La corruption fait la une des journaux. Tout le monde en parle et pourtant elle est plus prospère que jamais. « La corruption est bien ancrée dans les rouages de l'Etat. Et on étudiera la possibilité de lancer un Conseil national de la corruption et de la malversation qui s'attèlera à ces deux faits devenus monnaie courante dans nos entreprises publiques. » commente Abdelfattah Amor, le président de la Commission nationale d'investigation sur les affaires de corruption et de malversations (CICM), lors de la conférence de presse tenue, hier matin, pour exposer les grands traits d'un séminaire qui sera organisé autour de la thématique « La corruption et la malversation, comment y faire face ? » « On n'a pas reçu un seul sou des entreprises privées. Nous sommes une commission qui mène une guerre contre la corruption, on ne va pas se donner les moyens de tomber dans son piège » commente Ridha Gouia universitaire et membre de la CICM. Une idée confirmée par Abdelfattah Amor qui a signalé que la commission qu'il pilote n'a pas de ressources financières et que pour l'organisation de ce séminaire qui se tiendra entre le 22 et le 24 septembre, la CICM a compté sur le bon vouloir d'organismes de la trempe de la « Délégation de l'Union européenne en Tunisie », « le groupe de la Banque africaine de développement », le PNUD et la « Hans Seidel Foundation », etc. « La conférence a trait au programme du séminaire qu'on exposera sans pour autant répondre à d'autres questionnement en dehors de cette manifestation. » annonce-t-on dès le début de la rencontre médiatique. Et devant l'insistance d'un journaliste qui demande à ce que la CICM fixe des critères clairs en fonction desquels elle opte pour une affaire et non pas pour une autre, Me Imed Belkhamssa, qui trouve redondante la question, y répond par le fait que « la commission ne traite que des affaires qui relèvent de sa compétence » Abdelfattah Amor qui s'est absenté au début de la conférence pour presque une heure, a rejoint ses coéquipiers pour annoncer, dans la foulée, que la CICM a étudié quasiment 4500 dossiers. On ne prendra pas au mot Ridha Gouia, qui en l'absence de Abdelfattah Amor a déclaré aux journalistes que la commission a étudié au-delà de 3000 dossiers. « Dire la vérité » Pour ce qui est du séminaire, on apprend que celui-ci, réunira des experts nationaux et internationaux et qu'il traitera de six thèmes qui permettraient « d'établir des mécanismes de lutte et de prévention », « rendre justice », « modifier la législation », « impliquer la société civile », « le recouvrement des avoirs mal acquis » et surtout de « dire la vérité ». Pour ce dernier élément, il s'agit, en effet, et selon la CICM d' « informer et communiquer autour de la lutte contre la corruption, de définir les mécanismes d'échange d'informations. » Toujours selon la CICM cela passe « par la conception des politiques futures de prévention de la corruption et la malversation au cours de cette période historique de la Tunisie. Le dialogue et la coordination avec les différents représentants des secteurs, public te privé et la société civile s'avère indispensable… » La corruption comment y faire face ? Pour revenir à la question objet de ce séminaire il y a lieu de remarquer qu'il faudrait commencer par dénoncer ce fléau. Et c'est là que le bât blesse car un journaliste qui souhaite révéler des faits de ce genre n'a pas encore la possibilité d'obliger ses interlocuteurs de « dire la vérité » au regard de la loi, qui reste jusque-là silencieuse à ce sujet. Et c'est valable pour Abdelfattah Amor et son équipe d'experts ayant planché depuis la Révolution sur des affaires insidieuses liées à la corruption et la malversation et qui continuent jusque-là à travailler mais aussi à rester fidèle à la formule qui dit « motus bouche cousue ». En espérant que la CICM devienne plus loquace vis-à-vis des médias qui le souhaitent, on essayera encore de se faire à la politique du « on ne vous dit rien on vous cache tout » qui continue à battre son plein … Tout comme la langue de bois qui a encore devant elle du temps pour qu'elle soit irradiée de notre vocabulaire. Une bonne fois pour toute. Ne fallait-il pas, en ce sens, commencer par la corruption des idées ?