La dégradation de la qualité de l'eau de robinet est-elle la principale cause ayant poussé les habitants de plusieurs régions notamment ceux du Grand-Tunis (gouvernorats de Tunis, Manouba, Ariana et Ben Arous) à opter pour l'eau minérale ? Et est-ce que l'eau minérale que nous consommons est vraiment meilleure? Telles sont les questions souvent posées par les habitants de ces régions qui se trouvent entre le marteau et l'enclume à savoir, une eau de qualité douteuse et une eau très coûteuse.
Jusqu'à une date très récente, l'eau minérale ne faisait pas partie des habitudes du consommateur tunisien. Elle était plutôt réservée à des personnes malades (problèmes de reins, diabétiques), des femmes enceintes ou des personnes à revenus élevés. Aujourd'hui on assiste à une augmentation de la consommation de l'eau minérale grâce à l'amélioration du niveau de vie et à la prise de conscience des dangers de l'eau de robinet, à long terme, sur leur santé à cause des quantités de calcaire qu'elle contient.
Eau minérale, pas suffisamment la qualité demandée Il ressort d'un rapport d'évaluation de la qualité des eaux mises en bouteille, réalisé par l'Office national du thermalisme, que ce secteur n'est pas regardant quant aux conditions de stockage et de sécurité sanitaire, l'absence de programmes d'entretien et de formation ciblée en faveur du personnel de ces unités. Le rapport d'évaluation montre, également, une réduction de 2% des quantités d'eaux produites en 2007 comparées à 2006, passant de 455 millions de litre à 445 millions de litres. Cette baisse est expliquée par le recul de la production de bon nombre d'unités de production au cours des périodes de grande consommation. La moyenne de consommation annuelle d'eaux minérales des ménages tunisiens est passée de 5 litres en 1987 à 45 litres actuellement. Toutefois, même si l'eau en bouteille contient plus de minéraux nécessaires à la santé que l'eau de robinet selon 43,4% des Tunisiens, nos compatriotes font confiance à l'eau de robinet à hauteur de 66,8% (contre 33,2%). Ils sont 70,8% à connaître la différence entre l'eau de source et l'eau de robinet (contre 29,2%). Concernant le goût, les Tunisiens sont à 95,2% à préférer l'eau minérale. Enfin, il a été constaté que l'eau minérale est beaucoup plus consommée dans les zones urbaines que dans la campagne (plus de 23%).
Eau de robinet, parfois grise, parfois rouille D'un goût un peu salé, on constate lorsqu'on remplit un verre d'eau du robinet, que l'eau a une couleur blanc-grise accompagnée d'une fermentation. Dans d'autres cas, l'eau prend la couleur rouille ou jaune de sable. Ces cas sont souvent observés lorsqu'il y a une reprise de l'eau du robinet après une coupure de quelques heures. Dans le premier cas, la coloration est due à la pression du vent avec l'eau. Trois minutes après, l'eau retrouve sa couleur d'origine, on peut boire tranquillement. Tandis que dans le second cas, le changement de la coloration est généré par le mélange de l'eau avec des grains de sables ou avec des résidus de rouille au moment de la réalisation des travaux de réparation au niveau de la canalisation d'eau. Dans ce dernier cas, il est déconseillé de boire cette eau, il faut attendre jusqu'à ce que l'eau du robinet devienne propre, nous expliquent des responsables au complexe de production de l'eau potable de Ghdir El Golla (délégation de Mornaguia).
Trois ressources d'eau approvisionnent la capitale L'eau qu'on boit dans la région du Grand-Tunis, qui compte presque à deux millions habitants qui consomment en moyenne entre 280.000 m3 d'eau par jour en hiver et 450.000 m3 par jour en été, est un mélange d'eau en provenance du Canal Mejerda (Medjez El Bab), Barrage Kasseb (Amdoun) et Barrage Béni M'tir (Fernana). L'eau brute en provenance de ces ressources est traitée (décantation, filtration et désinfection) dans le laboratoire du complexe de production de l'eau potable de Ghdir El Golla, situé sur une superficie totale de 400 ha . Le complexe dispose, également, d'une réserve en eau brute qui permet la sécurisation de l'alimentation et l'approvisionnement en eau du Grand-Tunis et aussi du Nord du Cap-Bon (Zaghouan et Bizerte) durant un mois. Des prélèvements périodiques d'eau sont effectués, par le laboratoire de Ghdir El Golla, au niveau des gouvernorats du Grand-Tunis, Zaghouan et Bizerte, en particulier au niveau des régions couvrant les universités, les foyers, les hôpitaux, les cafés, l'objectif étant d'analyser et contrôler la qualité de l'eau (degré de salinité, produits nocifs, pollution,...). Selon les chiffres fournis, sur 92 mille prélèvements effectués par an dans cette région, un taux de 1,5% est détecté infirme. Ce taux est "conforme" aux normes internationales qui sont fixées à 5% par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), précise un chef au laboratoire. La capacité de traitement de l'eau dans le complexe de Ghdir El Golla est de 600.000 m3 par jour ce qui permet de répondre aux besoins de la région du Grand-Tunis jusqu'à 2010. Selon des experts de la SONEDE, les efforts déployés en Tunisie en matière de mobilisation de ressources hydrauliques vont favoriser jusqu'à 2030, un équilibre entre l'offre et la demande estimée à 2721 millions m3. Au-delà de cette date, un déséquilibre va apparaître et la demande d'eau sera supérieure aux ressources conventionnelles exploitables, entraînant nécessairement un accroissement du recours aux ressources non conventionnelles. Sur un total d'environ 2 millions d'abonnés à la Société Nationale d'exploitation et de distribution d'eau (SONEDE), ceux des régions côtières (propriétaires d'hôtels, d'usines) constituent les plus gros consommateurs d'eau avec un taux de 46%, suivis des abonnés de la région du grand Tunis (34%) et des régions intérieures (20%).