Le capital investissement se révèle être une bonne alternative au financement des PME. Il revêt un intérêt macroéconomique majeur en tant que facteur important de développement d'un tissu d'entreprises dynamiques et créatrices d'emploi. Ayant été l'un des deux premiers pays, à saisir l'importance stratégique de ce mode de financement, la Tunisie va abriter les 24 et 25 avril prochain, la deuxième édition d' « Euromed Capital Forum ». En prélude à cette manifestation d'envergure, le Centre des Jeunes Dirigeants de Sfax vient d'avoir l'initiative de prendre les devants en organisant une table ronde sur le thème : « Marché financier et capital-investissement, alternatives au financement des PME ». Démarrant sur deux brillants éclairages fournis par Aziz MBAREK et Fadhel ABDELKEFI, respectivement DG de Tuninvest et de Tunisie Valeurs, l'ordre du jour de la rencontre avec les jeunes dirigeants et les chefs d'entreprises a également comporté un échange des plus instructifs sur ce mode d'investissement. Il ressort des interventions des deux spécialistes que le Capital Investissement est l'outil privilégié du développement du secteur privé et un levier efficient de l'investissement ce qui lui attribue un rôle majeur dans l'essor micro et macroéconomique. Le Capital Investissement se définit comme étant l'ensemble « des opérations qui consistent à prendre des participations au capital de sociétés non cotées. Ces prises de participation, généralement minoritaires, sont effectuées par des professionnels spécialisés ayant comme principal objectif la réalisation de plus values substantielles dans un délai relativement court, généralement compris entre 4 et 5 ans. » A cela , M. Mbarek ajoute : « C'est le fait de concourir à apporter des capitaux propres à l'entreprise », ce qui distingue ce mode d'investissement à la fois du portage et des crédits bancaires, facteurs potentiels d'endettement.
Mais d'abord, qu'en est-il actuellement en Tunisie, du Capital Investissement ? Selon notre interlocuteur, les pouvoirs publics en Tunisie ont pris conscience de l'importance de cet instrument depuis quelques années déjà en promulguant une législation avant-gardiste qui accorde des avantages fiscaux aux souscripteurs aux SICARS et aux SICARS elles-mêmes. Par la suite, la profession a été organisée autour de l'ATIC (Association Tunisienne d'Investissement en Capital ), structure qui est en train d'œuvrer à promouvoir les conditions d'intervention des SICARS dans les entreprises tunisiennes. De leur côté, les entreprises manifestent un intérêt accru au financement par les sociétés d'investissement à capital- risque : « Un cercle vertueux est en train de s'enclencher, qui va permettre à cette activité de croître dans les prochaines années », sachant, qu'en ce domaine, l'Europe accuse déjà un important retard par rapport aux Etats-Unis et que pour notre part, nous sommes devancés par le Vieux continent, quoique nous soyons à l'avant-garde des pays de la région MENA laquelle englobe les pays méditerranéens de l'Union Européenne : Algérie, Palestine, Egypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Syrie, Tunisie, Turquie et Libye (ayant un statut d'observateur).
Les associations de capital-risque vont-elles se substituer aux banques ou les détrôner? La réponse est « non » dans la mesure où les entreprises auront toujours besoin des deux types d'investissements, les entreprises ayant besoin en général, de recourir au financement en capital, en complément au financement bancaire, ce qui leur permet de réduire leur endettement et de s'assurer les conditions optimales de compétition comme l'exige le contexte concurrentiel actuel de la mondialisation. Avec, toutefois, la différence que les SICARS participent au capital de l'entreprise de façon a ce que celle-ci puisse se prévaloir d'un schéma où la part du capital propre avoisine, sinon dépasse les 50 % des crédits demandés, particulièrement dans certains secteurs d'activité. A ce propos, M MBAREK insiste sur le fait que « quand on parle d'alternative, il s'agit d'une alternative au crédit, pour une partie seulement de ce qu'il y a à financer. Donc, le crédit reste un élément important en matière de financement de l'entreprise, sauf que sa part de mon point de vue, doit être réduite pour ne pas mettre l'entreprise en danger par le surendettement ».
