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Les enfants de la rue
LA VIE DANS LA CITE
Publié dans Le Temps le 12 - 01 - 2009

L'association entre ces deux termes est antithétique, la place d'un enfant ce n'est pas la rue, sa fragilité, sa vulnérabilité, son innocence et son manque d'expérience ne lui permettent pas d'occuper un endroit aussi difficile, aussi hostile où sévissent les forbans et les délinquants.
Eux, ces créatures faibles ont besoin d'être bien entourées, bien dorlotées et bien encadrées par des tuteurs soucieux de leur santé et de leur éducation, de leur formation physique et intellectuelle, de leur présent et de leur avenir. Cet encadrement et cette affection ne peuvent s'accomplir que dans un espace sain et chaleureux. Et pourtant, ces êtres délicats sont abandonnés à leur triste sort. Ils sont livrés à la rue, c'est là qu'ils vivent, qu'ils passent leurs nuits et leurs journées parmi les loups, les hyènes et les charognards. Que faire quand aucune opportunité ne se présente, quand il n'y a pas d'assistance, quand personne ne répond à leur appel de détresse ? Ils n'ont pas de choix les pauvres, ils se trouvent contraints de s'acheminer bon gré mal gré vers cette jungle habitée par des fauves.

Le chemin de la délinquance
Ces enfants sont en âge d'aller à l'école, mais n'y vont pas. Ils sont là où ils ne devraient pas être, ils font des activités qui leur sont très préjudiciables et qui altèrent profondément leur nature. On les trouve dans les zones touristiques...avec ce que cela suppose comme tentation. On les croise dans les stations de transport vendant du chewing-gum, des cigarettes, des briquets, dans les bars offrant des amuse-gueules aux viveurs et aux amateurs du paradis artificiel, ceux qui fuient la réalité désolante et se réfugient dans l'alcool, dans les stades de football où ils animent le marché noir des billets, ils sont engagés par les maîtres de ce trafic illicite. Et s'ils ne sont ni gigolos, ni petits commerçants, ils sont alors petits délinquants. Ils pratiquent le pickpocket, l'attaque à main armée, le cambriolage. La chose n'est pas nouvelle, elle date depuis des siècles, puisque le monde n'a pas changé, il garde toujours et encore le même visage hideux de l'injustice, de l'exclusion, de la discrimination, il affiche la même nonchalance à l'égard de ces victimes. L'exploitation de ces êtres chétifs et inoffensifs continue en dépit des slogans lancés ça et là prétendant qu'ils bénéficient d'une bonne protection. Les choses n'ont pas changé depuis les eunuques des temps anciens jusqu'aux travailleurs et délinquants mineurs de la nouvelle époque, celle du progrès. Le principe de travestissement de l'enfance est toujours de rigueur, seuls ont évolué les procédés assurant ce projet malveillant. Déjà au dix-neuvième siècle, l'écrivain anglais Carles Dickens nous en a livré un exemple, nous a donné un modèle, celui d'Olivier Twist dans son œuvre portant le nom de ce héros de roman noir. Ce sort qu'a connu cet enfant lui a été scellé par la misère : il était issu d'une famille miséreuse, ce qui l'a rendu une proie facile aux mafieux qui l'ont récupéré et font de lui un criminel. C'est le cas de Lassâad, un enfant naturel. Depuis sa venue au monde, il était condamné à une vie de malheurs et de souffrances. Son âge, c'est à l'adolescence qu'il l'a su grâce à Habib qui l'a pris en charge et qui l'a inscrit auprès de l'officier de l'état civil. C'est ainsi que Lassâd a pu accéder au rang de citoyen, qu'il a reçu la preuve de son existence et de son appartenance au genre humain, il a fallu le concours d'un citoyen pour qu'il ait enfin un extrait de naissance comme tout le monde, depuis 2004, il sait qu'il est né en 1987, une date approximative bien sûr. Seulement cette reconnaissance ne dépasse pas le simple statut, car en ce qui est des droits il n'en a rien reçus. Après cette prise en charge très brève qui a duré six mois, il a retrouvé la rue, l'espace où il a grandi. Habib qui est père de cinq enfants tous adolescents était obligé de mettre un terme à cette protection qu'il lui a offerte, car il était devenu un danger pour ses deux fils auxquels il a appris les mauvaises habitudes qu'il a contractées dans la rue telles que sniffer de la colle. Il est perdu, à cet âge relativement avancé, il est très difficile de l'éloigner de ces pratiques très nuisibles et lui faire éviter cette déchéance à moins qu'on lui fasse bénéficier d'une assistance sociale assurant sa rééducation. Mais les seuls soins dont il jouit lui sont offerts par la police qui vient le chercher dans le jardin de la maison de jeunes du quartier où il passe ses nuits et le traduit devant la justice pour vagabondage, à chaque fois, il est condamné à quinze jours ou à un mois de prison. Pour éviter les descentes policières nocturnes, il change parfois d'abri en se réfugiant sur les toits des immeubles d'à côté, la cachette dure quelques jours, puis elle est découverte suite aux dénonciations des habitants. C'est ainsi que Lassâad passe sa vie, il fait continuellement la navette entre la rue et la prison, la destination qui lui est choisie par la police qui ne trouve pas mieux que cet endroit pour le redresser, elle le trouve plus convenable que les centres SOS ou professionnels. L'innocence est perçue comme étant un crime qu'il faut châtier. Pour condamner quelqu'un, les autorités sont tenues de procéder à des investigations, elles ne doivent pas se contenter de traiter des faits, de juger sur la mine, d'appliquer les mêmes règlements à tous les individus indistinctement.
Des bombes à retardement
D'après les statistiques officielles, 50 000 élèves quittent l'école chaque année parmi lesquels 20 000 du deuxième cycle de l'enseignement de base. Excepté quelques privilégiés qui sont inscrits à l'école privée, les autres qui sont la majorité se retrouvent dans la rue. Leurs parents n'ont pas les moyens pour répondre favorablement à leurs besoins, alors ils se trouvent obligés de quitter la maison paternelle et tenter leur chance ailleurs, ils se prennent en charge bien qu'ils soient encore mineurs, leur entrée dans la vie adulte se fait précocement. Certains d'entre eux plus ambitieux et plus audacieux tentent leur chance en dehors des frontières, ils empruntent la barque de la mort à laquelle très peu échappent pour se retrouver entre les griffes des autorités locales qui les renvoient à la misère qu'ils ont fuie.
Ces milliers d'enfants et de jeunes livrés à eux-mêmes n'ayant aucune culture et fréquentant des endroits mal famés sont des candidats potentiels à la délinquance et à la criminalité. Le grand danger auquel ils sont exposés et qui, par ricochet, menace la société dans sa totalité est leur récupération par les dérives extrémistes.


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