Artiste contemporaine tuniso- suisse, Fatma Charfi (1955-1918), qui a quitté ce monde sur la pointe des pieds, compte parmi les artistes créateurs qui ont consacré leur vie, à l'art élevé aux valeurs d'universalité et de dignité. Les lecteurs du « Temps » se rappelleront certainement, des articles qui lui ont été consacrés dans les années quatre-vingt-dix, quand l'artiste exposait à la galerie Yahia, pour n'évoquer que cet espace. « Un sens au chaos », titrait le journal « Le Temps », avec au passage, un rappel du parcours de l'artiste aux multiples facettes : « De Genève à Tunis, Fatma Charfi, apporte la fraîcheur d'une démarche artistique singulière. A découvrir ». Louable initiative de l'ambassade de Suisse en Tunisie, de lui avoir consacré (depuis le 23 novembre 2018 et jusqu'à la fin du mois de février 2019), une grande exposition intitulée : «Etre avec…». Un témoignage, selon les critiques, rendu à l'intensité de son œuvre et à son engagement humaniste, grâce aux efforts de l'Association - Fatma Charfi- présidée par son fils, Nabil Mseddi. Engagement pour la paix L'exposition lui rend donc hommage, et présente quelques-unes de ses œuvres qui témoignent de son engagement pour la paix et l'amour de l'humanité. Pour ceux qui l'ont côtoyée de son vivant et apprécié sa manière d'appréhender le monde, reconnaissent que son œuvre originale, prône un horizon de valeurs purement humanistes. Le fameux personnage, « Abrouc », à la fois fragile et déterminé, l'artiste l'a inventé et conçu pour mettre en scène, les guerres, les injustices, mais aussi, les désirs possibles d'une vie heureuse, par-delà les différences. Sensible et passionnée- écrira l'historienne de l'art, Rachida Triki- Fatma Charfi, s'est investie dans son art, jusqu'au dernier souffle pour donner forme par vidéo-art, installation, performance, photo, peinture ou dessin, aux possibles d'un « être avec »… Riche de son expérience personnelle biculturelle, l'artiste tuniso -suisse a choisi la voie de l'engagement existentiel, pour dépasser les identifications réductrices et œuvrer à une acception plus universelle de l'humain… tout en exprimant dans ses œuvres, son désir d'un rapport avec ses semblables au sein d'une nature commune. Perpétuer l'art d'une mère, partie trop tôt L'œuvre de Fatma Charfi est connue dans plusieurs pays, notamment par le biais du projet « Laboratoire de paix ». En effet, l'artiste a été la première femme et nord-africaine à remporter le Grand Prix Léopold Cedar Senghor, à la Biennale de Dak'Art 2000, au Sénégal. On lui a aussi attribué le Prix du Jury à la Biennale d'Alexandrie en 1999. Son travail est considéré comme une œuvre pluridimensionnelle qui réunit dialectiquement, les figures de la vie et de la mort dans des créations à portée universelle. « Ma mère nous a quittés le 9 mai 2018 à Vevey en Suisse, suite à une bataille acharnée contre le cancer, témoigne son fils Nabil Mseddi. C'est face à ce fléau, malgré la dénutrition, la souffrance physique et le calvaire psychologique, la peau sur les os, et munie d'une force de caractère et d'une loyauté à sa vocation inébranlable, qu'elle a su faire face au dénouement tragique de sa vie, en se plongeant dans la réalisation d'une série de dessins mystérieux jusqu'à ses derniers instants. Son cœur a cessé de battre quelques heures après sa dernière création... C'est à ce moment-là que, plein de remords, j'ai commencé à réellement comprendre l'Artiste qu'elle était, et lui ai juré de veiller à perpétuer sa création. C'était une âme créatrice qui ne cherchait ni la gloire, ni la scène, mais simplement à créer son monde... » Association Fatma Charfi L'association Fatma Charfi, représentée par les enfants et héritiers de feue l'artiste plasticienne, a pour vocation d'organiser des événements autour de l'œuvre de l'artiste défunte, afin de mettre en lumière, son travail sur la scène nationale et internationale, à travers divers événements, et lui offrir la gloire qu'elle méritait tant. Le deuxième but de l'association, consistera à octroyer une bourse annuelle à des femmes artistes qui seront minutieusement sélectionnées. Rappelant qu'un hommage lui a été rendu par notre ministre de la culture (juin 2018), à la Cité de la Culture, à l'occasion du 40ème jour de son décès. Expo à Dakar, été 2019 Selon Nabil Mseddi, d'autres expositions sont prévues dans de grands musées au Sénégal, en Algérie, au Maroc, dans une galerie à Londres et à Paris, au courant de 2019-2020. « J'ai aussi mis à jour, a t-il dit, son site internet (fatmacharfi.com), que j'alimente continuellement. Il m'a semblé judicieux de rassembler toutes ces activités sous le nom d'une enseigne qui représenterait ma mère… » De même, durant l'été 2019, (espérons-le), on évoque la tenue d'une exposition qui réunira plusieurs artistes autour d'un hommage à Fatma Charfi, au Musée Théodore-Monod d'art africain à Dakar, ville où l'artiste a vécu ses plus hauts moments de gloire. Le choix des artistes et des œuvres, sera confié à Sylvain Sankale, avocat réputé de la place, et féru d'art, Malick Ndiaye, conservateur du musée IFAN et Abdou Diouf Ndiaye, coordinateur et documentaliste à la Biennale de Dakar. Bon vent à l'Association Fatma Charfi…Et que notre chère artiste repose en paix !