Les conférences des compétences tunisiennes à l'étranger se suivent, depuis quelques jours un peu partout, en Tunisie, et se ressemblent, même elles sont ciblées. L'Office des Tunisiens à l'Etranger a organisé, hier, à Tunis, sous la présidence du ministre des Technologies de la Communication, M. Haj Gley, une conférence des compétences tunisiennes à l'étranger, dédiée aux opportunités offertes en Tunisie pour investir dans le domaine des technologies de la communication. Mais nous avons constaté qu'une bonne partie des participants ne sont pas concernés par ce secteur. Il y avait des enseignants de langue, des médecins, des ingénieurs d'autres spécialités. Aussi, une attention plus grande devrait être prêtée à l'organisation et au ciblage de ces rencontres pour qu'elles soient plus efficaces et contribuent à réaliser les objectifs attendus. Elles s'adressent à des élites de très haut niveau, habitués à des environnements et à des modes de communication rationnels, et en même temps pleines de bonnes dispositions à l'égard de leur pays.
Effacement des avantages locaux En effet, les compétences tunisiennes à l'étranger se caractérisent par une diversité étonnante de profils, pendant que les autorités ont tendance à se focaliser davantage sur les disciplines techniques. Le registre de ces compétences en cours de réalisation permettra de mieux apprécier cette diversité, et les horizons de participation au développement scientifique et économique du pays qu'elles peuvent y apporter. Comme nous l'ont dit plusieurs participants, la tâche nécessite beaucoup d'intelligence et d'imagination pour réussir, car, font-ils remarquer, le nouveau contexte mondial, marqué par la mondialisation et l'ouverture des frontières, a accentué la mobilité des compétences et des ingénieurs en particulier, à travers le monde. Au même moment, le rôle prépondérant des grandes firmes internationales dans l'activité économique et scientifique mondiale a tendance à rendre inopérant les avantages propres d'un pays en particulier. La situation particulière d'un pays n'est plus un facteur déterminant pour retenir et attirer les compétences. Un ingénieur français ou tunisien de haut niveau travaillant dans une firme internationale peut être amené à servir dans une filiale installée dans son pays ou ailleurs. Les nouvelles grandes puissances économiques asiatiques attirent, de nos jours, des compétences européennes et autres autant que les anciennes destinations de prédilection pour les cerveaux européens et autres, comme les Etats-Unis d'Amérique.
Témoignages Quelles chances peut avoir la Tunisie, dans un contexte pareil ? Un participant assez concerné par le thème de la rencontre, Atef Dhaouadi, ingénieur en mécanique et productique, à Toulouse, en France, et qui prépare une thèse de troisième cycle à l'école des mines de Toulouse, nous a indiqué que ''chez les compétences tunisiennes à l'étranger, notamment en Europe, l'idée d'investir en Tunisie sous une forme ou une autre gagne du terrain et elle est même devenue une mode.'' D'après lui, beaucoup de ces compétences aiment mettre leurs hautes qualifications à la disposition du pays. '' Ce serait pour cette communauté une certaine manière d'exprimer sa gratitude envers le pays qui leur a procuré la formation de base nécessaire, a-t-il dit. Il a signalé toutefois la standardisation de plus en plus grandissante des diplômes supérieurs et en particulier des diplômes d'ingénieurs à l'échelle internationale, qui est à double tranchant pour tous les pays et en particulier pour les pays émergents, comme la Tunisie Grâce à cette standardisation, les diplômes supérieurs et en particulier les diplômes d'ingénieurs sont reconnus partout, et cette reconnaissance facilite et favorise la mobilité de ces compétences, à travers le monde, tout en garantissant le niveau des diplômes nationaux. Dans une telle perspective, l'adoption du système international de formation basé sur la licence, le mastère et le doctorat (LMD) dans l'enseignement supérieur tunisien, garantit le niveau des diplômes tunisiens mais peut aussi favoriser la mobilité des compétences.
Transfert du savoir Un autre participant, le Dr Noureddine Bahri, spécialiste en chirurgie orthopédique, établi à Hambourg, en Allemagne, a mis l'accent principalement sur ''le plus scientifique'' qui avantage les pays d'accueil européen par rapport à la Tunisie et dont les compétences tunisiennes installées dans ces pays peuvent faire profiter la Tunisie et les régions maghrébines et arabes en général. Déjà, la médecine allemande se distingue de la médecine française par une autre approche et par sa haute technicité, a-t-il noté. D'ailleurs, le Dr Noureddine Bahri est président de l'Association arabo- allemande de médecins (German Arabic Doctors) qui va organiser en décembre prochain, à Hammamet à Tunis, la première Conférence arabe de chirurgie orthopédique et traumatologie, en collaboration avec la société tunisienne de chirurgie orthopédique et traumatologie.
Egalement présente à cette rencontre, une enseignante de traduction et de civilisation arabes à l'Université de Messine, en Italie, Mme Amel Jouini, a mis l'accent sur le grand besoin de l'Italie en enseignants et spécialistes de la langue et de la civilisation arabes, ainsi qu'en tout ce qui a trait à l'histoire et à la civilisation méditerranéenne dans la rive sud. Son cours regroupe jusqu'à 150 étudiants et auditeurs. Elle est aussi présidente de l'Association des compétences tunisiennes du Sud de l'Italie qui forment une communauté importante par le nombre et le rayonnement et qui comptent des enseignants universitaires, des ingénieurs agricoles, des étudiants. L'intégration en Italie nécessite, impérativement, selon elle, la maîtrise parfaite de la langue italienne. Conjugué à la standardisation des diplômes, cet accroissement des besoins en cadres et experts dans les diverses disciplines, enregistré dans les pays européens autant que dans ceux d'Amérique du Nord et autres régions, constitue, également, un autre facteur de nature à encourager et à entretenir, pour longtemps, la mobilité des compétences.