Il existe en Tunisie 1500 cas de VIH-SIDA, récences auprès des différentes composantes de la société, hommes, femmes, utilisateurs de drogues injectables, hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, travailleuses de sexe… selon les statistiques de l'an 2010. Ce chiffre n'est pas a priori alarmant, sachant que la prévalence de la maladie est de 0,01 %. Toutefois, la prévalence calculée sur l'estimation devient plus importante, car elle se multiplie par trois, soit, 0,03 %. Ce sont les cas non déclarés et/ou non détectés qui font que le VIH-SIDA représente plus de risque sur la population tunisienne, essentiellement celle ayant un comportement à risque (rapports sexuels non protégés, drogues injectables…). Au-delà des chiffres, le travail de la Société civile, du ministère de la Santé publique et des Organisations internationales, dont le Fonds Mondial de Lutte contre le SIDA, la Tuberculose et le Paludisme touche autres aspects, dont la prise en charge des personnes vivant avec le VIH (PVVIH), la prévention de la transmission du virus, le dépistage, et la mobilisation de plusieurs acteurs de la société…Ces points ont fait d'ailleurs, l'objet de la 1ère table ronde des cercles de la population et de la santé de la reproduction organisée hier, par l'Office National de la Famille et de la Population (ONFP) à son siège. Un sujet toujours d'actualité, la lutte contre le VIH-SIDA, la lutte contre la stigmatisation des PVVIH et la sensibilisation par rapport aux risques de sa transmission préoccupent les acteurs dans le domaine. Ils considèrent que beaucoup reste à faire en la matière. Dépistage anonyme Le professeur Ridha Kamoun, président de l'ATL-MST-SIDA, section Tunis parle des priorités sur lesquelles il faut mettre l'accent, dont la promotion des centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) toujours méconnus auprès des jeunes et des adultes. A rappeler dans ce cadre que nous comptons 25 centres dans 18 gouvernorats. « Nous n'avons pas toutefois, atteint notre rythme de croisière en la matière », déclare M. Khaled Kheireddine, coordinateur du programme de Coopération avec le Fonds Mondial de Lutte contre le SIDA, la Tuberculose et le Paludisme en Tunisie. Autres lacunes sont également à noter comme l'accès des populations à haut risque (Hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, utilisateurs de drogues injectables, travailleuses de sexe) à des services adaptés. Il s'agit d'ailleurs de l'une des priorités qui doivent figurer dans les plans d'intervention arrêtés par les autorités et ce en plus de « la lutte contre la stigmatisation et la discrimination ». Accompagnement Ce n'est pas tout, il est toujours essentiel d'améliorer l'accompagnement des malades au niveau de la prise en charge médicale sans oublier « l'amélioration de l'accessibilité au préservatif » et de le rendre surtout « acceptable ». D'ailleurs, la prochaine stratégie nationale qui sera fin prête dans un mois, et qui sera présentée au Fonds Mondial de Lutte contre le SIDA, la Tuberculose et le Paludisme pour la période (2012-2016) sera basée sur deux axes entre autres, « la promotion du préservatif », annonce M. Kheireddine signalent que «nous sommes loin de cet objectif ». « Une stratégie sera élaborée pour avoir l'appui du ministère par rapport à cet axe tout en impliquant le secteur privé qui doit avoir sa place », ajoute le coordinateur du programme. Objectif : « rendre le préservatif à la disposition de tout le monde ». M. Kheireddine met aussi l'accent sur la lutte contre la stigmatisation. La nouvelle Tunisie doit prendre en considération ce point pour assurer les mêmes conditions de vie à tous les citoyens. Il faut garantir les droits humains de cette population victime même d'exclusion et de discrimination sociale. Il s'agit d'ailleurs « des obstacles majeurs à la réalisation de l'accès universel au traitement », selon M. Lassaad Soua, du groupe thématique des Nations Unies en Tunisie sur le VIH SIDA. Un travail de longue haleine, la lutte contre le VIH-SIDA implique l'engagement des acteurs de la société civile ainsi que les autorités concernées. C'est aussi une question de conscience personnelle. Réduire les risques de transmission du virus en adoptant un comportement correct relève de la responsabilité des individus toutes franges sociales confondues. Sana FARHAT
Pr Ridha Kamoun, président de l'ATL-MST-SIDA, section de Tunis «Après le 14 janvier, le travail est plus difficile» Améliorer l'accessibilité au préservatif pour le rendre acceptable, le banaliser auprès des adultes et des jeunes ayant des rapports sexuels non protégés, c'est l'un des objectifs de la société civile et du ministère de la Santé publique. Il s'agit certes d'un grand travail à effectuer pour mieux protéger les individus contre les risques de transmission du VIH. Mais, cette orientation se voit-elle menacée par la montée du phénomène du Salafisme, incapables d'accepter l'autre, ses idées et surtout sa différence ? Après les événements qui se sont produits le weekend dernier à la salle du cinéma AfricArt suite à la projection du film de la réalisatrice Nadia Fani, « Ni Allah, Ni Maître », le travail de la société civile dans le domaine de sensibilisation et de l'information sur les risques des rapports sexuels non protégés s'annonce plus ardu et compliqué. Ces acteurs habitués à distribuer des préservatifs dans les grandes manifestations et dans les espaces publics lors des campagnes de sensibilisation tout en incitant les jeunes à se protéger lors des rapports sexuels risqueraient de leur côté d'être victimes de violence. Pouvons-nous dire que la donne a changé et que le travail sera plus risqué ? En fait « la situation est plus dure », répond le Pr Ridha Kamoun, président de l'ATL-MST-SIDA, section de Tunis. «Après le 14 janvier, le travail sera plus difficile, et nous en sommes conscients », ajoute-t-il. Reste, « il faut savoir prendre le risque », ajoute le Pr Kamoun tout en parlant de la liberté d'expression mais « sans violence ». « Ils ont leurs raisons, nous les tolérons et nous essayons de les convaincre par notre travail si c'est possible ». S.F
Et la sensibilisation des réfugiés à Ras Jedir ? Nul ne peut nier que la sensibilisation des réfugiés à Ras Jedir quant aux risques de la transmission du VIH fait défaut. En fait, le Croissant Rouge Tunisien a eu de vraies difficultés pour mener des actions de sensibilisation et d'information dans le camp « surtout au début de l'accueil de cette masse de réfugiés ». Actuellement, « une stratégie est en train d'être préparée pour focaliser sur la prévention, l'information et la sensibilisation de cette population », annonce une représentante de Croissant Rouge Tunisien lors du débat.