• Les cambrioleurs à l'ombre : 17 vols reconnus. • Le butin, estimé à cent cinquante mille dinars, en grande partie, récupérés. • Le bijoutier attaqué : « Je m'estime heureux d'être encore en vie !» Enquête de Larbi DEROUICHE - Beau coup de filet réussi de mains de maître d'une manière spectaculaire par les entreprenants hommes de la Brigade criminelle d'El Gorjani (Tunis). Pas plus de dix heures après le hold-up perpétré contre la grande bijouterie de Hammamet, la bande à Hammouche, au nombre total de trois éléments, devait être cueillie un à un par les troupes de la criminelle et soumise à un long interrogatoire. Les cambrioleurs ont tôt fait de tout dire sur le sort du butin, récupéré dans son ensemble par la police. Il est estimé aux environs de la rondelette somme de cent cinquante mille dinars, valeur globale des bijoux et ornements raflés par les chenapans. Ce butin, a, au grand bonheur du bijoutier dévalisé, immédiatement récupéré dans sa quasi-totalité. Maintenant un zoom sur les détails des faits, sans plus tarder. Encagoulés… en coup de vent… Le fâcheux incident remonte à lundi dernier. A 18 heures 30, deux éléments de la bande incriminée font brusquement irruption dans la bijouterie en question, située dans une zone centrale à Hammamet. A visages masqués par des cagoules, le trio fait vite de baisser les rideaux métalliques du magasin, avant de ligoter et bâillonner « soigneusement » le commerçant, à l'aide d'un solide scotch pour emballage. En un rien de temps, les malfrats raflent argent et ornements, laissant comptoir et vitrines, contenant sans contenu et les lieux sens dessus-dessous… Au trot… au galop ! Après coup, les filous mettent les jambes aux cous… Et c'est l'alerte générale… Au trot… au galop ! Aux trousses du trio... Tout le monde policier s'y met pour de bon, du grand Tunis… au petit Cap-Bon… pour mériter les galons…De bonne guerre… évidement… Au ministère de l'Intérieur, c'est la veillée d'armes. Tout le monde concerné ne dort pas la nuit et attend dans l'angoisse, l'heureux dénouement d'une retentissante affaire, venue au bon et mauvais moment, gâcher à contretemps les joyeuses réceptions des nouveaux maîtres de l'institution. Le bon filon… des chiffres et des noms… L'on n'a pas ainsi mis longtemps pour avoir le bon filon. Un numéro d'immatriculation, a été, nous dit-on, suffisant pour coincer et arrêter la course des chenapans…Un numéro porté par une voiture Peugeot 206 grise, utilisée par la bande pour fuir les lieux du hold-up… En joignant aussitôt le propriétaire du tacot, il s'est avéré que celui-ci avait loué ledit véhicule depuis un mois au big boss de la bande, à titre clandestin. Un tuyau en or, ayant déblayé la route vers…le trésor ! Ainsi, comme déjà dit, 10 heures après l'audacieux hold-up, soit mardi dernier, à dix heures du matin, les trois filous sont sous les verrous. Aveux complets, au présent et… au passé… A l'interrogatoire, les aventuriers ont fini par passer aux aveux complets et reconnaître les faits tels que, plus haut, racontés. En poussant les investigations avec les intéressés, la police judiciaire a pu déchiffrer l'énigme de bien d'autres affaires n'ayant pas livré leurs secrets depuis des années. Au fil des investigations, les intéressés ont fourni d'amples indications, sur les circonstances d'exécution de pas moins de dix-sept opérations, un peu partout, à Tunis et au Cap-Bon. Nous avons, d'autre part, tenu à entrer en contact avec le malchanceux ou chanceux bijoutier, M.Hamadi. Celui-ci nous a semblé, a priori, durement secoué par ce qu'il venait d'endurer. A témoin, son refus d'emblée de ne rien témoigner, nous invitant à nous contenter des éléments recueillis auprès des policiers concernés. Mais, petit à petit, nous lui avons provoqué l'appétit de nous livrer des non-dits. A moitié dans les vaps … à moitié conscient… « Alors que je m'apprêtais à fermer la boutique, un homme en cagoule investit les lieux. Il commence par m'injecter sur la figure du gaz paralysant le mouvement », nous confie-t-il. Ce qui m'a, du coup, mis par terre. On en a profité pour me rouer impitoyablement de coups ! A ce moment, on m'a fait rouler du scotch à emballage autour du corps. J'étais à moitié dans les vapes… et à moitié conscient. Deux autres bonshommes ont ensuite fait irruption. Les trois individus se sont mis à ramasser les bijoux exposés dans la vitrine et aux alentours du comptoir. Après quoi, ils se sont empressés de s'emparer d'un coffret, croyant q u'il contenait quelque chose de précieux. Et ils ne savaient pas qu'ils venaient, ce faisant, d'actionner l'alarme contenu dans ce coffret. Sitôt le signal d'alarme déclenché, les trois hommes prennent la poudre d'escampette, mettant en vain à leurs trousses de nombreux piétons, circulant dans les parages. L'opération aurait, selon la victime, duré quelque vingt minutes, en tout et pour tout, entre l'entrée et la sortie de la bande. « Je reviens de loin, enchaîne-t-il. Je m'estime heureux d'être encore en vie ». Un bravo mérité pour nos policiers Notre interlocuteur nous indique qu'en plus des bijoux emportés, les auteurs du hold-up se sont sauvés avec tout le contenu de la caisse, soit la somme de mille sept cent dinars. Au sujet du butin récupéré, le bijoutier précise qu'il n'a pas récupéré tous ses biens volés. Il espère ne pas tarder à le faire. A la fin de la conversation, l'intéressé nous prie de transmettre noir sur blanc sa reconnaissance et ses félicitations pour la Brigade Criminelle d'El Gorjani (Tunis) et la police de Hammamet. Dont acte, oncle Hamadi. Police en compétition… Tenez à propos, certains téléspectateurs se seraient, quelque peu étonnés du rectif fait, mercredi dernier, à la fin du téléjournal de notre nationale Une. Il est précisé dans l'additif, que la réussite sensationnelle revient à la Brigade Criminelle d'El Gorjani, au lieu de la police de Hammamet, comme annoncé au début des informations télévisées. Oui, sachons qu'à la police, les différentes unités sont en constante compétition, dans la loyauté, bien sûr. Et chaque groupe cherche à être le premier à gagner le mérite et les compliments. C'est, en quelque sorte comme chez nous, à la presse, chaque organe et chaque journaliste au sein de la même équipe rédactionnelle, s'activent à qui mieux mieux derrière l'exclusivité. C'est de bonne guerre, dans un esprit d'émulation et dans les règles du métier.