* Il y en a pour toutes les bourses. Bien sûr, la qualité ça se paie et surtout l'importé. Mais " le local " ne cesse de marquer des points... L'Aïd approche, les grandes places commerciales connaissent leur taux d'affluence le plus élevé. Bruits et bousculades, elles sont envahies par une multitude d'adultes qui, accompagnés d'une cohorte de gamins, se faufilent à travers la cohue pour acheter les habits de l'Aïd. Une ambiance particulière règne en cette période ramadanesque. Le commerce des habits fleurit. Le train-train quotidien des marchés a cédé le pas à l'effervescence et aux bousculades pour l'achat des habits de l'Aîd. Dans la Médina de Tunis, Rue Charles De Gaulle, Avenue de Paris et autres, une grande marée humaine essaie de se frayer un passage. La pression de la foule, des sifflets et des cris des vendeurs fixes ou ambulants finissent par donner le tournis. Sur la tête, dans les bras ou sur l'épaule et dans des pousse-pousse, les marchands ambulants proposent des marchandises constituées d'articles divers : chaussures et vêtements. " C'est normal nous dit Am Hédi un commerçant dans les habits. C'est le moment de faire les affaires. On travaille jusqu'à l'aube, histoire de satisfaire toutes les demandes. Les gens sortent surtout la nuit. Ils auront du temps pour sillonner tous les coins et acheter les habits pour leurs enfants "Les marchandages entre acheteurs et revendeurs d'articles d'habillement sont âpres mais non violents, chacun essayant de ne pas être berné par l'autre. Les parents débordés par les exigences de leur progéniture butinent dans l'espoir de tomber sur la meilleure affaire. Samira mère de quatre enfants essaie de faire le tour de la ville " Avec ma bourse modeste, j'essaie de faire habiller tous mes enfants. Les prix sont abordables. Mais lorsqu'on a affaire à des habits de qualité, il faut casquer beaucoup d'argent. " Nadia accompagnée de son fils Adel est très furieuse " Mon fils exigeait un jean signé. C'est cher. Cela coûte 80 à 100 dinars. Je lui ai proposé un autre à 20 dinars. Il résiste et il tient à son jean américain " Une virée du côté de l'Avenue Charles De Gaulle nous fait révéler que la santé financière du Tunisien n'est pas mauvaise et que la ruée sur les bonneteries, les magasins de prêt à porter a pris une grande dimension ces derniers jours. " Ça commence à bouger. Les gens tâtonnent avant d'acheter. Ils regardent et comparent les prix. Les ventes se font au compte-gouttes. Il y a plus de visiteurs que d'acheteurs. " Nous confie un commerçant du coin. Partout c'est le même son de cloche. Il est vrai que les vendeurs des habits veulent faire des affaires comme nous le souligne Jalal , un vendeur ambulant " Notre chiffre d'affaires commence à s'améliorer. Mais je pense que les meilleures ventes surviendront la veille de la fête. " Les parents ayant des petites bourses recourent à des avances, à des prêts ou à des crédits bancaires uniquement pour ne pas priver leurs enfants de cette joie collective: "La joie de mes enfants vaut toutes les dépenses", déclare cette dame qui n'arrive pas à joindre les deux bouts. Plusieurs parents se grattent la tête voire s'endettent pour faire plaisir à leurs enfants L'importé, le local et les fripes Les prix des habits évoluent en fonction de leur qualité. Des habits chic coûtent trop cher. Du côté de grandes surfaces, le prix des habits sort complètement de l'ordinaire. Il faudra miser entre 100 et 150 dinars pour un enfant de 10 à 12 ans. La qualité ça se paye et beaucoup ne reculent pas pour acheter des vêtements à des prix élevés. Najet, cadre bancaire ne peut pas résister devant les implorations de son enfant " les prix ont connu cette année une hausse insupportable. Des espadrilles importées dépassent les 150 dinars, une ceinture signée coûte 50 dinars, une chemise à 120 dinars et face à la forte tentation de faire plaisir à mon fils, on n'a d'autre choix que de succomber", explique-t-elle. Les prix pratiqués sont vertigineux. Plusieurs parents accompagnés par leurs enfants ont été contraints à céder. Un ensemble pour garçon (pull, chemise et pantalon) coûte entre 150 et 250 dinars" C'est excessivement cher, nos bourses ne le permettent pas. Tout ce qui est importé dépasse l'imaginaire et cela contribue encore plus à la diminution de notre pouvoir d'achat, déjà fortement érodé. " Nous dit Rafik un professeur retraité qui ajoute " j'ai opté pour tout ce qui est local, c'est cinq fois moins cher. J'ai repoussé mes achats pour la semaine prochaine car les prix chuteront considérablement la veille de la fête. Alors, fort de cette conviction, j'attends le moment propice pour acquérir à bon prix des vêtements à mes enfants." Même si les prix sont relativement élevés, certains clients affirment vouloir miser sur la qualité " le bas de gamme ne m'intéresse pas. Je préfère tout ce qui est importé qui dure et qui résiste au fil des jours qu'un habit local " affirme Jamila. " Nabil essaie de copier son voisin " un jean made in USA,j'ai fini par l'acheter au crédit" dit -il. Bref, la tentation est grande à la veille de l'Aïd. Les parents sont débordés surtout que la rentrée scolaire est pour très bientôt. Là aussi, c'est un autre souci de dépenses. Mais comme le dit ce jeune ouvrier qui vient d'acquérir des fripes à l'état neuf " A chacun selon ses moyens. On s'habille selon sa bourse. Importé, local ou fripe, cela ne changera pas notre vie. L'essentiel, c'est que nos enfants célèbrent cette fête dans la joie "