Depuis la promulgation du décret-loi portant indemnisation des familles des martyrs et des blessés de la Révolution le 24 octobre 2011, bien de l'eau a coulé sous les ponts, sans qu'il y ait eu du concret en la matière, du moins d'après ce qu'affirment les ayants droit. Ces derniers soutiennent en effet qu'aucune parmi les victimes ou leurs familles n'ont été indemnisées. Ils sont du reste résolus à intenter une procédure en Justice en vue de réclamer des indemnités au titre de réparation des préjudices, tant sur le plan corporel que sur le plan moral, et ce abstraction faite des indemnisations qui seront allouées par l'Etat en vertu dudit décret-loi. Qu'en est-il au juste ? Les martyrs et les blessés de la Révolution sont, en vertu de l'article 6 du décret-loi précité : « Toutes les personnes qui ont risqué leurs vies pour la révolution et qui sont décédées ou ont été victimes de préjudice corporel leur causant une infirmité dans la période allant du 17 décembre 2010 au 19 février 2011 » Il est stipulé en outre, qu'il est créé une commission AD HOC, relevant du comité supérieur des droits de l'Homme et composée du président du comité des droits de l'Homme, en l'occurrence le Premier ministre, et de 8 membres désignés par les ministères de la Défense nationale, de l'Intérieur et des Affaires sociales, et un représentant de la Ligue tunisienne des Droits de l'Homme, et dont le rôle est de décider de l'octroi des indemnités et de leurs quantum, en fonction du préjudice. Des avantages sont également accordés aux familles de martyrs et des blessés, tels que la pension versée au conjoint des martyrs ou leurs héritiers, la gratuité des soins et des transports publics pour ceux qui ont été victimes d'une incapacité physique permanente. Critère de l'évaluation du préjudice Une commission technique, créée au sein du ministère des Affaires sociales, est chargée en vertu des articles 7 et 8 du décret-loi, de fixer le taux d'incapacité en fonction, et d'évaluer les préjudices concernant les familles des martyrs. Cette évaluation est nécessaire pour fixer les indemnités qui seront allouées aux blessés ou aux familles des martyrs. L'action contentieuse Nonobstant l'octroi de telles indemnités par la commission visée par le décret-loi, une action en réparation des préjudices, par les victimes ou les familles des martyrs, devant les tribunaux reste toujours possible en vertu de l'article 11 du décret-loi, où il est stipulé que dans ce cas, le juge prendra en considération les indemnités qui auront été déjà versées à l'intéressé , sachant que les pensions et indemnités versées à ce titre par la CNRPS sont imputées au budget de l'Etat. Logique, s'agissant en l'occurrence de la responsabilité de l'Etat. Quid sur le plan pénal ? Actuellement, le tribunal militaire permanent de Tunis, connaît pour la première depuis sa création, d'une affaire où d'anciens membres de l'Etat sont personnellement poursuivis pour homicide volontaire et violence graves. C'est l'affaire connue sous le nom de « l'affaire des blessés, et martyrs de la Révolution. » Les victimes et les familles des martyrs sont-elles tout à fait à même de demander réparation aux accusés en se constituant partie civile ? Sur le principe les ayants droit peuvent attaquer l'Etat qui est plus solvable, les accusés étant d'anciens commis de l'Etat. Mais en l'occurrence, il s'agit d'un cas particulier, où un nouvel Etat qui a prévu les indemnisations par un décret-loi. Rien n'empêche les victimes de demander également au tribunal militaire d'obliger les accusés eux-mêmes à leur verser des indemnités à titre de réparation des préjudices énormes qu'ils ont subis. Un seule question cependant : Ces accusés sont-ils solvables ? no comment.