Le Premier ministre, M. Mohamed Ghanouchi, n'a pas manqué d'évoquer hier lors de son allocution d'ouverture de la Conférence Nationale sur l'Emploi les difficultés rencontrées par le gouvernement pour faire face à la problématique du chômage, notamment celui des diplômés. Toutefois, il a relevé que « ceci n'a pas empêché de ramener le taux de chômage de 15,6 % à 14,1 % ce qui constitue une performance ». A l'occasion, M. Ghannouchi a brossé un tableau complet du paysage socioéconomique tunisien caractérisé par des contrastes dans les chiffres : un taux de croissance démographique de 1 %, un taux de croissance de la population active de 2,4 %, une demande additionnelle annuelle de 88.000 postes d'emploi dont 55 % sont des diplômés du supérieur, 37 % de la population dans la tranche d'âge 20-24 ans sont des étudiants, un taux de croissance économique de 5,7 %, etc... Le Premier ministre a expliqué que ces chiffres indiquent que la population est jeune et que l'emploi est la priorité principale du pays : « il n'y a pas de raison pour qu'on ne réalise pas la même performance que l'Irlande qui a ramené en vingt ans son taux de chômage de 16 % à 5 %. », souligne-t-il. M. Ghannouchi a affirmé que le gouvernement est conscient des conditions objectives nécessaires pour relever le défi de l'absorption du chômage : « la création de l'emploi ne peut être qu'une résultante de la croissance économique et la Tunisie est appelée à atteindre un taux de croissance de 7 % pour lutter efficacement contre le chômage. En plus, il serait souhaitable que l'investissement atteigne 28 % du PIB et que l'investissement étranger dépasse son seuil actuel de 5,5 % du PIB » Le Premier ministre a appelé à renforcer l'épargne nationale pour créer une synergie entre le présent et l'avenir. Il a également fait part de la nécessité de prôner la qualité dans la formation universitaire pour que les compétences tunisiennes puissent s'imposer à l'échelle internationale « le nombre d'ingénieurs formés est actuellement de 4000 par an et il est appelé à doubler durant les cinq prochaines années pour pouvoir améliorer l'encadrement dans les entreprises tunisiennes » Le Premier ministre n'a pas manqué de rappeler de l'impact éventuel de la crise économique internationale sur la Tunisie notamment en matière d'Investissements Directs Etrangers. « La Tunisie doit faire preuve de performance pour pouvoir défendre ses marchés vis-à-vis des concurrents ». Il a conclu en précisant que l'emploi est une priorité nationale et que toutes les composantes de la société sont appelées à œuvrer conjointement pour réussir le défi de combattre le chômage. Avant le discours du Premier ministre, M. Moncer Rouissi, le président de la commission de la consultation nationale sur l'emploi a présenté le programme de la conférence nationale sur l'emploi en passant en revue les étapes ayant précédé sa tenue. Suite à l'allocution du Premier ministre, les premiers responsables des partis politiques et des organisations nationales ont pris la parole pour présenter les points de vue des organisations qu'ils représentent à propos de l'emploi.
