*Est-ce que vous aimeriez autant ma gueule si j'étais séropositif » Jhonny Halliday L'Association tunisienne de lutte contre les MST et le Sida a organisé un concert Dimanche au centre culturel et sportif d'El Menzah, assuré par des groupes de la nouvelle scène tunisienne. C'est la première fois que l'A.T.L. commémore le 25ème anniversaire de l'International AIDS Candlelight Memorial , un programme lancé en 1983 par Global Health Council. Sans conférences scientifiques ni exposés soporifiques, la sensibilisation passe par la réunion autour de la musique : Slam Alikom, Gultrah Sound System, les Garby's et H.I.V. Ensemble, luttons par la musique et les mots. L'A.T.L. nous a habitués à sa campagne de sensibilisation avec ses affiches, ses bénévoles qui vont à la chasse des jeunes pour leur distribuer des brochures d'information et des préservatifs, dans plusieurs manifestations culturelles, telles que le festival de jazz à Tabarka ou simplement des concerts de rock à Tunis. L'A.T.L. met les bouchons doubles en général lors de la journée Mondiale de Lutte contre le Sida avec une méga campagne, mais cette commémoration est une première en Tunisie. Le choix de l'activité culturelle est selon Thameur Mekki, organisateur et membre actif de l'A.T.L., « pour s'éloigner du discours scientifique qui n'intéresse pas forcément les jeunes, nous visons principalement les jeunes donc nous avons opté pour un concert avec des groupes tunisiens de genres diversifiés qui les interpellent avec de la musique rock ou reggae et des textes en dialecte tunisien. Le concert a été décidé seulement 20 jours avant la date et les groupes sont tous bénévoles et ont bien voulu participer à cette manifestation et servir cette cause. Le but est de rester le plus près possible des jeunes, les toucher directement avec les affiches, les brochures, et les occasions qui les rassemblent. » Au centre culturel et sportif, les jeunes bénévoles s'activent pour pousser les jeunes à s'y intéresser. Au stand, on distribue des guides et des préservatifs. Des affiches accrochées tout au long des murs représentent les messages des différentes associations de lutte contre le Sida à travers le monde, on pouvait voir Johnny Hallyday avec un message « est-ce que vous aimeriez autant ma gueule si j'étais séropositif ? » ou encore Cauet « ma méthode vous plairait-elle autant si j'étais séropositif ? »...Des affiches mais aussi un concert dont les bénéfices seront au profit de l'association. A 5 dinars, on peut assister aux concerts de Slam Alikom, Gultrah Sound System et les Garby's. Parmi le public, sont présents des séropositifs notamment « Jo », un séropositif médiatisé par une émission téléréalité de Hannibal T.V. Au pied de la scène, des bougies sont allumées, derrière les artistes, sur des vidéos projections défilent les noms des victimes du Sida.
Nos artistes ont du talent
Le concert a été inauguré par Slam Alikom , comme le jeu de mots l'indique, est un groupe de slam tunisien qui a déjà présenté son travail dans le cadre de la contre rencontre d'art contemporain à El Teatro. Les textes en rimes utilisent des mots en français familier ou soutenu, en arabe littéraire ou en dialecte tunisien et les mélodies sont souvent empruntées à des airs connus. Le slameur est entouré d'un guitariste, un percussionniste et un pianiste qui font l'instrumentale qui accompagne les mots. Au début, quand Hatem Karoui, commence à réciter ses lyrics, on se demande ( pour paraphraser Grand Corps Malade) « c'est qui ce mec chelou qui vient pour raconter sa vie » et théâtralise sa performance . Mais l'humour et l'audace de l'artiste finissent par convaincre, les thèmes passionnants et les jeux de mots sont subtils. Le mal être, l'amour du pays, le conflit des civilisations, la religion, le fantasme, l'addiction à la cigarette, des sujets qui habitent l'Homme et font son quotidien. Le slameur est mi-conteur mi-poète, il choisit les mots qui font mal et les mots qui font rire pour raconter une petite histoire ou une grande, une histoire où le verbe et l'image sont en harmonie, où les mots distillent la passion, l'ironie ou le sarcasme. A l'aise sur scène et complice avec ses musiciens, l'auteur se permet de répondre aux commentaires du public et en rire...Les textes en tunisien ou en français sont inspirés, même si parfois on sent un manque de recherche dans le choix des mots. En tout cas, le public jeune et moins jeune a beaucoup apprécié. Après le slam enflammé, ambiance cool et détendue avec du reggae façon Gultrah Sound System, un groupe de jeunes tunisiens. Sur des textes en dialecte tunisien, de la musique mêlant de multiples influences : dub, roots, rythmes orientaux...son qui rappelle the Herbaliser, textes engagés, chanteuse style Erikah Badu, on est en plein reggae world. Ils ont le style, la présence et le public a suivi. La suite avec les garby's, toujours avec du soft rock avec quelques touches pop, H.I.V. au son metal. Cette rencontre a été donc dédiée à la sensibilisation de jeunes et à la commémoration de l'anniversaire du CandleLight Memorial, mais elle montre aussi que nos artistes ont du talent et doivent avoir l'opportunité de quitter la scène alternative pour se mettre au devant. Thameur Mekki, pour un dernier mot souhaite « que l'expérience soit renouvelée et que la sensibilisation se fasse tout au long de l'année et pourquoi pas un concert trimestriel dédié à la cause. Nous souhaitons avoir plus d'appui de la part des sponsors, des médias et des groupes. Cette année, , l'A.T.L. a fait l'effort de prévoir des bénévoles pour le service communication ( Hana Ben Fadhl et Thameur Mekki) parce que sans cela, les médias ne couvrent pas. D'ailleurs je trouve regrettable que les associations comme l'association des journalistes tunisiens prévoient des galas avec des artistes comme Fatma Bou Saha ou des chanteurs libanais qui n'apportent rien pour nos jeunes et délaissent des jeunes artistes de la nouvelle génération. Il y a beaucoup à faire à ce niveau. » Toutefois, il ne faut pas perdre de vue le but principal de cette action, transmettre un message dont les jeunes promettent de se souvenir « protégez-vous ! ». Une promesse qu'il faut absolument tenir.