Par Malek SLIM- Par ces temps de crise tout devient sujet à caution. L'UE vit très mal cette difficile conjoncture d'autant que la plupart de ses pays peinent à trouver la voie du salut pour sortir du marasme. L'opportunité est on ne peut plus propice pour les droites populistes qui n'avaient de cesse de décrier une union qu'elles estiment responsable de tous les problèmes que vivent leurs pays. Aux voix qui s'élevaient depuis longtemps contre la défunte CEE supplantée par l'UE et qui réclamaient la sortie de leurs pays de cette communauté, se sont greffées des prises de position franchement anticommunautaires allant de l'exclusion des « brebis galeuses » de l'UE au renoncement à l'euro en tant monnaie pour aboutir à ses propositions demandant la division de l'UE en deux zones monétaires : une au nord autour de l'Allemagne et qui regroupe les pays aux économies solides et l'autre au sud autour de la France et qui englobe les pays « laxistes », aux économies fragiles, qui sont menacées d'effondrement. De telles positions trouvent leur plein écho parmi des populations qui vivent très mal la crise et croient plus que jamais que les solutions sont plutôt nationales que communautaires. Plus de la moitié des Allemands contestent l'euro et appellent de leur vœu la sortie de leur pays de cette zone qui regroupe seize (devenus 17 le 1er janvier) sur vingt-sept membres de l'Union. Les Britanniques qui ont préféré garder la livre estiment avoir fait le bon choix et demeurent toujours très critiques à l'encontre de la politique monétaire communautaire menée par la BCE. Loin sont donc les temps où l'euphorie unioniste l'emportait sur l'euroscepticisme de certains politiques qui voyaient d'un mauvais œil l'élargissement de la communauté et l'adoption d'une monnaie unique. Par ailleurs, la crise qui a ébranlé les convictions économiques d'hier sur une Europe forte face aux Etats-Unis et à la Chine (puissance montante), a réveillé les démons de la xénophobie et de la haine face à l'étranger même si ce dernier était européen. L'affaire des Roms était révélatrice de ce nouvel état d'esprit qui a gagné même les sphères du pouvoir. La vague d'expulsions dont ces Roms ont fait l'objet illustrait bien cette sorte de repli sur soi, ce qui va à l'encontre de l'esprit même de la volonté de construire une Europe unie et solidaire. Récemment, les autorités allemande et française ont saisi la prochaine présidence hongroise de l'Union de leur opposition d'élargir l'espace Schengen à d'autres pays dont notamment la Roumanie soupçonnée d'enfreindre les règles communautaires en matière d'immigration. La Suisse qui n'est pas membre de l'UE a rejoint début 2010 cet espace qu'on refuse aujourd'hui à Bucarest ! Ce refus constitue en tous les cas un pas en arrière sur la voie de la construction européenne. La volonté politique qui anime les dirigeants de ses différents Etats, n'est plus la même d'il y a quelques années et plus exactement avant 2008, année du déclenchement de la crise. Les divisions au sein de l'UE se font de plus en plus nombreuses et les divergences sur des questions essentielles encore plus fréquentes en dépit des apparences. Une situation qui risque un jour de déboucher sur un échec éclatant qui remettrait tout en cause. Il suffit qu'un des membres influents (l'Allemagne à titre d'exemple) sorte de la zone euro pour que tout l'édifice s'écroule. Une éventualité que beaucoup d'observateurs n'excluent pas. Mais le prix à payer sera très fort pour tous.