la plus scandaleuse des hommes de l'Eglise, voire de la religion chrétienne tout entière. Elle devenait un abus inadmissible lorsque l'Etat s'en mêlait. Voltaire, à côté d'autres philosophes dont Rousseau et Diderot, s'est montré l'adversaire le plus acharné contre cette institution dans sa liaison intime avec la monarchie absolue. Et pourtant il n'a pas perdu sa foi en Dieu. Très vite, il a compris qu'il fallait enlever à l'Eglise l'exercice du pouvoir temporel et le monopole des âmes. Mais son anticléricalisme n'empêcha en rien son déisme déclaré.
La laïcité désignait, depuis lors, la tolérance et l'acceptation de l'autre dans sa différence, ethnique, mais surtout intellectuelle et spirituelle. Au sens contemporain, la laïcité se présente comme étant le principe d'unité qui rassemble les hommes d'opinions, de religions ou de convictions diverses en une même société politique, distincte par conséquent d'une communauté. Dans une perspective laïque, les croyances et les convictions qui ont rapport direct à la religion ne sont que des opinions personnelles et privées. Elles ne doivent, cependant, avoir aucune influence sur la marche de l'Etat. La politique s'érige ainsi comme une affaire humaine, libérées de toute forme de dictature religieuse. Réciproquement, la liberté de croyance et de pratique doit être entière et purement personnelle; dans les limites de "l'ordre public".
En islam, il est à rappeler que le coran est riche en versets qui prônent la tolérance : "Point de contrainte en religion", Coran, Sourate 2, verset 256, "Et ne discutez que de la meilleure façon avec les gens du Livre, sauf ceux d'entre eux qui sont injustes", Coran Sourate 29 verset 46... En référence au texte sacré, l'orthodoxie sunnite prône le rayonnement de la paix et l'amour envers ceux qui pensent autrement. Ceci est positif dans la mesure où des musulmans tolèrent, démocratiquement, la coexistence, sur le même pied d'égalité, avec d'autres qui leur sont différents.
Par contre, L'islamisme, radical, opte d'une façon irréversible pour « un choix conscient de la doctrine musulmane comme guide pour toute action politique » ou encore, selon d'autres, une « idéologie manipulant l'islam en vue d'un projet politique : transformer le système politique et social d'un Etat en faisant de la charia, dont l'interprétation univoque est imposée à l'ensemble de la société, l'unique source du droit ».
Laïcité et athéisme
Le mot athée (dans sa version française) remonte également au XVIe siècle. Le terme est composé du préfixe « a » privatif qui signifie sans et du radical grec théos signifiant dieu. Donc, l'athée est celui « qui ne croit pas aux dieux » (chez les grecs) puis « qui ne croit pas en Dieu », dans les religions monothéistes.
L'athéisme, dans sa version matérialiste, ne consiste pas seulement à croire que « Dieu » n'existe pas, mais à ne pas y croire et à penser qu'il n'y a rien de tel, ni considérer le phénomène comme sacré et surnaturel. Par extension, on ne reconnaît l'existence de quelque divinité que ce soit. La pensée athée se revendique comme fondée sur le rationnel. Il existe néanmoins diverses formes d'athéisme en fonction des fondements et de la culture de chaque individu.
L'on ne peut, donc, confondre entre laïcité et athéisme, sauf si, intentionnellement, on vise à embrouiller des esprits peu avertis et à embrigader des candidats potentiels pour une quelconque propagande religieuse et politique.
Jamoussi Habib


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