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Les nouvelles lignes de la répression
Médias - Etat des lieux, un an après la Révolution
Publié dans Le Temps le 09 - 02 - 2012

• Le rapport de “Journalistes sans frontières” met en exergue la polémique déjà forte sur «les rapports entre liberté d'expression et religion»
De notre correspondant permanent à Paris Zine Elabdine Hamada - A l'occasion du premier anniversaire de la révolution tunisienne, Reporters sans frontières (RSF) a publié un rapport spécial où l'organisation dresse un bilan de l'évolution du secteur médiatique en Tunisie. Pour RSF, la Tunisie semble revêtir une importance à double titre.
C'est le pays qui a déclenché le Printemps arabe et la libération de la liberté d'informer et c'est le premier pays arabe qui lui permet de s'y installer pour observer et accompagner les transformations à l'œuvre dans le paysage médiatique tunisien et dans la région arabe.
Publié le 24 janvier 2012, ce rapport fait le tour des questions qui ont agité le paysage médiatique tunisien depuis janvier 2011. Il exprime les convictions de l'organisation quant à la garantie d'une mise en place d'un système médiatique libre et indépendant.
L'organisation recommande « la nécessité d'un cadre juridique solide », et met l'accent sur l'idée que « l'adoption des deux projets de lois (code de la presse et loi sur l'audiovisuel) lors du dernier conseil des ministres, avant les élections du 23 octobre 2011, permettrait d'éviter le vide juridique ou l'application de lois en vigueur à l'époque de Zine el Abidine Ben Ali. » Même si l'organisation est conscience de certaines lacunes dans les textes relatifs au code de la presse et à la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA), elle pense que ces textes doivent « constituer un standard minimum de protection » qui garantit « la liberté d'expression, principe qui devrait être clairement énoncé dans la future constitution ». Pour RSF, il faudrait que le nouveau code de la presse « soit appliqué aux cas d'abus de la liberté d'expression, à l'exclusion des dispositions générales du code pénal. Dans le cas contraire, cela reviendrait à réduire le texte à néant. »
RSF considère que « les récentes nominations à la tête des médias publics, annoncées par le Premier ministre le 7 janvier dernier, en contradiction avec les dispositions prévues par l'article 19 du décret loi sur l'audiovisuel n°2011-116 du 2 novembre 2011, constituent une violation flagrante du principe d'indépendance. » Elle appelle à la mise en place urgente de la Haute autorité indépendante qui devrait remplacer l'INRIC, structure à caractère consultatif.
La décentralisation : un enjeu crucial
Reporters sans frontières attire l'attention sur la concentration des moyens d'information dans la capitale, «laissant à l'information en région une partie congrue». Internet, qui ne couvre que les grands centres urbains, malgré un taux de pénétration de l'ordre de 34%, selon les derniers chiffres publiés par Internet World Stats (le 30 juin 2010), « témoigne également des inégalités de développement qui existent entre la région de Tunis, et le reste du pays. »
RSF ajoute : « En dehors de Tunis, à l'époque de Ben Ali, les seuls médias étaient des médias publics, afin notamment d'empêcher la propagation des mouvements de contestation sociale. Ainsi, cinq des six radios régionales étaient des radios publiques. » Les douze nouvelles radios autorisées par l'INRIC devraient « permettre de dynamiser le développement du secteur, et de désenclaver les régions ». Quant à la presse écrite, « les quotidiens et hebdomadaires nationaux n'ont que rarement des bureaux en région, se reposant sur des correspondants locaux, dont l'absence de formation et le manque de professionnalisme pesaient lourdement sur la qualité des informations transmises. »
Une politique favorisant les médias déjà existants
Dans sa revue de la situation des médias tunisiens, RSF note les difficultés des nouveaux médias autorisés (radios et journaux) à décoller en raison du manque de publicité et de structures pour les uns et des prix exorbitants pratiqués par l'Office national de télédiffusion qui fixe la taxe de diffusion pour une radio à 110 000 dinars/an. « Les directeurs des douze radios qui ont reçu la recommandation de l'INRIC en juin dernier s'accordent pour dire que cette somme est exorbitante, constituant une pratique de censure déguisée », ajoute RSF.
