* Le dilemme : le prolongement des années d'activité au delà de 60 ans risque-t-elle de réduire les chances d'emploi pour les jeunes ? Les nouvelles statistiques de la couverture sociale indiquent que les caisses sociales (CNRPS et CNSS) passent par des difficultés financières malgré les augmentations opérées sur les taux de cotisation des affiliés de la CNRPS. Lequel déficit fait, depuis des années, l'objet d'études élaborées dans plusieurs cercles de réflexion à l'université, dans l'administration et, même, au niveau de l'UGTT. Ainsi réfléchie, toute la question consiste à savoir si l'on pouvait échapper au recul de l'âge de la retraite de quelques années pour permettre le rééquilibrage des finances des caisses sociales surtout que l'espérance de vie a sensiblement progressé et que l'âge moyen de la 1ère embauche a suffisamment reculé pour se situer au-delà de 26 ans et que les ratios actifs/retraités ne sont plus que de 3,5 actifs pour un retraité. L'option du maintien en activité des salariés a déjà été adoptée par d'autres pays. Elle a été annoncée officiellement au début de 2009 en Tunisie pour le corps A des universitaires qui travailleront désormais jusqu'à l'âge de 65 ans. Mais est-ce une réponse à un besoin spécifique d'encadrement à l'université ou, plutôt, un ballon d'essai annonçant un choix pour le mode de réforme de la retraite ?
L'état des lieux Le régime de la retraite en Tunisie est géré par la Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance Sociale " CNRPS " pour les employés de l'Etat et par la Caisse Nationale de Sécurité Sociale " CNSS " pour le secteur privé. La CNRPS a connu une situation financière excédentaire durant les années soixante et soixante-dix du siècle dernier. Le rapport actifs/retraités était de 10 pour 1, voire 8 pour 1. Les structures de l'Etat ne se sont vraiment constituées qu'au bout de dix, voire 15 ans après l'indépendance. Cette génération a mis le temps d'une carrière pour être admise à la retraite. La CNRPS vivait alors son époque dorée. Elle s'était permise le luxe d'investir dans l'immobilier. Toutes les grandes villes se sont alors offertes des cités " CNRPS " où les employés pouvaient (et peuvent encore) louer à des prix relativement modérés. Mais, depuis le début des années 1980, le ratio " actifs/retraités " n'a pas cessé de diminuer graduellement. Il se situe aujourd'hui à moins de 4 actifs pour une pension de retraite (orphelins, invalides, veuves ou retraités). Cette situation s'est répercutée sur les équilibres financiers de la caisse. De ce fait, les finances de la caisse sont déficitaires sur l'exercice de l'année en cours même si elle est encore excédentaire sur le plan de la comptabilité globale cumulée vu qu'elles profitent encore des retombées des années d'apothéose. Les effets des années roses continuent à équilibrer la balance. Seulement, ce phénomène ne saurait durer. A ce rythme, la CNRPS, ne pourrait honorer les pensions d'ici 2012 ou 2013. La Caisse Nationale de la Sécurité Sociale n'est pas sur une aussi mauvaise pente. Il n'empêche que son régime de retraite mérite une refonte pour ne pas se retrouver dans une passe difficile à l'horizon 2016 comme l'indiquent les projections des spécialistes. La CNSS dispose toutefois d'un nombre d'affiliés s'élevant au triple de celui des affiliés de la CNRPS. Elle bénéficie également de l'effet des ruptures des carrières professionnelles, notamment, pour les ouvrières suite à leur mariage. Laquelle rupture s'accompagne par l'abandon des cotisations retenues sur les émoluments des affiliés concernés.
Et si on procédait au cas par cas ! L'option de reculer l'âge de la retraite aboutit systématiquement à l'amélioration du ratio " actifs/retraités " et à la diminution du volume financier des pensions. Mais, ceci veut également dire qu'il y a moins de postes libérés en raison de l'admission à la retraite. Il est utile de rappeler qu'on avait favorisé au début des années quatre-vingt du siècle dernier la retraite anticipée à cinquante-cinq ans pour libérer des emplois. L'extension de l'âge du travail à soixante-cinq ans risquerait de réduire le nombre de ces emplois libérés par la retraite. On remarque également qu'un tel choix ne permet pas l'alternance dans les emplois fonctionnels en prolongeant l'âge de la retraite. Face à cette présence simultanée d'avantages et d'inconvénients dans cette option, ne pourrait-on pas procéder au cas par cas en fonction des emplois ? Ne pourrait-on pas également envisager des solutions où le prolongement de l'âge de la retraite serait facultatif ? Si une donnée est certaine, c'est qu'il faudrait faire participer tous les intervenants dans la recherche de la solution.