Le Temps-Agences - L'accord conclu par le Hamas et le Fatah palestiniens pour la formation d'un gouvernement d'union risque de ne pas satisfaire les Etats-Unis et Israël mais pourrait fournir l'occasion aux pays arabes et à certains Etats européens d'assouplir leur blocus économique. Signé à La Mecque, cet accord met en position inconfortable Américains et Israéliens, qui se sont engagés à renforcer le président palestinien Mahmoud Abbas dans sa lutte pour le pouvoir avec un Hamas qui rejette l'Etat d'Israël. Washington n'a guère d'autre choix qu'Abbas - leader modéré qui souhaite résoudre le conflit israélo-palestinien par la coexistence de deux Etats. Les Américains peuvent aussi difficilement se permettre un différend avec l'Arabie saoudite et leurs autres alliés arabes au moment où leur soutien leur est nécessaire pour contrer le programme nucléaire de l'Iran et endiguer les violences en Irak. Selon un responsable du Fatah, Soufian Abou Zaida, l'accord a pour but de mettre fin aux affrontements qui font rage depuis des mois entre factions, plus que de répondre aux trois conditions fixées par le "quartet" des médiateurs sur le Proche-Orient pour la levée du blocus économique. "Ils (les Palestiniens) ne pensaient pas à Condoleezza Rice, (au président George) Bush, à Israël, aux Américains, au quartet (...) Ils cherchaient avant tout le moyen d'éviter les effusions de sang", a-t-il déclaré à Radio-Israël. Les ministres des Affaires étrangères des 27 se réunissent lundi et devraient prendre acte de l'accord dans cet esprit, mais des diplomates jugent qu'il est trop tôt pour un déblocage éventuel de l'aide directe au gouvernement palestinien. Selon des diplomates occidentaux, l'Arabie saoudite et d'autres alliés régionaux des Etats-Unis fourniront l'essentiel de l'aide financière destinée au gouvernement d'union, ouvrant ainsi la voie au versement de salaires pleins pour la première fois depuis l'arrivée du Hamas au pouvoir en mars dernier. Des diplomates européens en poste au Proche-Orient s'attendent à ce que certains Etats de l'UE reprennent des contacts diplomatiques en guise de première initiative, les promesses d'aide devant être étudiées plus tard. Reste à voir si Washington tentera d'empêcher d'autres pays d'assouplir l'embargo, qui a placé l'Autorité palestinienne au bord de la banqueroute sans faire pour autant tomber le Hamas. Des diplomates américains ont informé leurs homologues israéliens que Washington s'opposait à tout gouvernement dirigé par un membre du Hamas. L'accord de La Mecque reconduit dans ses fonctions le Premier ministre Ismaïl Haniyeh, issu du Hamas. Le mouvement islamiste a réaffirmé en outre qu'il ne reconnaîtrait jamais Israël, l'une des conditions de la reprise de l'aide internationale. Et l'accord engage seulement le nouveau gouvernement à "respecter" les accords de paix passés, non de les accepter comme le veulent Washington et Israël. Si l'injection de fonds saoudiens peut aider l'économie palestinienne à redémarrer, l'absence de soutien américain et israélien empêcherait le gouvernement palestinien de surmonter ses problèmes économiques à court terme, notent des diplomates. Israël confisque des recettes fiscales palestiniennes depuis près d'un an et a indiqué avant-hier qu'il ne cesserait que si le nouveau gouvernement renonçait sans ambiguïté à la violence, reconnaissait Israël et acceptait les accords intérimaires de paix - les trois conditions du quartet. On ignore si les banques internationales et régionales rétabliraient les virements de fonds au gouvernement palestinien sans l'aval explicite de Washington, déclarent des diplomates. "Abou Mazen (Abbas) a totalement échoué et a donné une victoire de taille au Hamas", a dit Tzachi Hanegbi, président de la commission des affaires étrangères de la Knesset, à Radio Israël. "Par conséquent, les chances d'une initiative efficace et d'un accord entre Israël et les Palestiniens ont reculé." Aux yeux de ces Israéliens, l'accord de La Mecque compromet les résultats du sommet tripartite prévu le 19 février entre Abbas, le Premier ministre israélien Ehud Olmert et la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice.