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Khereddine en Europe
Publié dans Le Temps le 08 - 02 - 2021

Fascinante est la trace du ministre réformateur Khereddine en Europe et surtout aux Pays-Bas... La Tunisie venait de promulguer sa première constitution. Le pays vivait une ère de réformes et de modernisation.
L'esclavage est aboli en 1846, une constitution est octroyée en 1861. Sous l'impulsion de l'historien Ibn AbiDhiaf, celle du théologien Salem Bouhajeb et celle de Khereddine, le groupe des réformateurs avait le vent en poupe.
Ce frémissement moderniste connu par la Tunisie avait alors été salué par plusieurs souverains européens. Ces derniers avaient envoyé des décorations à Mohamed Sadok, bey de l'époque.
Une ambassade tunisienne
aux Pays-Bas
Pour les remercier et renforcer les liens diplomatiques, Sadok Bey déléguera alors une ambassade qui comprenait essentiellement Khereddine et Mohamed Baccouche. Chargée d'une mission officielle, la délégation quitta Tunis le 22 juin 1861 pour un voyage de quatre mois.
La première destination de l'ambassade sera Paris afin d'y rencontrer Napoléon III. Khereddine et ses compagnons iront ensuite en Suède. Ce long périple les mènera par le chemin de fer jusqu'à Stettin où ils embarqueront pour Stockholm.
Après onze jours, la délégation quittera la Suède le 23 juillet pour se rendre à Baden-Baden afin de rendre visite au roi de Prusse. Arrivés à Francfort, les émissaires tunisiens apprirent que le souverain prussien était absent de Berlin.
De retour à Paris, Khereddine se rendra alors à La Haye par le train. Il y arrivera le 10 août 1861 et sera reçu avec faste. Le consul Henri Nijssen accueillera la délégation tunisienne en gare de La Haye et l'accompagnera jusqu'à son départ, prévu le 19 août.
Pendant cette dizaine de jours, Khereddine sera reçu en audience par le roi et son ministre des Affaires étrangères. Il remet au souverain néerlandais une décoration tunisienne que lui adresse Sadok Bey. Il reçoit pour le bey de Tunis la grande croix du Lion néerlandais ainsi que d'autres décorations destinées aux grands dignitaires tunisiens.
De plus, Khereddine recevra durant son séjour un exemplaire du règlement du Sénat néerlandais. Se basant probablement sur les informations contenues dans ce texte, il consacrera aux Pays-Bas un chapitre de son fameux ouvrage « La plus sûre direction pour construire l'état des nations » (1867).
Après son séjour aux Pays-Bas, la délégation tunisienne entreprendra de se rendre en Belgique. Toutefois, apprenant l'absence du souverain, Khereddine et sa suite poursuivront leur voyage jusqu'à Paris.
Le nouveau séjour parisien permettra à la délégation de rencontrer le ministre français des Affaires étrangères. L'ambassade prendra ensuite le chemin de Bruxelles puis de Copenhague où, arrivé le 3 octobre, Khereddine remettra une décoration au roi du Danemark.
Enfin, après une nouvelle escale parisienne et une rencontre avec Napoléon III, la délégation reviendra à Tunis. Presque deux années plus tard, en mars 1863, le bey Mohamed Sadok recevra, écho de ce périple, un portrait du roi néerlandais.
De retour en Tunisie, Khereddine deviendra de 1873 à 1877 le Premier ministre de Sadok Bey. Il réalisera à ce titre plusieurs réformes majeures dont la fondation du collège Sadiki, en 1875.
Khereddine quittera définitivement la Tunisie en 1877 et mourra le 30 janvier 1890 à Istanbul.
Le portrait du roi Guillaume
Mars 1863. Un navire de guerre néerlandais fait son entrée au port de La Goulette. Il transporte une œuvre d'art, un tableau représentant le roi GuillaumeII.
Ce portrait du roi est un présent au bey de Tunis. En effet, lors de son voyage à La Haye, le ministre Khereddine avait sollicité l'envoi de ce portrait. Et presque deux années plus tard, c'était chose faite.
Arrivé à Tunis, le portrait de Guillaume II sera remis au bey puis exposé parmi les tableaux représentant les souverains des pays amis.
Par l'imagination, je reconstitue l'arrivée du tableau à La Goulette. Je revois Henri Nijssen, alors consul, recevoir l'œuvre d'art des mains d'un officier néerlandais. J'imagine la diligence avec laquelle l'œuvre rejoindra Tunis, les soins dont elle sera entourée avant d'être remise au bey.
Le ministre Khereddine en fût-il informé en premier ? Le bey a-t-il reçu le tableau en personne ? Et que savons-nous de l'œuvre elle-même ? Qui en était l'auteur, quel en était le format ?
Tout ce que je sais de ce portrait, c'est qu'il est de grandeur nature, bien fini et fort ressemblant.
