Il y a des jours où il faut se rendre compte que nous abusons des privilèges dont nous jouissons et dont les autres sont parfois totalement privés. Alors qu'en ce moment, la ville de Gaza patauge dans le noir, de nombreux Tunisiens consomment l'électricité sans compter. Et lorsque sur la facture de la STEG, la note leur paraît lourde, ils accusent la société de les voler et de les surfacturer indûment. Or, quelques calculs simples suffiraient pour montrer que nous ne faisons plus attention à notre... compteur !
Trop d'engins électriques Dans la majorité des familles, chaque membre possède au moins un téléphone portable qu'il alimente régulièrement en électricité. Quelquefois, vous avez six portables branchés en même temps à des prises électriques pour être « rechargés ». Au même instant, toutes les pièces de la maison sont allumées ainsi qu'une ampoule (ou plusieurs) dans le jardin ou à l'entrée, et ce pour des heures. Les ordinateurs consomment aussi de l'électricité et davantage si vous êtes abonnés à Internet. Au cas où l'installation est équipée d'une imprimante, attendez-vous à quelques kilowatts supplémentaires sur la facture. Les consoles de jeux ne fonctionnent pas à l'air ambiant malheureusement, et donc consomment parfois plus d'énergie que l'ordinateur et les ampoules de la maison réunis. N'oubliez surtout pas les appareils à forte consommation électrique comme les radiateurs de chauffage, les fers à repasser, les sèche-cheveux, les mixeurs, les presse- citrons. Ce sont des engins dont sont pourvus au moins 50% des foyers tunisiens lesquels disposent en plus de quelques bagatelles qui marchent à l'électricité (briquets de cuisine, petites lampes de couloir, bibelots lumineux etc.). Ajoutons la télévision et ses différents récepteurs et engins d'accompagnement, le réfrigérateur et la machine à laver présents ensemble dans une bonne partie des maisons, cela fait au moins 50 dinars par famille sans compter les diverses taxes. Pour la consommation de gaz de ville, elle dépasse rarement les dix dinars par foyer, mais il faut en tenir compte aussi au moment de payer.
Les bons et les mauvais calculs De tels calculs sont toujours bons à faire surtout pour ne pas accuser les autres de tous nos maux. En effet, nous sommes trop tolérants avec nos enfants qui comprennent difficilement pourquoi on leur demande d'éteindre la lumière en sortant d'une chambre, de débrancher la télé ou l'ordinateur quand ils ne s'en servent plus, d'utiliser un peu moins leurs chaînes stéréo et leurs baladeurs pour écouter la musique, de se méfier de l'usage abusif du sèche-cheveux, de refermer le réfrigérateur aussitôt ils en ont retiré ce qu'ils y cherchaient...Les mères de famille ne sont pas toutes économes en énergie et contribuent pour leur part, chacune à sa manière, à l'élévation du montant des factures de la STEG. Les époux consomment peut-être moins que tout le monde du fait qu'ils sont plus souvent dehors, mais il arrive que les pères de famille soient aussi insouciants que leurs enfants et c'est seulement devant les guichets de la STEG qu'ils mesurent les fâcheux effets de cette insouciance sur leur budget.
Ce n'est pas moi, c'est la STEG ! D'autres préfèrent user de leur mauvaise foi pour imputer le « défaut » au mauvais compteur à trois fils qu'on vient d'installer chez eux ; ou bien ils harcèlent les agents de la STEG afin d'obtenir une facture détaillée ou un contrôle immédiat de l'installation, espérant toujours démontrer que c'est la faute à ces fonctionnaires si le montant est trop élevé. De toutes les manières, on cherchera l'erreur partout sauf chez soi. L'autre jour, un ami retraité me confia qu'il paie tous les deux mois plus de 500 dinars pour la seule consommation domestique d'électricité. Lui au moins, il avoue que chez lui, on gaspille sciemment l'énergie ! Ses enfants se sont habitués à un confort coûteux et aujourd'hui, il lui est difficile sinon impossible de faire marche arrière. Quand il ose quelques récriminations, c'est son épouse qui lui répond : « Laisse-les faire, après tout tu n'es pas le seul à payer la STEG ici ! ». Qu'importe donc si l'on a les moyens de ses rêves (quoique...), mais ce sont parfois les moins aisés qui vivent au-dessus de leurs revenus. Les retards de paiement, les emprunts pour payer l'électricité, les avis de coupure, tout cela leur est devenu si familier que quand ils apprennent une imminente coupure sur leur compteur électrique, ils réagissent aussi froidement que si vous leur avez annoncé la noyade d'un australien sur les côtes malgaches !
Comme on fait son lit... Ce n'est surtout pas pour défendre la STEG que nous soulevons la question des factures d'électricité trop élevées pour les salaires moyens, parce que ladite société n'est pas exempte d'erreur. Il arrive en effet que le citoyen ait raison de réclamer des rectifications dans les calculs des ordinateurs. Mais on ne peut non plus nier la responsabilité de ceux qui sèment le vent et s'étonnent de récolter la tempête ! A eux comme à tous les Tunisiens qui adorent faire les innocents, nous répéterons pour finir cet adage connu : « Comme on fait son lit, on se couche ! ».