A l'approche de l'Aïd El Idha, les prix des moutons qui ont flambé, il y a une quinzaine de jours, ont brusquement chuté, à la joie de ceux qui n'ont pas encore acheté leur "Dhahia" comme Salah I, employé dans une usine. «D'expérience, je n'achète le mouton qu'à une journée de la fête de l'Aïd quand les "jallabas" voulant se débarrasser de leurs troupeaux bazardent et acceptent "aimablement" de marchander avec l'acheteur. Et c'est le consommateur qui en profite », disait-il, contrairement à Sayed. F, infirmier de profession : "J'ai acheté mon mouton depuis voilà deux semaines à 250 dinars. Je lui achète foin et luzerne et je laisse l'entretien de la bête aux enfants... le prix je m'en fous. Quand on a des enfants on ne compte plus," estimait-il. Brahim B. par contre disait : "Aucun mouton ne fût à mon goût jusque-là. Ces bêtes sont soit efflanquées soit engraissées... la nourriture de ces dernières est à base de pain dûr... et leur viande n'est pas bon pour "le méchoui". D'ailleurs, je compte me rendre demain au rif, pour acheter un mouton... en plein pâturage" disait-il en souriant.
Pourquoi les prix ont-ils flambé au début ? Ce sont les "gacharas" qui furent à l'origine de la montée des prix des moutons. Ces derniers savaient d'avance que les éleveurs désiraient fourguer leurs troupeaux quels que soient les prix... la nourriture du cheptel constitue, en effet, le casse-tête de tous les éleveurs après deux années caractérisées par une faible pluviométrie qui n'a pas favorisé la poussée d'une végétation suffisante pour des centaines de milliers de bêtes dans la région. "Je ne suis pas prêt pour dépenser encore... je garde les femelles et je vends le restant du troupeau quitte à ne pas couvrir toutes mes dépenses" reconnaît un éleveur de la région de Kairouan. Notons que ce gouvernorat occupe la première place dans l'élevage ovin avec plus de 400 000 femelles ovines... et approvisionne outre la région, les autres gouvernorats de moutons et de caprins. La direction régionale du commerce et de l'artisanat a recensé en collaboration avec les services du commissariat régional au développement agricole plus de 75 000 têtes ovines provenant des éleveurs (71 741 têtes) des sociétés de développement agricoles (1223 têtes) et de l'OTD (office des terres domaniales) (697 moutons). Soit le 1/10 du nombre de têtes ovines qui ont approvisionné les marchés du pays.
Ceux qui amassent des fortunes Aiguiseurs de couteaux, des charbonniers vendeurs de foin ont depuis deux semaines installé leurs étalages pour répondre aux besoins des consommateurs. Ces derniers préfèrent les meules artisanales pour aiguiser leurs couteaux, le charbon d'olivier pour griller la viande et la luzerne pour nourrir leurs moutons. Ils sont nombreux ces mandarins dans les différents marchés de bétails. Ils sont là pour détrousser, acheteurs, éleveurs et "Jallabas". Jeudi dernier, un de ces jallabas discutant le prix d'un mouton proposé par un type alluré a oublié qu'un voleur s'est emparé d'un de ses moutons, et disparu dans la nature... des scènes de ce genre sont courantes ces derniers jours dans la ville et même sur les bords de nos routes où sont exposés des troupeaux de moutons à la vente. Comme chaque année des milliers de moutons et une grande quantité de viande des denrées alimentaires, des vêtements et des couvertures seront à l'occasion distribués aux familles démunies...