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Pays à huis clos et qui fait la manche !
Publié dans Le Temps le 17 - 01 - 2021

Comment est perçu à l'étranger le berceau du Printemps arabe ? Au mieux, de la compassion pour les espérances trahies. Au pire, de l'indifférence, si ce n'est la très astreignante pression exercée par organismes financiers mondiaux sur la souveraineté décisionnelle du pays. La flamme du 14 janvier s'est en effet éteinte. Dans le silence de l'Avenue mythique de toutes les renaissances et de tous les avatars aussi, dans sa solitude, Madame Radhia Nasraoui pouvait manifester son dépit devant le ministère de l'Intérieur, écriteau chiffonné à la main : « Libérez ma patrie ». En dehors du cliché qui ne sera pas immortalisé pour la postérité, son cri de détresse saccadée ne sera entendu par personne.
Le 14 janvier 2011, il s'agissait de libérer la patrie du système Ben Ali. Dix ans après, on ne compte plus le nombre d'envahisseurs. Mais, hormis les grandes exhibitions électorales, hormis le nouveau système aux mains de « révolutionnaires de la 25ème heure », hormis toutes les effusions jaculatoires autour de cette nouvelle ère de libertés et d'émancipation, le pays vit à huis clos, exactement comme dans la pièce de Jean Paul Sartre, c'est-à-dire dans une situation d'emprisonnement et qui pose de lancinantes questions éthiques et existentielles. Et ce n'est pas uniquement une hyperbole métaphorique.
A qui le comique et à qui le tragique ?
On a eu beau parcourir une large revue de presse sur ce qui s'est dit et s'est écrit sur la Tunisie à travers les médias internationaux. La synthèse nous renvoie à la figure un pays en perdition et au bord de la banqueroute. Ils n'ont rien dit de ce que les Tunisiens ne sachent déjà. Le mal vient de la cassure entre le peuple plus que jamais aujourd'hui en proie à des tourments existentiels, et les classes dirigeantes qui se sont passé le relais de son désespoir. Cette révolution, seul le peuple y a cru, avant de déchanter et de se rendre compte qu'il a été manipulé. Et, quelque part, on nous dit encore que cette révolution est ce qui pouvait arriver de meilleur pour le pays, depuis trois mille ans d'existence. La révolution était sans doute un impératif de l'Histoire. Mais nous pouvions déroger aux principes hégéliens qui veulent que, pour se mouvoir, l'Histoire doive impérativement être accoucheuse de violence. Plutôt, c'est le concept marxiste qui sied chez nous, à ce qui s'est passé en une décennie de révolution : le tragique et le comique. Nous sommes en plein comique. Mais, pour faire coexister les deux, il y aurait à couper la poire en deux : le comique pour la classe dirigeante ; le tragique pour le peuple !
Maintenant, ceux qui prennent appui sur le Révolution française ou, encore, sur la Révolution bolchévique pour justifier cette lente incubation de la révolution tunisienne, eh bien, ils se trompent de logiciel. Unir dix millions de Tunisiens autour de certaines valeurs, redistribuer équitablement les richesses, remédier aux clivages régionaux et instituer une justice égalitaire pour tous, ce n'était pas impossible et aussi problématique que cela sur un territoire aussi petit que le nôtre. Les tribuns récupérateurs, les nouveaux seigneurs du pays n'en avaient cure. Les maroquins, les privilèges et la mainmise sur les rouages de l'Etat, ça oui, c'était leur gage de survie.
En tous les cas, l'illustration du comique vient de nous être donnée par deux entités qui se vouent mutuellement une haine viscérale.
La première illustration nous est fournie par une guerre de clochers (ou guerre de minarets) que déclare Seifeddine Makhlouf à Rached Ghannouchi à la suite d'un semblant de condamnation par le bureau de l'ARP de la violence qu'a fait subir Al Karama à Ettayar et, surtout, au vu de la détérioration de l'état de santé de Samia Abbou, en grève de la faim. N'en croyez pas un mot. Jamais Seifeddine Makhlouf ne se passera des bonnes grâces de son bienfaiteur. Le Cheikh suprême trouvera bien le moyen de le calmer.
La deuxième, est là c'est un camouflet, c'est lorsque Othman Jarandi, ministre des Affaires étrangères, déclare au peuple tunisien que l'Algérie partagera avec la Tunisie son lot de vaccins et que, tout de suite après, les autorités algériennes tempèrent les ardeurs de notre ministre, juste pour éviter élégamment un démenti. Voilà donc, où nous en sommes ! Nous quémandons le vaccin et nous faisons la manche ! Avilissant pour un peuple fier.
Quelle position de Méchichi entre Saïed et Ghannouchi ?
Entretemps, la Tunisie est obligée de se retourner vers le FMI, mais Méchichi ne sait pas vraiment comment s'y prendre, du fait que les gouvernements ayant précédé le sien ont dérogé aux conditions émises par Christine Lagarde. A ce point d'assèchement des liquidités, des fonds pour entreprendre les grandes réformes annoncées, sans le concours et l'aval du FMI, aller sur le marché international reviendrait à un saut mortel.
De surcroît, le coût des revendications sociales et corporatistes suppose la mobilisation de fonds dont cet Etat fortement endetté ne dispose pas. Déjà, la croissance n'espère pas retrouver un semblant de trend d'avant 2011 (qui n'était déjà pas au mieux) et de 2012, là où on a enregistré une légère embellie. Or, le chômage a enregistré entre 2011 et 2019 une hausse potentiellement explosive. Recrudescence qui fait que le chômage est passé de 13% de la population active à 15% hors effet Covid-19 et à plus de 18% avec effet de la pandémie. (Cf. : l'analyse de Radhi Meddeb expert économique et Président du Groupe Comete Engeneery analyse). La fonction publique et les entreprises de l'Etat sont sursaturées et le gros du budget y est alloué « grâce » à la sur-employabilité imposée par la Troïka.
Le FMI ne consentira à nous écouter qu'à certaines conditions drastiques. Et cela touche à tous les domaines, et de plus, avec la Covid-19, il n'y a pas à attendre grand-chose de la part des pays frères et amis, ni de la part de notre principal partenaire, la France suivie de l'Allemagne et de l'Italie. Tous les pays connaissent une passe difficile en effet. Et puis, comme le dit le proverbe : « charité bien ordonnée commence par soi-même ».
A l'évidence, le Président de la république est comme dans la lune, comme cet être décrit par Mirabeau, le philosophe révolutionnaire et homme politique, cet être qui contemple l'astre lunaire et qui, par le même, se détache des contingences matérielles. Personnage éponyme, un rêveur, parce que la lune renvoie au rêve et à l'onirisme. Mais, voulant apporter sa contribution « exclusive » à la lutte contre la pandémie, il prône « la diplomatie de la manche », comme pour contourner les demandes en vaccins faites par le gouvernement.
Il faudra bien que le Président comprenne un jour qu'il faille renoncer à notre nombrilisme révolutionnaire. Cela ne prend plus. Parce que si ça se trouve, un opportuniste comme Rached Ghannouchi, celui-là même qui mène une diplomatie parallèle, aurait demandé au Qatar et à la Turquie de partager avec nous leur vaccin. Il sait que c'est un terrain impraticable.
Maintenant, que fera Mechichi ? Dans l'immédiat, ce sera un remaniement ministériel. Une liste des nouveaux ministres est même fuitée. A l'évidence, ce sera encore un gouvernement de technocrates. On en conclura qu'il s'est plié aux injonctions de son « coussin » parlementaires. Et ce qu'a dit à ce propos Rached Ghannouchi, dans sa récente interview à une chaine qatarie, en corrobore la suspicion.
Sauf que, si un Président avec la tête dans la lune pourrait représenter un avantage pour le Chef du gouvernement, un Président de l'ARP tel Ghannouchi qui, lui, a toujours les pieds sur terre, est naturellement dans la psychologie du primate. Il se veut dominant. Méchichi devra faire preuve de sens de la stratégie. En un mot, éviter de vendre son âme à Ghannouchi, comme l'a fait Faust en vendant la sienne à Méphisto, le diable, dans cet ouvrage d'apologie de Goethe.
R.K.


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