Ils ont fait preuve de beaucoup de courage, plus que le mot lui-même ne pourrait en contenir, en acceptant d'emblée d'en payer le prix fort, et le prix fort a été payé. Et c'est à eux seuls que le pays est redevable… Eux, ce sont nos jeunes, dont certains sont tombés sous les balles, d'autres ont essuyé des coups et les pires exactions, la peur au ventre parce que la peur est humaine, mais affrontant cette peur comme on affronte un taureau dans l'arène, avec une seule certitude: c'est qu'ils ne pouvaient plus reculer. Non pas parce qu'une machine aveugle aurait été enclenchée, et qu'ils n'en maîtrisaient plus les rouages, mais parce qu'ils avaient décidé de prendre enfin leur destin en main, de ne plus accepter l'humiliation, et de vivre dignes et libres, dans un pays souverain, dont les pavés ne seraient plus, plus jamais, rougis du sang de ses enfants. Et ils ont eu raison d'espérer, et d'y croire. Maintenant, il s'agit de reconstruire le pays, de remettre les pendules à l'heure, d'empêcher que le chaos ne s'installe et n'ait raison, définitivement, de leur combat juste, pour la dignité. Car il n'y a pas de raison justement, que ce soit toujours les mêmes qui écopent. Qui en payent le prix fort. Il n'y a pas de raison que Mohamed Bouazizi se soit immolé pour rien ; torche vivante qui continuera à nous brûler le cœur, en nos âmes et conscience, lui, et puis d'autres après lui qui ont pris le relais, pour se battre pour nous. Pour nos enfants qui connaîtront, on l'espère, un destin meilleur parce que eux, auront eu plus de courage que nous, et qu'ils nous ont relevé la tête quand nos yeux ont désappris à regarder le ciel et la marche du monde. C'est notre jeunesse qui a réinventé le futur pour nous, et il ne faut surtout pas que tout cela aille à vau-l'eau. Avec les amalgames, et l'envie d'en découdre à tort et à travers. Quand on lutte pour sa liberté enfin retrouvée, il ne faut pas minimiser le prix du sang versé, et respecter le fait que l'humain en nous, doive prendre le dessus, pour ne pas truquer les dés, et se retrouver à son tour bourreau parmi les bourreaux, quand la lutte est juste et la cause défendue autrement légitime. Notre jeunesse nous honore et nous nous inclinons. Chapeau bas ! Et c'est parce qu'elle nous honore cette jeunesse, c'est parce qu'elle nous en bouche un coin, que nous formons le vœu, de toute notre âme, que personne n'ait l'outrecuidance de récupérer ce combat juste et fier pour la liberté. Alors, foin de tous les extrémismes, quels qu'ils soient, et nul ne pourra truquer les dès pour souiller la mémoire de ceux qui ont accepté de se sacrifier, pour que nos enfants, et les enfants de nos petits-enfants, puissent vivre libres et égaux, sous un drapeau qui ne fera allégeance à aucun fondamentalisme, qu'il s'avance masqué, ou se dévoile au grand jour. Notre jeunesse nous honore, il faut qu'à notre tour nous en soyons dignes… Et la dignité se mesure à l'aune des compromis et des compromissions que nous refuserons de toute façon.