Le Conseil de l'Association des Magistrats Tunisiens ( AMT) qui s'est tenu à Sfax n'a pas manqué de stigmatiser ce qu'il considère comme étant des « manœuvres », voire même, un complot ourdi par le gouvernement provisoire et plus particulièrement le ministère de la Justice, n'hésitant pas à dénoncer la trame destinée à mettre en péril l'unité du corps de la magistrature et à contrecarrer ses aspirations et sa détermination à asseoir son indépendance et par là-même, « consacrer dans les faits le rêve très cher aux Tunisiens d'avoir des magistrats autonomes et une justice équitable. », comme l'a souligné le juge Iadh Chaouachi. Il est fait grief au gouvernement provisoire et plus particulièrement au ministère de la Justice, de « faire obstacle aux revendications des magistrats concernant la nécessité de l'assainissement de la magistrature ainsi que l'éradication des symboles de la corruption et de la malversation au sein des hautes instances judiciaires et du ministère de la Justice. », dénonce le magistrat Faouzi Maâlaoui. Abondant déjà dans ce sens, M. Ahmed Rahmouni, président de l'Association des magistrats tunisiens (AMT) a présenté un argumentaire assez fourni, pour étayer la thèse du complot. Il a cité, à ce propos, notamment, l'encouragement de la création d'un syndicat des magistrats et son association à l'Instance Supérieure Indépendante pour les Elections dans le but de contrer l'AMT, critiquant à ce propos la dénaturation des dispositions de l'article 8 du projet de décret-loi fixant la composition de cette instance lequel décret autorise la Haute Instance pour la Réalisation des Objectifs de la Révolution, la réforme Politique et la Transition Démocratique à choisir trois membres parmi les six candidats proposés par le Syndicat des Magistrats Tunisiens et l'Association des Magistrats Tunisiens (AMT). Il a par la même occasion contesté la parité décrétée entre les candidats parmi les magistrats du Tribunal Administratif, à la Cour des Comptes d'une part, et les magistrats de troisième grade ,une catégorie minoritaire, relevant de l'ordre judiciaire : « une façon claire d'exclure la majorité des magistrats, y compris ceux du bureau exécutif, dont la totalité des membres n'appartiennent pas à ce grade. » A la fin des ses travaux, le conseil national de l'Association des Magistrats Tunisiens, à Sfax a élaboré une motion dans laquelle les participants dénoncent avec vigueur la dénaturation délibérée de l'article 8 du décret-loi relatif à l'Instance Supérieure Indépendante des Elections en raison de l'atteinte portée à sa neutralité et à son indépendance et décident la suspension de l'appartenance de l'Association des Magistrats Tunisiens à la Haute Instance pour la Réalisation des Objectifs de la Révolution, la Réforme Politique et la Transition Démocratique, pour la période d'une semaine, tout en agitant la menace de la démission au cas où un correctif dudit décret ne serait pas publié. Le texte de la motion, outre l'appel à l'impérieuse nécessité d'extirper les symboles de la corruption du ministère de la Justice et à l'élection des conseils supérieurs provisoires qui auront la charge de la gestion judiciaire, désapprouvent avec vigueur les dispositions de l'article 17 du décret n° 14-2011, du 23 mars 2011 relatif à l'organisation provisoire des autorités publiques. Il conviendrait de signaler également que la motion des magistrats comporte entre autres un préavis de grève générale pour le 5 mai 2011dans tous les tribunaux ainsi qu'un appel à tous les magistrats les exhortant à se rassembler le samedi 14 mai, au matin devant le ministère de la Justice.