L'année dernière la France a vu surgir sa bête noire, furieuse et incontrôlable : la Banlieue. Des réunions, des manifestations et des discours qui n'ont conduit à aucune solution pour ces lieux marginalisés. En Tunisie, ces zones sensibles existent aussi aux alentours des grandes villes et vivent des problèmes similaires. Taux de criminalité élevé, chômage, pauvreté et insécurité. Qui vit dans ces zones pointées du doigt ? Visite guidée avec un habitant de la Cité Helal. Ils sont les lieux où se déroulent les faits divers décrits dans les journaux. On les appelle les quartiers chauds. Les désigner serait les marginaliser et les condamner, donc passons la désagréable énumération. B. habite à la Cité Helal, il est fils d'une femme de ménage. Son père a quitté le foyer familial depuis des années sans divorcer. Sa mère travaille pour subvenir aux besoins de la famille élargie par les deux cousines dont la mère est décédée. Dans ce quartier proche de Montfleury, le décor est modeste. Une bande de jeunes « hittistes » dévisage les passants et fixe du regard les véhicules qui passent. Quand on est avec un enfant des lieux, on ne craint rien, mais on sent quand même l'électricité dans l'air et les pas deviennent plus lourds et hésitants. Nul besoin d'être docteur en sociologie pour remarquer la tendance agressive et le climat d'insécurité palpable. « Ici, vaut mieux n'avoir ni bijoux, ni argent, ni téléphone portable surtout la nuit. Au croisement en bas de la rue, par la portière d'une voiture, ou par la fenêtre, on vole le sac à main ou tout ce qui se trouve à portée, un peu plus loin on braque les passants surtout les dames qui vident le contenu de leur sac. » Les jeunes, n'ont rien à faire de leur journée, ils errent dans le centre ville, dorment, ou restent au café du coin. L'école ne leur dit rien et ils se sont habitués à l'argent facile. Le chômage est le problème de quasi-tout le monde ; « leur quartier, leur faciès, leur passé les empêche de trouver un job » explique B. Mais tous ne sont pas de pauvres enfants de chœur, certains par paresse et par habitude volent et braquent. « Imaginez un garçon de 12 ans qui rentre à la maison, déprimé et affamé et trouve son père en train de tabasser sa mère et lui crie d'aller voir ailleurs ! Quel genre de personne sera -t-il ? il apprendra à répandre la haine et la violence. C'est un cas fréquent. » Le besoin les poussent à voler des portables traçables (numéro de série qui fait qu'ils ne rapportent rien) pour les vendre à 5d ou 10 juste le prix de l'alcool d'une soirée ou d'une poignée de comprimés. Les habitants eux même se plaignent de ce manque de sécurité et ont en marre des agressions. « Dans d'autres quartiers, les policiers font des rondes mais c'est insuffisant. Aujourd'hui ils arrêtent le voyou, demain son frère ou son cousin fait surface. Parfois un policier seul ne peut pas s'aventurer dans certaines ruelles par crainte pour sa vie ou de se faire tabasser. » Que faire ? Ratisser large ou gérer au jour le jour ? Les approches sociales ne paraissent pas pouvoir régler le problème. Et entre temps les agressions se multiplient à l'extérieur de ces cités, et à l'intérieur, la précarité et l'insécurité règnent. Hager ALMI
Désengagement (s) Rien qu'à parcourir les faits divers dans les journaux, on saisit l'ampleur de la délinquance juvénile et la recrudescence de la petite criminalité. L'Etat est en train d'assumer son rôle dans la lutte contre ce fléau. Mais suffit-il de déférer les coupables en justice, de les emprisonner pour un certain temps, avec un taux important de récidive ? On revient donc à l'environnement familial et donc social. Il y a un désengagement de la famille. C'est un fait. Un désengagement de l'école aussi. Il y a aussi la structure urbaine anarchique et la ceinture verte avec une concentration de quartiers populaires et, donc, potentiellement des quartiers chauds. Les traditionnels « quartiers à risque » sont passés de mode. Ils se sont même quelque part embourgeoisés. Aujourd'hui il y a une profusion de nouveaux quartiers et d'un nouveau type de délinquance. Il y a donc trop de problèmes concentrés en un seul. Et cela mérite une série de dossiers « à thèmes ».