Avoir un bébé ou un enfant en bas âge est source de problèmes surtout pour une femme active. S'occuper de son chérubin tout en se consacrant à son boulot est aujourd'hui une tâche difficile, voire impossible. Si certaines femmes décident de renoncer à leur travail, prendre un congé sans solde ou opter pour le travail à mi-temps afin de se consacrer totalement à leurs enfants, en revanche d'autres sont obligées de recourir à l'une de ces maisons d'accueil pour assurer la garde et l'éducation des leurs. Ainsi, pour des parents qui travaillent, la crèche, le jardin d'enfant ou la garderie représentent la seule solution. Si de telles « maisons d'accueil » existent chez nous en grande quantité pour satisfaire les demandes sans cesse croissante de ces parents en désarroi, la qualité des services et la salubrité des lieux font parfois défaut dans la plupart de ces maisons et ne sont pas à la mesure des espérances des parents. Dans le passé, ces structures d'accueil étaient l'affaire des pouvoirs publics (l'Etat et les collectivités locales) et n'avaient pas de but lucratif ; chaque commune disposait à l'époque de deux ou trois jardins d'enfants suivant le nombre d'habitants. Aujourd'hui que ces structures sont devenues privées, il suffit de remplir les conditions requises par le cahier des charges pour que chacun ayant les moyens puisse ouvrir une boîte privée pour y accueillir des enfants d'âges différents. On y trouve souvent tous les âges dans la même boite : crèche pour bébés, jardin d'enfants pour enfants en âge préscolaire et garderie pour écoliers et collégiens. Et c'est ainsi qu'on voit chaque année de nouveaux locaux de ce genre (trois en un !) ouvrir leurs portes à tel point qu'on peut compter jusqu'à trois ou quatre dans un même quartier si ce n'est dans la même avenue ! Il y a même des gens qui, tentés par le profit, ont transformé leurs habitations en jardins d'enfants ou en garderies. Si ces structures d'accueil existent aujourd'hui en grande quantité, elles le sont moins en qualité ! C'est que le côté mercantile l'emporte souvent sur le côté éducatif dans ces boîtes.
Et pourtant, la réglementation est là ! L'ouverture de ces structures privées est pourtant soumise à une réglementation fixant toutes les conditions à remplir pour pouvoir lancer un tel projet dont les objectifs sont avant tout éducatifs, instructifs et culturels, d'autant plus que le public cible est formé de jeunes enfants qui sont là, non seulement pour être gardés jusqu'au retour de leurs parents, mais plutôt pour apprendre à vivre en collectivité, à s'initier à la vie sociale au savoir-faire et au savoir-vivre. Aussi ces maisons d'accueil doivent-elles répondre à tous les besoins fondamentaux des enfants accueillis, chacun selon son âge et ses exigences. D'ailleurs, le nouveau cahier des charges relatif à la création des jardins d'enfants et des garderies, entré en vigueur il y a environ deux ans, définit toutes les conditions à remplir concernant les locaux, l'infrastructure, les commodités d'hygiène et de sécurité et celles relatives aux qualifications du personnel exerçant dans ces établissements. Un tel secteur qui a connu une grande expansion ces dernières années, quoique soumis à des conditions d'exploitation précises et un contrôle pédagogique et sanitaire permanent, présente souvent des irrégularités et des dysfonctionnements à plusieurs niveaux : l'hygiène, l'encadrement, la pédagogie, la sécurité... En raison de cette ruée des parents sur ces établissements, la qualité des services laisse souvent à désirer.
Personnel non qualifié Certains propriétaires de ces établissements font appel à un personnel non qualifié formé souvent de jeunes filles n'ayant pas poursuivi leurs études ou parfois ayant des diplômes sans rapport avec le monde des jardins d'enfants, donc non formées en matière d'éducation des enfants dans le préscolaire. C'est ce personnel qui assure généralement toutes les activités (jeux, chants, danse, dessin, calcul, écriture...). Dans les crèches, ce sont parfois les femmes de ménage qui sont chargées des soins nécessaires aux bébés. Or, les enfants en bas âge ont besoin de spécialistes en puériculture disposant d'une pédagogie particulière et de méthodes spécifiques capables de stimuler l'éveil de l'enfant, développer ses sens et cultiver son esprit et son intelligence. Dans les garderies réservées aux enfants en âge scolaire (de 6 à 15 ans), la situation est elle-même compromise. Là encore, les enfants supposés être complètement pris en charge par la garderie (accompagnement, repas de midi et goûter, révision des devoirs...) sont souvent livrés à eux-mêmes, se rendant parfois à l'école primaire sans accompagnateur, révisant tout seuls leurs devoirs ; les plus âgés (ceux du collège) trouvent l'occasion de fuguer pour aller se divertir avec leurs camarades, exposés aux dangers de la rue, et ne rejoignent la garderie qu'à l'heure du retour de leurs parents qui viennent les ramener à partir de 18 heures. Ces faits sont confirmés par plusieurs parents interrogés dont Olfa qui a trois enfants dans une garderie, deux garçons au collège et une fille en primaire, n'est pas satisfaite des prestations du personnel de cette garderie : « Des proches ou des voisins viennent me dire qu'ils ont vu mon fils à telle heure et à tel endroit, au moment où il devrait être à la garderie ; et nous, les parents, qui croyons être rassurés sur la sécurité de nos enfants pendant notre absence ! En cas d'accident, qui assumera la responsabilité ? »
Cours particuliers dans les garderies Parmi les autres anomalies constatées dans certaines garderies, c'est le fait que des instituteurs ou des institutrices exerçant dans une école primaire toute proche sont autorisés par le propriétaire de la garderie à donner des cours particuliers aux élèves appartenant à leurs écoles respectives ; alors qu'en principe ces cours doivent être dispensés gratuitement et strictement aux enfants de la garderie. A ce propos, Khaled, élève au collège, nous a signalé la présence de ces cours particuliers dans la garderie où il est inscrit : « Il y a des élèves de l'école primaire d'à côté qui viennent prendre des cours privés dans notre garderie avec leur institutrice. Ces cours sont inaccessibles aux enfants de la garderie. Quant à moi, c'est le soir, quand je rentre, que je fais mes devoirs. Il y a trop de bruit dans la garderie : les cris des responsables, les bagarres des enfants ; je ne peux pas me concentrer. ». D'autres anomalies sont encore à constater dans ces espaces, malgré l'existence d'une réglementation régissant la vie et les droits des enfants qui y sont inscrits. De nombreuses lacunes sont à combler : infrastructures inadaptées, conditions de sécurité non fournies, personnel non ou pas bien formé, mauvaise gérance... C'est dans ces espaces que l'enfant apprend à vivre en communauté et à jouir de ses droits fondamentaux (jeux et différents apprentissages...). Désolé de brosser un tableau si noir mais dans ces structures d'accueil, tout n'est pas aussi bien qu'on le croit !