Le secteur des transports fut sujet à toutes les magouilles, les malversations et les pots de vin. Pendant de longues années, ce secteur a été la cible préférée des gendres du président déchu. On ne peut dénombrer à cette occasion les multiples combines dans lesquelles ont plongé les membres du 'clan' de Ben Ali dans ce secteur des transports. Mais depuis le 14 janvier, on ne cesse de révéler ce qui s'était vraiment passé et les dessous mafieux de sortir au grand jour, dont la dernière en date concerne l'affaire des bus MAN. Une affaire qui, depuis un moment, fait jour et dont les ramifications se manifestent l'une après l'autre. Le constructeur de ces bus, qui n'est autre que le concessionnaire Alpha Ford, s'est trouvé dans le collimateur du ministère des Transports qui a porté plainte contre cette maison, en essayant de convaincre l'opinion publique que les pertes humaines causées suite à des accidents de route, sont à l'origine la faute de ce constructeur. Salem Miledi, ministre actuel du Transport est allé encore plus loin en pointant du doigt le constructeur allemand MAN, (lors de l'interview qu'il nous a accordée et qui a été publiée sur nos colonnes le 12 octobre dernier). Sauf que ce dernier pourrait être impliqué dans une autre affaire. Un chèque signé par l'ancien directeur général de la Planification peut en dire plus long sur cette affaire, qui reste à suivre, et à un défaut de construction. Explication de Salem Miledi :"La voiture de mon fils, je l'ai payée deux fois" L'histoire telle qu'elle nous a été relatée par Salem Miledi lui-même, remonte à l'été de 2010, date à laquelle Omar, le fils de l'actuel ministre avait décroché son certificat du baccalauréat. Salem Miledi nous déclare ceci : "je connais Hamadi Touil (ancien patron d'Alpha Bus et partenaire de Belhassen Trabelsi, en fuite actuellement en France ndlr), avant même qu'il ne devienne partenaire de Belhassen Trabelsi. Un jour il était venu rencontrer l'ancien ministre Abderrahim Zouari, et comme ce dernier était occupé, il est venu dans mon bureau. Mon fils ayant réussi l'examen national, je voulais le récompenser en lui achetant une voiture de la marque KIA. Une bagnole pour laquelle on m'avait proposé un bon prix. Ceci remonte au mois d'octobre ou novembre 2010. Je ne pouvais qu'acheter cette voiture dont le prix oscillait autour de 13 mille dinars". Hamadi Touil avait proposé d'acheter une voiture chez lui (Maison Ford), mais l'actuel ministre jugeait "que les voitures que son ami Hamadi Touil avait proposé étaient trop chères, alors il m'a suggéré une autre d'occasion. Je lui avait dit que si le prix était bon, je l'achèterais". Selon lui, "Hamadi Touil m'avait précisé que ces voitures sont amorties puisqu'elles ont parcouru 120 mille kilomètres et âgée de 5 ans". Salem Miledi nous précise dans la foulée que Yassin Ibrahim, ancien ministre de Transport et actuellement chef d'un parti politique avait entendu parler de ce sujet, mais avait agi comme si de rien n'était. "Je n'avais même pas vu le contrat de vente de cette voiture, car c'était mon fils qui l'avait signé. J'avais payé huit mille dinars en espèces, comme me l'avait demandé Hamadi Touil", précise encore le ministre du Transport, et il ajoute que "peut être parce qu'il ne voulait pas les déclarer aux services fiscaux". Nous avons demandé à Salem Miledi pourquoi cette voiture a été payée après la date du 14 janvier, par le biais de chèques signés respectivement le 28 janvier 2011, et le 28 février 2011. "Les responsables d'Alpha Ford m'ont appelé après le 14 janvier pour m'informer que la voiture que j'ai achetée n'était pas payée. La responsable qui m'avait appelé m'avait dit que Hamadi Touil avait beaucoup de dossiers pareils, qu'il n'avait pas régularisés. Je lui ai demandé si je devais payer encore une fois la même voiture, la responsable m'avait répondu que je devrais remercier Dieu, car d'autres avaient acheté des véhicules à des centaines de milliers de dinars. La même responsable m'a expliqué que des remises sur les prix avaient été opérées avant de classer les dossiers de ces voitures. J'ai ainsi contacté mon avocat qui m'a conseillé de ne rien payer. Mais je me suis dit par la suite que de part ma position en tant que Directeur Général au sein d'un ministère et afin d'éviter qu'on porte plainte contre moi, j'ai décidé de signer ces deux chèques". "Mon tort est d'avoir acheté une voiture d'occasion", réplique encore l'actuel ministre du Transport. Qui a tort ? Selon Salem Miledi, Yassine Ibrahim l'ancien ministre du Transport avait pris connaissance de cette affaire, mais il n'a pas bougé le petit doigt. On se demande ainsi pourquoi est-ce-que Yassine Ibrahim avait complètement ignoré cette affaire, alors qu'il avait immédiatement licencié un bon nombre d'anciens directeurs généraux du ministère du Transport sans raisons apparentes et logiques ? On se demande aussi pourquoi aucune investigation n'a été menée concernant cette affaire de Salem Miledi avant qu'elle ne soit portée devant la justice? On se demande aussi de quel droit Yassine Ibrahim, que nous avons essayé de joindre par téléphone, par sms ainsi qu'à travers sa directrice de communication, n'a pas été à son tour entendu sur pas mal d'affaires qui ont surgi après qu'il eût quitté son poste de ministre pour s'engager dans une carrière politique ? Selon certains cadres du ministère du Transport, Yassine Ibrahim devrait répondre sur certains points, dont notamment celui d'avoir attribué l'organisation d'une conférence sur la logistique à la même agence de communication qui régit la communication du parti politique dont il est le secrétaire général ? Ceci sans occulter ce point précis concernant son chef de cabinet Khaled Soudani, qui, dit-on, percevait son salaire en Euro et qui aurait dû rembourser les billets d'avion gratuits Tunis- Paris quelque temps après que son recruteur Yassine Ibrahim eût démissionné de son poste à la tête du ministère ? Beaucoup de questions qui demeurent sans réponse.