La Tunisie exprime sa solidarité avec les luttes du peuple palestinien    Bank ABC sponsor de la paire Padel Hommes    Nuit d'Affrontements entre des migrants subsahariens : Situation Calmée à Sfax    Un taux de chômage de 31,2 % chez les diplômées de l'enseignement supérieur    La Fifa envisage des matches de championnat à l'étranger    Assurance vie : Assurances Hayett affiche un rendement en hausse pour ses clients en 2023    Non, il n'y a toujours pas d'augmentation des prix des tombes    Un mail du procureur de la République de Versailles ? Gare à cet hameçonnage    France : L'imam tunisien expulsé était propriétaire d'une entreprise de construction, ses clients se retournent contre l'Etat    Accès gratuit aux musées et sites historiques à l'occasion de la Journée internationale des musées    Sousse : 8 mois de prison à l'encontre de 50 migrants subsahariens    Kef: Des blessés dans une collision entre un louage et une voiture    Coupe de Tunisie : Les arbitres des huitièmes de finale    Hajj 2024 : le Groupe Saudia annonce le plan de la saison du Hajj    Gaza : Tsahal admet avoir tué ses propres soldats, la 3e bourde depuis le 7 octobre    15 pays de l'UE veulent suivre le Royaume-Uni et le Rwanda : Renvoyer tous les migrants en Tunisie et ailleurs    100 dossiers de recours approuvés pour les enseignants suppléants    DECES ET FARK : Naceur BELTAIEF    Gaspillage alimentaire : Un phénomène néfaste qui coûte cher    76e anniversaire de la Nakba : La Tunisie célèbre la résistance du peuple palestinien    En guise d'un sixième blanc : Nos élèves, aujourd'hui, à l'épreuve    INS: Le taux de chômage en Tunisie en baisse    Daily brief national du 16 mai 2024: Fermeté présidentielle face à l'ingérence dans les affaires internes    En bref    Wafa Ghorbel, lauréate du prix spécial du jury au Comar d'Or, à La Presse : «Mon roman libère la parole des laissés-pour-compte de la société»    Abdallah Laabidi : la Tunisie vit dans l'isolement depuis des années    Que dit la sourate prononcée par Kaïs Saïed pour épingler des pays et des organismes étrangers ?    L'ES Métlaoui battue en déplacement : Le doute qui s'installe !    Le CAB affronte Sakiet Eddayer en Coupe : Les espoirs reposent sur le cru !    Ligue des champions – L'EST prépare la finale devant Al Ahly (Ce samedi à Radès – 20h00) : Rééditer le scénario de Mamelodi Sundowns !    Affrontements entre les supporters de l'EST et la police    Kais Saied examine la loi bancaire équilibres financiers avec la ministre des finances    Météo : Temps partiellement nuageux sur la plupart des régions    Baisse de la production nationale de pétrole brut et gaz au premier trimestre    Les banques à l'ère de l'ESG : Un tournant stratégique et responsable    Premier trimestre 2024 : l'économie tunisienne enregistre une croissance de 0,2%    Kais Saied : Priorité à l'harmonisation du travail gouvernemental    Kais Saied affirme l'égalité de tous devant la loi    Nakba 1948, Nakba 2024 : Amnesty International dénonce la répétition de l'histoire    Wataniya : La boulette de dimanche coûtera cher, la Direction tient les coupables    Urgent : Une secousse sismique secoue le sud-ouest de la Tunisie    Le roi Charles III dévoile son premier portrait officiel    Carthago Delenda Est : la locution imprimée sur le T-shirt de Zuckerberg qui a offensé les Tunisiens    Festival de Carthage: Les préparatifs avancent à grands pas    Mark Zuckerberg : Carthage doit être détruite !    Tunisie: Le t-shirt de Mark Zuckerberg enflamme les réseaux sociaux    À la Galerie Selma-Feriani : Image, récit et représentation    Abdelaziz Kacem: De «Genocide Joe» à Meyer Habib, dit «Le Phacochère»    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



A chacun sa fête : Jouer à la poupée et jouer à la guerre
SCENES DU QUOTIDIEN
Publié dans Le Temps le 29 - 09 - 2008

