L'air que nous respirons est-il propre ? Quel est le degré de pollution en Tunisie ? Avons-nous atteint le seuil ? Et est-ce que nous sommes invulnérables à la polémique que vivent les pays industriels concernant les émissions de gaz et la pollution atmosphérique ? Avons-nous préparé une stratégie pour préserver un environnement sain et durable à nos générations ? De nombreuses questions que ne cessent de poser nos experts de l'environnement ainsi que nos défenseurs de la nature chaque fois où il y a un séminaire sur la préservation de l'environnement, en particulier la qualité de l'air. Selon nos « Greens peaces », la qualité de l'air, en Tunisie, est étroitement liée aux activités anthropiques, responsables d'émissions polluantes dans l'atmosphère, à savoir : le trafic automobile , certaines installations fixes de combustion, les procédés industriels et artisanaux spécifiques et les réactions photochimiques. Ces quatre facteurs connaissent une évolution constante en Tunisie. Ceci prouve que la qualité de l'air sera de plus en plus dérisoire. Selon une étude réalisée dans ce domaine, le niveau global d'émission de dioxyde d'azote s'établit actuellement à 0,7 tonnes / km2, ce qui est relativement proche à ce qu'on observe en Europe, avec des niveaux dépassant 1 tonne / km2. S'agissant du niveau d'émission de dioxyde de soufre, il s'établit à 78,6 kg / habitant, ce qui est relativement élevé, comparé aux niveaux des pays industrialisés, variant entre 10 et 50 kg / habitant. La raison principale de ce niveau élevé correspond à la nature des carburants utilisés marquée par la forte présence du gazole. Pis encore, les mesures récentes relatives aux différents polluants (dioxyde de soufre, dioxyde d'azote, ozone et les particules en suspension telles que les vents de sable ou les combustions industrielles) relevées dans les neufs stations de surveillance de la qualité de l'air installées, par le Réseau national de la surveillance de la qualité de l'air (RNSQA) relevant de l'Agence nationale de protection de l'environnement (ANPE), au niveau des grandes villes Du pays (Tunis, Ben Arous, Sfax, Bouchemma, Bizerte et Gabès) demeurent toutes non seulement proches des limites tunisiennes mais excèdent les valeurs recommandées par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Des pics de pollution dans les zones urbaines L'activité industrielle en Tunisie est diversifiée et s'est régulièrement accrue au cours des vingt dernières années. Les activités les plus importantes, du fait de leur taille et de leurs impacts sur l'environnement, sont : l'agro-alimentaire, l'extraction minière, la transformation des phosphates, l'industrie des matériaux de construction, la production d'énergie et l'industrie du textile. D'autres activités de moindres importances telles que le tannage du cuir, les petites industries mécaniques et chimiques, etc, pourraient de même être citées. Ces petites industries, dispersées et de ce fait difficiles à contrôler, sont à l'origine de fortes charges polluantes. Cette activité se déroule principalement autour des grandes agglomérations urbaines (Tunis, Bizerte et Menzel Bourguiba, Sfax, Gabès, Gafsa et Kasserine) et le long des côtes où sont concentrés environ 80% de la population. En fait, 13% des unités industrielles sont considérées polluantes. Des pics de pollution ont été atteints près des sites industriels polluants (Tunis, Sfax, Gabès, Bizerte). En effet, les usines de transformation de phosphates installées sur le littoral dans le golfe de Gabès (vers le sud est du pays), génèrent 12 mille tonnes de phosphogypse par jour et des quantités importantes en SOx et NOx. Le phosphogypse est déversé dans la mer. Afin de réduire cette pollution marine, le gouvernement tunisien a décidé de transférer ces quantités de déchets vers un site terrestre. A Sfax, toutes les usines NPK de transformation du phosphate ont été fermées depuis le début des années 1990. Les zones industrielles La poudrière I et II, attenantes à ces usines, ont été réhabilitées et réaménagées. Elles ont été raccordées au réseau d'assainissement et 70% des entreprises industrielles ont été équipées en unités de traitement primaire. A Kasserine, pour les besoins de l'usine de pâte, la SNCPA a produit entre 1963 et 1998 de la soude, du chlore, de l'acide chlorhydrique et de l'hypochlorite de calcium dans une unité d'électrolyse utilisant un procédé à mercure. Durant cette période, des quantités importantes de mercure ont été déversées directement dans le milieu récepteur. Cette unité a été abandonnée en 1998 et remplacée par une unité à membrane non polluante. A Gafsa, la CPG a élaboré une étude de diagnostic de la situation environnementale dans la région et de l'impact socio-économique de la boue générée par les lavoirs d'enrichissement du phosphate, cette étude propose également des scénarios pour la gestion écologique de la situation. Le scénario adopté récemment consiste à stocker ces déchets dans des décharges aménagées sur des sites ayant des caractéristiques géologiques et topographiques bien précises et adaptées. Ce scénario permet notamment de récupérer 25% des quantités d'eaux usées. Sur un autre plan, la CPG se propose d'intensifier le recours au gaz naturel, au lieu du fuel lourd, pour le séchage de quantités de phosphates destinées à l'exportation. Cette solution favorisera notamment la réduction des émissions de gaz nocifs. A Bizerte, une étude sur l'amélioration de la qualité de l'air à Bizerte a démarré depuis 2004. La première phase de l'étude a été achevée. L'objectif de cette étude est d'inventorier toutes les sources de pollution atmosphérique de la région et d'évaluer l'impact sanitaire et environnemental de ces émissions.
Qu'a fait l'Etat ? Face à ces situations , une stratégie nationale en matière de lutte contre la pollution de l'air a été mise en place et s'articule autour de trois axes principaux, à savoir la protection et la gestion rationnelle des ressources naturelles, la lutte contre la pollution et les nuisances et la promotion de la qualité de vie. D'après le ministère de l'Environnement, il s'agit d'identifier et de contrôler les secteurs et régions qui connaissent une grande activité industrielle et une importante circulation et l'appui aux entreprises pour accéder aux normes techniques en la matière et l'intensification de la réalisation des audits énergétiques. Chose qui est un peu bizarre, si vraiment nous sommes encore au stade d'inventorier les sources de pollution ! Par ailleurs, une loi sur la qualité de l'air a été instituée en 2007. Elle comporte plusieurs dispositions relatives à la mise en place d'un système national de suivi de la qualité de l'air dans les villes et les agglomérations urbaines et la fixation des critères d'élaboration des programmes de préservation de la qualité de l'air au sein de ces régions. La Tunisie a, aussi, signé en avril 2008, un accord de coopération avec la Corée du sud en matière de sauvegarde de l'environnement et l'échange d'expertise et a adhéré à la convention de Vienne pour la protection de la couche d'ozone et le protocole de Montréal sur les substances qui appauvrissent la couche d'ozone. Par ailleurs, une unité spécialisée dans la protection de la couche d'ozone au sein de l'ANPE, en coopération avec plusieurs organismes internationaux, a permis l'élaboration de 44 projets dans ce domaine moyennant des investissements de l'ordre de 9,84 millions de dollars. Ces projets portent, en particulier, sur le suivi spatio-temporel de la pollution atmosphérique et les situations de dépassement des seuils, la prévision et prévention des épisodes aigus ou subaigus et de fournir des données qui seront exploitées dans la recherche et les études scientifiques portant sur l'impact de la pollution atmosphérique sur l'environnement et la santé. A rappeler qu'une ligne de crédit de 40 millions d'euros (soit 68 millions de dinars) a été accordée, fin 2007, par l'Agence française de développement (AFD) pour faciliter le financement de la dépollution industrielle.