Objectif unique ... Moyens différents Le Secrétaire Général du Rassemblement Constitutionnel Démocratique, M. Mohamed Ghariani, a insisté sur le devoir de maîtriser le chômage et de garantir l'équilibre régional grâce à une mobilisation de tous les potentiels de la société et à l'introduction d'une culture d'emploi à travers de nouveaux mécanismes Le Secrétaire Général de l'Union Générale Tunisienne de Travail, M. Abdessalem Jrad, a précisé que « l'emploi est une question de droit. C'est un pilier de la stabilité sociale et il est déterminant dans la création des richesses. Les réalisations n'empêchent pas de citer le manque de création d'emplois comparativement aux besoins réels de la population... ». M. Jrad a relevé la faible plus-value dans les entreprises et un taux d'encadrement en deça de ce que peut offrir le marché de l'emploi. Il a constaté le manque de respect des réglementations de travail et a souhaité qu'elle se sente a responsable vis-à-vis des différents intervenants et non pas uniquement l'investisseur. M. Jrad a proposé un partenariat dynamique de toutes les composantes de la société (administration, patronat, employés, société civile)... Le SG de l'UGTT a proposé la création d'une assurance pour la réinsertion professionnelle de ceux qui ont perdu inopinément leur travail et a également souligné la nécessité d'accorder plus d'autonomie aux collectivités locales et des ressources financières suffisantes pour qu'elles puissent contribuer au développement local. M. Ismaïl Boulehya, le Secrétaire Général du Mouvement des Démocrates Socialistes, a axé son intervention sur la nécessité d'adopter un nouveau modèle de développement mettant l'emploi et l'équilibre régional comme priorité. M. Boulehya a appelé pour une discrimination positive en faveur des régions défavorisées « la Tunisie souffre différemment : il y a 6 % de chômage à Monastir et 21 % à Zaghouan ». M. Hédi Djilani, le président de l'Union Tunisienne de l'Industrie et du Commerce, a affirmé que le modèle tunisien est désormais une référence. Il a appelé à promouvoir l'investissement et à accélérer la croissance pour créer l'emploi : « Renforcer l'entreprise et encourager l'investissement ... Le capital s'installe là où il se sent bien entouré ... Pas d'investissement sans des garanties pour l'investisseur ...La recherche de nouvelles opportunités d'investissement ...L'offre d'emploi ne peut pas absorber toute la demande additionnelle. Il faut promouvoir une nouvelle culture de l'initiative propre ». Le président de l'UTICA a également averti contre les dangers provenant du marché parallèle et appelé l'administration à lutter davantage contre ce fléau néfaste à la croissance économique. M. Mohamed Bouchiha, le Secrétaire Général du Parti de l'Unité Populaire, a rappelé le rôle alloué à l'Etat et au secteur public en matière de développement et d'emploi notamment dans les zones défavorisées. Il a affirmé que le secteur public doit rester la référence surtout que le rendement dans le secteur privé n'a pas été à la hauteur des sacrifices consentis par le contribuable. Il a également appelé à améliorer la synergie entre la formation et le marché du travail à travers des programmes ciblés permettant d'avoir des diplômés avec un savoir-faire adéquat qui peut contribuer à améliorer le rendement de l'entreprise tunisienne. M. Ahmed Brahim, le Secrétaire Général du Parti Ettajdid, a appelé à une refonte du système de formation pour améliorer la capacité des diplômés. Il a mis en garde contre la contagion de la dérive connue actuellement par les pays capitalistes consistant en la socialisation des pertes après la privatisation des profits. La Conférence nationale sur l'emploi se poursuit avec d'autres interventions et des conférences en rapport avec cette problématique cruciale pour le développement économique et social de la Tunisie. ------------------------------- Les à côtés : Une longue séance d'ouverture La séance d'ouverture de la Conférence Nationale sur l'Emploi a été riche d'interventions. L'introduction de M. Moncer Rouissi et le discours du Premier ministre, M.Mohamed Ghannouchi, ont été suivis par les interventions de tous les premiers responsables des partis politiques et des organisations nationales. Lesquelles interventions se sont allongées en durée et ont largement débordé sur le temps alloué à la séance d'ouverture. Du coup, les organisateurs ont annulé la 2ème séance matinale initialement programmée pour un exposé sur les divers travaux et activités de la consultation nationale. Cet exposé a été le sujet d'un petit point de presse accordé par M. Moncer Rouissi.
Les membres du gouvernement Le Premier ministre a quitté la salle suite à son allocution. A part M. Slim Tlatli, ministre de l'Emploi, tous les membres du gouvernement, présents, ont quitté eux aussi la salle. Ce qui a fait dire à un Secrétaire Général d'un parti de l'opposition que les ministres auraient dû être là pour écouter les commentaires concernant leur programme national de l'emploi.
Salle à moitié vide La salle de conférence a été pratiquement à moitié vide suite à la fin du discours du Premier ministre. Une bonne partie des assistants a occupé le hall de l'hôtel malgré l'importance du sujet.
Dossier de presse Si des copies de l'intervention de M. Moncer Rouissi, président du comité de la Consultation Nationale sur l'Emploi et de M. Abdessalem Jrad, Secrétaire Général de l'Union Générale Tunisienne de Travail, ont été remises à la presse, les journalistes se sont limités à prendre note des autres interventions.
Absence de tribune de presse Malgré le nombre important de journalistes invités et présents, les organisateurs n'ont pas prévu de tribune pour la presse lors de la séance inaugurale. Les collègues ont dû travailler avec les moyens de bord.