Place de la Monnaie : le bâtiment qui fait le coin sous l'arbre servait de bureau pour les abonnements et autres tarifications particulières pour le transport public, il y a un bon moment déjà. Les guichets sont encore là, les tuiles vertes d'époque, intactes malgré des décades de pluie et d'impuretés de toutes sortes, les fenêtres sont complètement aveugles côté rue, les grilles en fer forgé intégrées dans l'enduit d'un côté, une autre fenêtre béante, vitres brisées, laisse voir l'intérieur saccagé et vandalisé, un reste escalier tient toujours debout. Deux portes énormes, blindées, cadenassées, donnent directement rue de Rome, soustraits aux regards par un étal. Des marchands de pacotille squattent l'espace libre des coins de rues.. Bientôt propriétaires de lieux peut-être..... D'après les voisins, cette bâtisse « abandonnée », appartient pour moitié à la SNT , qu'on ne voit plus dans le coin, et l'autre moitié à la STEG, qui y entretient un important transformateur, appelé « GaribEldi », parce qu'entre les deux immeubles d'en face, il y a un passage du nom du fameux Garibaldi, l'unificateur italien, transformé en «GaribEldi » , c'est plus local !!!! Les deux arbres plus que centenaires, des monuments historiques, une envergure peu commune, gigantesque même, rarement atteinte sous nos climats, par aucune autre espèce, couvrent à eux seuls l'ensemble de la Place , ils vont même ombrager les balcons du premier étage des immeubles début du siècle.... Les branches supérieures dépassent même les toitures environnantes. Ils s'étendent jusqu'à la rue de Rome d'un côté et couvrent une partie de la rue Hara Sghira. La Place de la Monnaie est, dans sa totalité, toujours protégée du soleil, une ombre de quiétude. De somptueuses touffes de racines pendent en grappes compactes des branches qui avancent parallèlement à la surface du sol. Des chevelures rousses, sauvages, à la recherche d'humidité. Elles enlacent les troncs parfois, dans un mouvement d'une infinie beauté Mais ces troncs gigantesques servent de vespasiennes aux poivrots nocturnes et autres « citoyens pressés » de jour. Des cercles concentriques de déchets les entourent. Un spectacle peu digne, le matin : en plus des dizaines de sachets toutes couleurs, bien emmaillotés qu'on balance vite fait du haut des balcons, ou en allant chercher un paquet de cigarettes, des restes de nourriture de toute origine colorent les alentours, et des cadavres de bouteilles vides, de canettes, jonchent le sol. L'odeur et les odeurs. Des restes de moisissures et des relents de vomissures vinaigrées. Une vidange sauvage, toute fraîche, vient en dernier lieu mettre une touche d'huile noire, brûlée, à tout ce spectacle. La plus ignoble des mini décharges, là juste devant le Ministère du Développement Economique..... Ces dames et ces messieurs y garent leurs voitures pourtant, et même une plaque indique que l'emplacement leur est strictement réservé...!!!!! Préservation du Patrimoine, dites-vous ?? J'ai dû mal entendre !!!! Pourtant, quoi de plus simple que de rêver : une solide palissade en fer forgé, à l'ancienne, quelques bancs publics, en vieux bois et fonte, une personne chargée de l'entretien, et la Place changerait d'apparence. On y verrait des retraités somnoler, entre dix et douze, le petit couffin entre les jambes, une sorte d'avance sur sieste, ou lire leurs journaux, faire des mots croisés, remplir des grilles de sudoku, jouer aux échecs ou au jacquet, des couples se dire des choses de la vie, en attendant mieux, et de doux rêveurs imaginer que c'est vraiment possible.