• Formation d'une armée nationale Le Temps-Agences- Les nouveaux dirigeants en Libye, cherchant à asseoir leur pouvoir, ont annoncé leur installation prochaine à Tripoli et la formation d'une armée nationale, même si le leader déchu Mouammar Kadhafi reste en fuite et ses forces continuent de résister dans quelques bastions. Hier, un émissaire spécial du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, Ian Martin, est arrivé à Tripoli pour s'enquérir des besoins du Conseil national de transition (CNT), issu de la rébellion, afin de l'aider à rétablir la stabilité et la sécurité en Libye. Reconnu comme représentant légitime du peuple libyen par plus d'une soixantaine de pays, le CNT vient aussi d'être invité à Moscou par le gouvernement russe qui a finalement lâché son allié de longue date Mouammar Khadafi. Ils doivent parler d'énergie alors que la Libye, principale réserve de pétrole d'Afrique et quatrième producteur du continent, s'emploie à retrouver sa capacité de production, d'environ 1,7 million de barils par jour avant le conflit déclenché le 15 février par une révolte contre le pouvoir de Kadhafi. Cherchant parallèlement à rétablir l'ordre et à reconstruire le pays ravagé par la guerre civile, le CNT, qui doit recevoir 15 milliards de dollars débloqués par les grandes puissances, a annoncé qu'il s'installerait "la semaine prochaine" à Tripoli, après avoir siégé à Benghazi (est). Il a aussi demandé à ses combattants venus de province et encore présents dans Tripoli de rentrer chez eux, assurant que ceux de la capitale étaient désormais en mesure de la protéger, avec l'aide des forces de sécurité et des policiers. Le responsable des affaires militaires au sein du CNT, Omar Al-Hariri, a de son côté indiqué que l'armée nationale libyenne était en train d'être reconstruite en tant que principal garant de la sécurité dans le pays. "Nous avons commencé la création d'une nouvelle armée nationale pour protéger la démocratie, les institutions et les civils innocents", a-t-il affirmé. "Nous voulons prouver au monde (...) que nous sommes très capables de reconstruire notre pays", a indiqué un autre responsable Abdel Razaq Moukhtar. Sur le plan politique, le représentant du CNT au Royaume-Uni, Guma Al-Gamaty, a évoqué un calendrier pour la transition prévoyant des élections générales dans 20 mois. "Durant huit mois, le CNT dirigera la Libye avant qu'une assemblée élue par le peuple" ne prenne les commandes du pays pour rédiger une Constitution, et "au bout d'un an, des élections seront organisées", a-t-il dit à la BBC. La transition peut commencer parce que Kadhafi "se cache, il est isolé". C'est "seulement une question de temps avant qu'il ne soit arrêté, à moins qu'il ne soit tué s'il résiste", selon lui. La communauté internationale et le nouveau régime qui contrôle la majeure partie de Libye estiment que le conflit sera vraiment terminé avec la capture de l'ex-homme fort du pays, qui reste introuvable et veut toujours se battre. Paris, Londres et l'Otan ont affirmé que les opérations militaires internationales se poursuivraient tant que Kadhafi représenterait une menace. L'Otan a d'ailleurs déjà annoncé des frappes contre les environs de Syrte, à 360 km à l'Est de Tripoli et de Bani Walid, plus au Sud, deux des derniers bastions pro-Kadhafi. Hier, quelque 200 véhicules de combat pro-CNT ont avancé en direction de Bani Walid, où pourraient se cacher Mouammar Kadhafi et certains de ses fils, sans que des batailles ne se déroulent pour le moment. Face à un début de retour à la normale, les investisseurs étrangers ont été invités à revenir en Libye. "Leurs investissements sont encore là et nous respectons les contrats passés", a affirmé le "ministre" de l'Economie du CNT, Abdallah Shamiyya. Autre signe de normalisation, les banques ont rouvert et aucun tir d'armes n'a été entendu hier matin à Tripoli, où certains barrages ont été démantelés et la circulation a repris avec de nombreux embouteillages. Certains commerces ont rouvert, et les queues s'allongeaint devant les boulangeries. Lors de la grande conférence internationale à Paris, l'ONU et les grandes puissances ont débloqué les 15 milliards USD d'avoirs libyens gelés au CNT, contre la promesse d'une transition démocratique et d'une réconciliation nationale. Et en échange de ce soutien, les Etats-Unis ont aussi demandé aux nouveaux dirigeants de "combattre l'extrémisme". "Dire qu'il y a des extrémistes armés en Libye, c'est répéter ce que Kadhafi disait", a répliqué le "ministre" de l'Intérieur du CNT, Ahmed Darrat. Les services britanniques et US coopéraient avec Kadhafi ! Américains et Britanniques ont coopéré étroitement dans les années 2000 avec les services de renseignement du colonel Mouammar Kadhafi, la CIA allant jusqu'à livrer des prisonniers au régime libyen pour interrogatoire, ont rapporté hier des journaux. L'Independent britannique et deux quotidiens américains, le Wall Street Journal WSJ et le New York Times, citent des archives découvertes dans un immeuble des services secrets libyens à Tripoli par l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW). Sous l'administration de l'ancien président George W. Bush, la CIA a livré de présumés terroristes au régime du colonel Kadhafi en suggérant les questions que les Libyens devaient leur poser, rapporte le WSJ en citant des documents découverts au siège de l'agence de la sécurité extérieure libyenne. En 2004, la CIA avait même établi "une présence permanente" en Libye, selon une note d'un haut responsable de l'agence américaine, Stephen Kappes, adressée au chef des services secrets libyens de l'époque, Moussa Koussa. Selon le New York Times, la CIA a envoyé au moins à huit reprises des suspects de terrorisme en Libye pour qu'ils y soient interrogés.