La ville de Tunis vit des moments particuliers depuis début Ramadan : rues, ruelles, placettes, sont fébriles du matin à l'heure de la rupture du jeûne. Le soir, tout se réanime de nouveau jusqu'à l'aube. Une activité incessante, une foule compacte déambule à la recherche d'objets utiles ou fonctionnels, à petits prix, bien en vue.
Ainsi les étals de la rue Sidi Boumendil se répandent sur les environs et imperceptiblement comme une eau silencieuse, occupent les trottoirs et même les chaussées. Durant un mois, les rues Al Jazira, Abdennasser, toute la rue d'Espagne, la rue Charles De Gaulle, les arcades de l'avenue de France, sont envahies. L'avant-garde arrive rue de Grèce, derrière le Palmarium. Chaque centimètre carré est pris, on squatte même les capots des voitures en stationnement.
Les commerçants des lieux, payant patente, taxes et impôts voient leur espace vital se réduire, et leurs clients n'arrivant pas jusqu'à eux. La circulation, en voiture est quasi impossible, à cause des cartons et bâches étalés à même le sol. Et la foule partout, un conglomérat, qui s'agglutine autour de chaque étal pour regarder, toucher, palper ce qu'on lui propose ainsi.
C'est une manne pour les sans emplois dont la moyenne d'âge est de vingt-cinq ans, avec une forte présence d'ados. C'est également une porte de sortie pour les petits budgets qui peuvent s'approvisionner à des prix très abordables.
Il y a de tout : petits outils de bricolage, objets utiles, ustensiles de cuisine, chaussures, espadrilles, vêtements toutes catégories. Les marchandises proposées sont en fonction du moment, de l'opportunité, de la saison. Parapluies et impers en hiver, maillots de bains, jeux de plage, parasols, en juin-juillet. Verres à eau, brocs, théières, serviettes, couteaux de cuisine pour Ramadan, toute la panoplie scolaire pour la rentrée. Et maintenant, le grand déballage de l'Aïd.
Première constatation : la séparation des sexes, par le jeu, est plus que jamais imposée : poupée pour les filles, matériel de guerre pour les garçons. Où sont les théories sur le développement équivalent ?? La fameuse poupée « Barby » est là pour séduire les petites filles. Son image est partout, y compris sur les cartables des écolières ou les sacoches des fillettes des maternelles. Image omniprésente, obsédante, elle s'affiche avec des habits ultra mode, avec coiffure et accessoires : bijoux, sac à main, chaussures, produits de maquillage même ! D'ailleurs, elle a fini par perdre son statut de poupée pour devenir une sorte de mannequin, une star à laquelle des milliers de fillettes aimeraient ressembler : un modèle, celle de la femme virtuelle, mais femme-objet à qui il faut s'identifier.
Une nouvelle image de cette « Barby » fait son apparition : celle de la « Barby » qui porte le foulard, très maquillée quand même, un rouge à lèvres aux teintes criardes. L'industrie du jouet prend tout train en marche pour faire des profits. Ici, elle épouse des idéologies pernicieuses qui font des femmes un enjeu politico-religieux. On se focalise sur le corps de la femme, sur le foulard pour occulter les problèmes réels. Là aussi, l'identification à ce modèle soit-disant « religieux » est pernicieux, et l'objectif en est le paraître avant tout !! Allez parler à ces jeunettes de la liberté de la femme, d'indépendance, d'égalité des sexes, de valeurs citoyennes !! Mais les parents sont plus que complices, ils sont un peu les initiateurs impuissants.

Formater les esprits
Le second constat est plus qu'alarmant lui aussi, quand on voit la quantité de jouets de guerre imposés à la vue des garçons. La liste est faramineuse : tank simple, blindé amphibie équipé de missiles sol-sol, porte-hélicoptères tous terrains, commandos en treillis de combat qui rampent en lézards, hélicos type Puma, Frelon, Chinnok, armés de lance-roquettes, avions de chasse Mig, Mirage, bombardiers, awaks, des copies exactes en miniatures de navires porteurs d'hélicos, des petits cuirassés, des pistolets, des fusils, des mitrailleuses avec viseur de nuit, et suprême trouvaille, un gros calibre avec laser intégré, lunette de visée, et sur la pochette, il est dit d'éviter de viser le visage et les yeux,en anglais !! En plus de toute la panoplie de la guerre des étoiles, armes bizarres, fluo, clinquantes, produisant des sons horriblement dérangeants.
La violence et la haine semées à travers ces objets apparemment des jouets inoffensifs, mais on ne mesure pas la portée sur les jeunes enfants. Hormis la dangerosité de ces produits, qui peuvent échapper à des contrôles, ils constituent un véritable piège : celui de faire des enfants des combattants inconscients pour une armée virtuelle, certes, mais qu'on voit bien présente, active, dominante, à travers la télévision, sur de vrais terrains avec le même matériel !!.
On incite, de façon très perverse, les enfants à s'identifier non à un modèle comme celui des combattants pour la liberté tels que les Palestiniens ou autres, mais aux GI's, aux soldats des grandes puissances, considérés comme des héros luttant contre le mal, là où il se trouve.
Là aussi, l'enfant est formaté, modelé pour se comporter en adulte violent, en imitant la guerre barbare des adultes. Certes, les garçons ont toujours joué au gendarme et au voleur, avec des soldats de plomb, mais les enjeux n'étaient pas de créer une identification destructrice.
Ces produits de bas de gamme, fragiles, d'une durée de vie éphémère, sont proposés à des couches sociales ayant peu de moyens. Les autres, les enfants des familles aisées, manipulent, dès la première enfance, des jouets qui les plongent dans la vie contemporaine : consoles, ordinateurs miniature, utilisation de claviers, proximité de tous les appareils numériques utilisés aujourd'hui. Les jouets plus simples, mais modernes, tels que légos, mécanos et puzzles, qu'on ne voit pas du tout sur ces étals, incitent à la créativité.
Les enfants clients de ces étals de jouets à très bon marché sont, ainsi, doublement lésés : tout en n'ayant pas accès aux outils informatiques par manque de moyens, ils jouent aux petits soldats d'une armée invisible.
Les joujoux des pauvres, c'est de fabriquer des ballons avec des chiffons, de jouer aux billes, à la toupie, ce qui favorise l'habileté manuelle. Ils ont une fonction fondamentale : sociabiliser l'enfant, l'intégrer dans la communauté, tisser des liens, communiquer avec l'autre, partager. L'enfant découvre son environnement réel, social, il apprend à synchroniser geste et pensée. Le plaisir et le rêve en plus, avec le rire et des étoiles plein les yeux.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.