Je me lance à la recherche de cette œuvre qui devrait se trouver au musée d'art, non loin du Bardo. A peine entré dans la réserve du musée, je me trouve nez-à-nez avec un portrait lumineux de Louis II de Bavière, cadeau officiel au bey Mohamed Sadok.
Un peu plus loin, je m'attarde sur un portrait de George Washington offert au même Sadok Bey en 1865 et ramené en Tunisie par l'ambassade extraordinaire qui s'était rendue à Philadelphie la même année, au cours du mandat du président Johnson.
D'autres tableaux, autant de portraits de princes, de présidents et de souverains. Et nulle trace du portrait de Guillaume II.
Un doute m'assaille : ne s'agirait-il pas plutôt de Guillaume III, monté sur le trône en 1849 ? Ma documentation serait-elle en contradiction avec ma chronologie ?
Le doute persiste, s'amplifie même. Je cherche désespérément à retrouver la trace de ce tableau qui semble évanoui, énigmatique, envolé. Retrouverais-je jamais le portrait perdu du roi Guillaume...
Les recherches
de Gérard van Krieken
L'une des œuvres majeures de Gérard van Krieken, universitaire des Pays-Bas, réside en une magistrale étude consacrée au réformateur tunisien Khereddine.
Intitulé Khayr Al Din et la Tunisie (1850-1881), ce livre est paru en 1976 aux éditions E.J. Brill, à Leyde.
Pour réaliser ce travail, Gérard van Krieken a séjourné en Tunisie afin d'y consulter les archives générales du gouvernement tunisien qui étaient à l'époque, conservées à Dar El Bey, sous la direction de Moncef Dellagi.
Soutenu par l'organisation néerlandaise pour le développement de la recherche scientifique (ZWO), Gérard van Krieken a également eu accès à la documentation personnelle de Mohammed-Salah Mzali, un des spécialistes tunisiens de Khereddine.
L'ouvrage a le mérite de la clarté et permet d'aborder dans le détail une période historique que le grand réformateur a marqué de son sceau. En outre, ce livre est sous-tendu par une réflexion autour des enjeux de la modernisation tels que vécus par un penseur musulman au dix-neuvième siècle.
Devenu une incontournable référence, ce livre fait ainsi partie des rares ouvrages consacrés par des Néerlandais à l'histoire de la Tunisie. Au-delà des descriptions et récits de voyage des siècles antérieurs, cette œuvre qui allie la rigueur du scientifique et une véritable passion pour Khereddine constitue une balise pour les historiens et les chercheurs en sciences sociales.
Structuré en six chapitres, Khayr Al Din et la Tunisie (1850-1881) revient d'abord sur les débuts du jeune réformateur. Sur fond de Pacte fondamental et de modernisation du pays entreprise par Ahmed Bey, Khereddine fait ses premières armes dans la carrière militaire puis devient ministre de la marine.
La carrière du réformateur est lancée. On suit alors le rôle qui fut celui de Khereddine dans une seconde partie qui détaille ses missions, les principales réformes, leur échec et l'éclatement de l'insurrection de 1864.
La charnière du livre de Gérard van Krieken est ensuite consacrée à une lecture critique du livre essentiel de Khereddine. Tous les aspects de La plus sûre direction pour connaitre l'état des nations sont analysés.
Le chercheur néerlandais a ainsi consulté le manuscrit de l'œuvre de Khereddine à la Bibliothèque nationale de Tunisie. Il nous apprend que l'auteur acheva son ouvrage le 10 septembre 1867 et qu'il le présenta au bey pour obtenir l'autorisation de l'imprimer.
Cette permission lui parvint le 14 janvier 1868 et le livre fut alors imprimé par l'imprimerie nationale. Plusieurs fascicules paraîtront jusqu'au 18 août 1868 et formeront l'édition originale. Il est à noter qu'une traduction française et une autre turque seront rapidement publiées.
Gérard van Krieken détaille ensuite les articulations du livre de Khereddine : une longue introduction, une première partie où sont étudiés les Etats européens et une seconde partie élargissant son analyse au monde entier.
Dans les parties suivantes, Gérard van Krieken s'intéresse au retour de Khereddine et la chute de Mustapha Khaznadar. Le ministère de Khereddine entre 1873 et 1877 ainsi que sa volonté de réforme sont ensuite analysés.
Enfin, la dernière partie de l'ouvrage s'intéresse à un Khereddine vieilli. Nous le découvrons durant sa dernière année en Tunisie, de retour à Istanbul et vivant ses dernières heures dans la métropole ottomane.
Livre précieux, Khayr Al Din et la Tunisie (1850-1881) est une autre de ces références néerlandaises à propos de la Tunisie. Cet ouvrage, nous le devons à celui qui est également le meilleur spécialiste des relations diplomatiques et consulaires entre Tunis et La Haye.
H.B


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