Le Temps-Agences - La secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice, lors d'une visite surprise à Bagdad, a salué hier les progrès enregistrés par le pouvoir irakien en terme de réconciliation, au lendemain d'une menace de "guerre ouverte" du chef chiite antiaméricain Moqdata Sadr. Mme Rice a effectué cette étape en Irak alors qu'elle était en route pour assister à une conférence internationale au Koweït, où elle doit exhorter les voisins arabes sunnites de l'Irak à soutenir le gouvernement chiite de Bagdad. Les Etats-Unis voient dans une mobilisation arabe plus forte en faveur de l'Irak --notamment de la part de l'Arabie Saoudite--, un contrepoids efficace à l'influence de l'Iran, qui s'est développée après la chute du régime de Saddam Hussein, en avril 2003. Lors d'une étape en Irlande sur le chemin du Moyen-Orient, Mme Rice a ainsi appelé les pays arabes à faire face à "leurs obligations" à l'égard de l'Irak, et les a notamment pressés de rouvrir leurs ambassades à Bagdad. Cette étape irakienne est intervenue alors que le chef radical Moqtada Sadr a menacé samedi de déclencher un soulèvement de ses partisans, si les attaques des troupes irakiennes et américaines contre son mouvement se poursuivaient. Le commandement américain en Irak a répondu qu'il était en mesure de parer à une offensive de la milice sadriste, l'armée du Mahdi, qui compte quelques 60.000 combattants. Dans le quartier de Sadr City, bastion de l'armée du Mahdi encerclé par les troupes irakiennes et américaines, les violences ont fait 15 morts depuis samedi soir. A la suite de l'appel de Moqtada Sadr à la révolte, les mosquées de ce vaste quartier déshérité du nord-est de la capitale ont exhorté à chasser les Américains. Selon des habitants, les hauts-parleurs des mosquées utilisés pour l'appel à la prière ont lancé dans la nuit de samedi à dimanche: "Combattez l'occupant, chassez-le de vos maisons". "Nous voulons que le siège de Sadr City soit levé", ont encore réclamé les appels nocturnes diffusés par des sadristes. Depuis des jours, des affrontements intermittents opposent les troupes irakiennes et américaines aux miliciens chiites dans Sadr City, qui abrite plus de deux millions d'habitants. Les combats, qui ont recommencé dans ce secteur le 6 avril, ont fait au moins 125 tués et des dizaines de blessés, en majorité des civils. La secrétaire d'Etat américaine a elle commencé sa visite par une rencontre avec le Premier ministre Nouri al-Maliki, et a rencontré par la suite le président Jalal Talabani. Au préalable, elle avait salué M. Maliki en estimant qu'il y avait "une consolidation du centre dans la politique irakienne" propre à rassurer les pays arabes sunnites sur les intentions d'un gouvernement dominé par des chiites. "Jamais les sunnites, les responsables kurdes, et ceux des chiites qui n'ont pas de lien avec les +groupes spéciaux+ n'ont aussi bien travaillé ensemble", avait-elle assuré. Les responsables américains désignent par "groupes spéciaux" des extrémistes chiites que Washington accuse d'être financés, équipés, et entraînés en Iran pour mener des opérations antiaméricaines en Irak. Les Etats-Unis ont fait de la réconciliation entre les différentes factions irakiennes une condition impérative de la stabilisation en matière de sécurité, susceptible de justifier une réduction de leur contingent prévue avant juillet. M. Maliki a assuré, avant d'entamer des discussions avec Mme Rice, que la "sécurité s'était améliorée", en dépit de la menace lancée par Moqtada Sadr. Interrogée sur la menace de Sadr, Mme Rice a estimé qu'il était difficile de comprendre "ses motivations et ses intentions". Mme Rice doit également rencontrer des employés de l'ambassade américaine, dans la "zone verte", l'enclave fortifiée au centre de Bagdad, qui a été visée récemment par des volées de roquettes, tirées par des miliciens chiites. La conférence sur la stabilité en Irak à laquelle elle doit participer réunira demain des pays voisins de l'Irak et les grandes puissances.