Le rideau est tombé dimanche sur une saison vraiment pas comme les autres. Jusqu'à la dernière minute et au-delà, les spectateurs, comme au théâtre, sont restés figés sur leurs sièges, tant le spectacle était prenant. On se souviendra longtemps de cette saison. Elle a fait miroiter le titre a quatre concurrents, tour à tour pressentis, déçus, remis en selle jusqu'à l'avant-dernière journée. Et au cours de la dernière, la saison a encore fait des siennes en hésitant à satiété pour finalement choisir le dauphin. Cette rencontre pour la deuxième place, a été en soi, tout un programme. Quatre buts de chaque côté et entre-temps un jeu de boule de billard saisissant qui finalement s'échoua dans le trou clubiste mais pas avant d'avoir usé bien des nerfs. Huit buts dans une rencontre aussi serrée, si lourde de causes que cela nous laisse rêveurs tant on s'est habitué dans de telles circonstances au jeu prudent pour ne pas dire cadenassé. Nous n'étions pas aussi habitués de voir, en fin de saison, des équipes non concernées, jouer avec une telle ténacité pour sauvegarder le sérieux d'une compétition. Non habitués non plus de voir autant d'arbitres étrangers officier sur tant de stades pour éviter les suspicions sans pour autant nous convaincre de leur science. Cette journée de dimanche dernier a résumé, en fin de compte, une saison qui trop hésité. Le héros est bien sûr celui dont le nom sera inscrit sur les tablettes. Mais peut-on ignorer le CAB ? On a parlé d'un miracle qui a sauvé le CAB. Mais n'est-ce pas diminuer de son mérite que de trop impliquer le contexte ? Il a suffi que l'Espérance et le Stade Tunisien jouent le jeu. Que l'Etoile devienne champion deux semaines avant pour se déconcentrer et que le CAB ne cède pas au doute et au dépit d'une Coupe perdue. Des situations qui se répètent tous les ans et sous tous les cieux. Mais non habitués à ce phénomène nous avons privilégié le miracle. Miracle ou conjoncture ? Que le sauvetage du CAB est dû à un miracle ou à une conjoncture exceptionnelle, la saison qui vient de s'épuiser aura été d'un suspense digne d'une tragédie. En parvenant à son terme, elle s'est accélérée d'une façon vertigineuse. Son ultime étape a pris la forme d'une violente bourrasque renversant sur son passage les hypothèses les plus sages et privilégiant l'inédit et l'inattendu. Le Club Africain, en 90 minutes, s'est vu éliminé de la prochaine ligue africaine des clubs champions à deux reprises avant d'être remis en selle au moment où on s'attendait le moins. Le CAB, parfait dans sa démarche, a vu ses efforts surhumains laminés par les effets collatéraux de deux rencontres qui se déroulaient à plus de cent kilomètres. L'EOGK s'est vu condamné d'entrée puis ressuscité à la faveur d'un penalty imaginaire avant de tomber dans l'inéluctable par un autre penalty aussi douteux. Pendant longtemps Hammam-Sousse s'était cru à l'abri, quand à quelques secondes de la fin du temps perdu, la foudre lui est tombée sur la tête. A Sousse, le plus compromis dans le désastre, jubilait alors que le champion, battu contre toute attente, fêtait quand même un titre qu'il n'a pas revu depuis une décennie. Les milliers de supporters clubistes, à l'écoute d'une avalanche de buts qui les stupéfiaient, étaient, en fin de championnat, moins aigris. C'est l'USMonastir qui aura accompli les extrêmes cette année. Elle a plané en février avant de se noyer en mai. Pendant ce temps on jouait à La Marsa, à Sfax et à Zarzis, en pensant à la plage sous un ciel devenu subitement gris en quelques heures. On ne pourra pas dire que cette année on n'a pas tout vu.