Quel avantage présente le financement par les sociétés de capital-investissement pour l'entreprise?. « C'est justement, d'avoir la structure financière appropriée, donc d'abord d'assurer les conditions optimales de financement. Cela permet d'éviter les endettements et de renforcer les capacités de remboursement car , si la capacité de remboursement ne permet pas de couvrir ce qu'on appelle le service de la dette,elle se retrouve en difficulté. D'autre part, les SICARS ne sont pas des intervenants passifs dans le financement de l'entreprise. Elles apportent une présence active au sein des conseils d'administration, une valeur ajoutée que ce soit par le biais des réseaux ou les conseils stratégiques qui peuvent faire bénéficier l'entreprise, au même titre qu'un expert comptable ou un conseiller ayant une connaissance parfaite du secteur d'activité, en plus évidemment de l'argent qu'elle apporte, de l'assistance qu'elle assure et de l'accompagnement qu'elle fournit » Ainsi, les sociétés de Capital-risque deviennent des partenaires à part entière dans la promotion de l'entreprise mais pas à titre gratuit pour la simple raison qu'il s'agit de sociétés commerciales dont le but est de réaliser du profit : « Elles interviennent pour gagner de l'argent sur la valeur additionnelle prise par l'entreprise. Leur gain,c'est la croissance de cette valeur induite par la contribution qu'elles apportent. ». A la question de savoir si les SICARS deviennent des associées pour la vie,dans les entreprises qu'elles financent, la réponse du DG de Tuninvest est négative : « La SICAR a , en fait , une obligation de liquidité. Son intervention est par conséquent limitée à une période relativement longue de 4 à 7 ans, au bout de laquelle, elle doit retrouver la liquidité. La solution que nous privilégions, c'est d'entrer en bourse parce que cela enclenche là aussi un cercle vertueux dans la mesure où cela permet à l'entreprise d'assurer les liquidités de la SICAR, d'avoir la capacité de lever le cash additionnel et d'apporter une solution patrimoniale au chef d'entreprise. Au cas où toutes les conditions ne seraient pas réunies pour rentrer sur le marché, dans plusieurs cas, nous avons été amenés à chercher un tiers qui veuille se substituer à nous dans le capital de l'entreprise. On essaie de faire en sorte que ce tiers lui apporte une valeur ajoutée. Dans plusieurs cas, nous avons été capables d'apporter, par le capital de la société en substitution à notre participation, des leaders régionaux ou mondiaux ou bien des acteurs locaux qui ont apporté une valeur ajoutée à l'entreprise. Quant à la troisième solution, que nous essayons d'éviter d'ailleurs, c'est de rétrocéder le capital au chef de l'entreprise. Mais même si nous sommes dans l'obligation de vendre nos actions, nous tenons à le faire d'une manière qui projette l'entreprise vers l'avenir et qui ne la rétrograde pas justement dans une situation où elle se renfermerait sur elle-même»
Le recours au capital-investissement, est-ce toujours la panacée pour réaliser les objectifs des entreprises de plus-values substantielles ?. Il ressort des débats que le taux de réussite, par ailleurs très rassurant, n'exclut pas quelques rares cas d'échecs dans lesquels, les prévisions des SICARS ne se sont pas matérialisées dans les faits pour des raisons qui ont trait au marché et au contexte local ou mondial. L'absence de transparence de la part des chefs d'entreprises bénéficiaires du financement est également à incriminer et il y en aurait eu même qui ont eu à le regretter, tant la confiance, la clarté sont déterminants pour la réussite de l'entreprise. Il serait, par ailleurs utile de souligner que « les SICARS ne financent ni la recherche scientifique ni une aventure personnelle mais des projets soutenus par des équipes de managers capables de greffer une technologie ou une idée sur un marché, par essence, international, car l'activité est très réduite en Tunisie »
Quel est le rôle dévolu alors au secteur public ? Les pouvoirs publics ont un rôle incitatif et structurant indispensable « pour amorcer le démarrage des activités de capital investissement » Taieb LAJILI
TAREK BACCOUR, PDG d'IGL : L'intervention de Tuninvest a concerné le volet investissement. Notre société, pour se développer, avait besoin d'actes diversifiés pour, accroître surtout ses sources de financement. Or, c'était là la source de financement la plus adéquate pour notre situation de l'époque. Nous avions besoin également de l'assistance d'une équipe de professionnels qui plus est, pouvaient apporter ne vision externe, objective, sans pour autant perdre le contrôle de la société. Les premiers objectifs de l'époque, c'est-à-dire, au cours des trois ou quatre premières années, ont été réalisés à 100 %. Par la suite, on a eu d'autres objectifs plus ambitieux que nous sommes en train de réaliser dans le cadre de nouvelles augmentations, de nouvelles progressions, de nouveaux financements. En somme, c'est une expérience concluante, dans la mesure où, nous, équipe dirigeante, nous nous consacrons à notre métier d'origine, à ce que nous savons faire, c'est-à-dire gagner des parts de marché, étoffer notre portefeuille clients, recruter du personnel. Bref, nous consacrer à notre passion de créateurs de valeurs. L'intervention de Tuninvest nous a permis de réaliser nos objectifs de croissance et de réaliser une remontée sensible de notre capital qui est passé de 200 mille dinars à 04 millions de dinars. TL