* Interrogations autour de l'APC L'institutionnalisation du Plein Temps Aménagé ( PTA ) convertie aujourd'hui en Activité Privée Complémentaire ( APC ) à la faveur de laquelle, les praticiens spécialistes universitaires ou de santé publique peuvent exercer une activité complémentaire à raison de deux demi-journées par semaine dans les cliniques ou cabinets privés, a contribué à exacerber la déstructuration des hôpitaux publics puisqu'il est de notoriété publique, qu'un grand nombre des praticiens qui en bénéficient ont tendance à inverser la mesure et à exercer plus de temps dans le secteur privé, à déserter leur service ou unité et parfois même à détourner les malades de l'hôpital public vers la structure privée où ils pratiquent. Cette mesure, qui a été promulguée par les pouvoirs publics, était motivée par la reconnaissance de l'insuffisance de la rémunération des praticiens médicaux exerçant dans les structures publiques. Elle avait pour objectif l'amélioration des revenus du corps médical.
APC: objet d'une polémique Le décret qui stipule les modalités fixées par le ministère de la Santé Publique de cet exercice comporte bien des défaillances, ce qui n'a pas empêché « l'exception de devenir une règle ». L'APC n'accorde pas le droit aux urgences, mais peut-on ne pas secourir d'urgence un patient venu déjà pour une consultation privée ? Ainsi le bureau du grand patron se transforme en cabinet de consultation privée quotidienne ; disposant d'un personnel assujetti, d'un espace et d'un matériel. « C'est un truc qui me révolte - nous confie un résident Dr.K-, tu rentres dans le service du Pr « Toujours absent » ou du Pr « ll me faut de l'argent », à gauche c'est la misère, lits en file dans le couloir, odeurs qui vous coupent le souffle......et à droite, plantes vertes d'intérieur, salle d'attente agréable..... » Quant à la formation de nos cadres, elle est négligée, délaissée car nos formateurs n'ont plus le temps pour s'en occuper « ils sont présents plus à la clinique qu'aux cours pratiques » , nous dit Dr H. « Ils arrivent pour aussitôt repartir. Ils pratiquent la rétention du savoir-faire dans le but de monopoliser les lieux et devenir irremplaçables. « Bien de médecins ne s'occupent plus de leurs services », nous témoigne Dr .H , « et négligent la formation de leurs étudiants, alors que c'était cela le but au début. Il y a même des chefs services qui ne rencontrent leurs résidants que le premier jour de leur stage, puis au pot du départ à la fin » Ce qu'on observe actuellement, c'est un détournement total de l'AP C, ainsi le résultat, est une médecine à deux vitesses exercée au sein même de l'hôpital, (avec le matériel et le personnel) ou ailleurs. Ainsi ceux qui en doutent essaient de prendre rendez-vous en public puis en privé avec le même médecin. Qu'ils comparent les délais et en tirent leurs conclusions!!. Le Dr H.A nous a rapporté un cas qui a eu lieu à Sousse : « Une femme diabétique qui subissait une intervention sur le bas ventre, est restée sous anesthésie quarante-cinq minutes de plus le temps que le « patron » aille faire accoucher une dame à la clinique ! » On s'arrange à convaincre parfois le malade alité qu'il aurait « intérêt à être pris en charge dans le privé, médisent sur l'état de l'hôpital public » et c'est le meilleur moyen d'amputer le patient dans sa dignité, sa santé et dans son porte feuille. Le dynamisme de ces médecins est souvent indiscutable mais plus souvent orienté vers le développement de leur activité privée que vers les grands objectifs de santé publique. Le budget d'investissement de l'hôpital est limité, les choix privilégient bien souvent ce qui rapporte de l'argent aux dépens de ce qui serait nécessaire pour assurer à la population des soins de qualité et une prise en charge digne et humaine. Prétendre que leur dynamisme fait vivre l'hôpital est le plus souvent faux, ce sont ceux qui ont fait le choix de ne pas avoir d'activité privée qui au quotidien font « tourner les services ».
Un bilan négatif Les conclusions tirées par la commission d'évaluation étaient claires. Elles parlent de dépassements, d'abus, de formation négligée, de dépassements honoraires, de concurrence déloyale, de dérapages sous différentes formes et à tous les niveaux et d'hémorragie manifeste. On conclut que si l'APC était indispensable dans une période bien déterminée, peut-elle continuer à l'être aujourd'hui, vu le nombre de médecins dont la Tunisie dispose ? Et si on applique le système de L'APC dans d'autres secteurs du fonctionnariat, que pourrait faire un magistrat, un agent de douane ou un agent de police comme Activité Privée Complémentaire ??