Outre le côté financier grevant les budgets des nouvelles radios, RSF pointe l'absence des cahiers des charges et le caractère non définitif des autorisations, délivrées uniquement pour trois mois. L'organisation recommande, pour stabiliser le système, « que ces autorisations soient délivrées de manière permanente, avec une procédure de contrôle en cas de manquement ».
Concernant la presse, RSF remarque que « les anciens journaux sortent leur épingle du jeu au détriment des nouveaux titres(…) Les vrais gagnants de la révolution sont les journaux qui existaient à l'époque de Zine el-Abidine Ben Ali. » Ces journaux jouissent, d'après RSF, de l'ancienneté qui leur confère la fidélité du lectorat, des publicités publiques et privées, un réseau de distribution, des infrastructures et des réseaux d'influence, alors que les nouveaux journaux ont à bâtir tout le système sans aucun soutien.
L'organisation rappelle que les autorités auraient dû mettre un terme à la mission de l'Agence tunisienne de communication extérieure (ATCE) qui régente la répartition des publicités publiques entre les différents journaux. L'organisation rappelle que « le Syndicat national des journalistes tunisiens ainsi que le jeune syndicat de la presse indépendante et de la presse de partis condamnent que les publications qui existaient sous Ben Ali, ayant des liens directs avec les ministères, continuent à percevoir l'argent des annonces publiques. Ils auraient également recours à des moyens de pression détournés, notamment par le biais de la distribution (réseaux et points de vente), afin d'empêcher les nouveaux organes de presse de se développer. »
Côté télévision, Reporters sans frontières juge l'ouverture de l'espace audiovisuel « fragile » du fait de l'absence de l'organe de régulation, la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle, décidé durant la période de transition. L'organisation note l'absence de cahier des charges pour les cinq nouvelles chaînes de télévision privées qui ont obtenu un accord de principe du premier ministère. Elle reste muette cependant sur le service public, mais signale seulement la transformation de la deuxième chaîne nationale en chaîne régionale.
Les entraves à la liberté d'informer
Le diagnostic de RSF sur les menaces qui pèsent sur le paysage médiatique est sans complaisance. Les « lignes rouges » persistent même si elles « ne sont pas identiques à celles qui existaient avant le 14 janvier 2011, elles prennent des formes multiples, plus difficilement identifiables ». Un système de censure indirecte et d'autocensure prend place (difficulté de l'accès à l'information, absence de débat au sein des rédactions, rôle de nouveaux censeurs joué par les directeurs de journaux, pression de la population dans les régions, violences intégristes). « Pour une minorité d'intégristes, la liberté d'expression s'oppose au respect de la religion. Depuis le 14 janvier 2011, de nombreux médias ont fait l'objet d'attaques. Des journalistes ont été victimes de menaces verbales ou d'agressions physiques », ajoute RSF.
L'organisation rappelle que dans le procès intenté à Nessma TV en la personne de son directeur, Nabil Karoui, l'inculpation se fonde sur les articles 44 et 48 de l'ancien code de la presse (et non pas du nouveau promulgué après le 14 janvier 2011) et des articles 226 et 226 bis du code pénal qui répriment « l'offense envers les cultes », « l'outrage public à la pudeur » et « l'atteinte aux bonnes mœurs et à la morale publique ». RSF estime que « le report [de l'audience] risque d'accentuer une polémique déjà forte sur les rapports entre liberté d'expression et religion ».
Enfin, RSF dénonce les vieux réflexes policiers et les violences policières constatées contre les journalistes dans l'exercice de leur fonction en mai 2011, en juillet de la même année et, récemment en janvier 2012. « Ces actes de violence de la part des forces de l'ordre ne sont pas sans rappeler les anciens réflexes sécuritaires de l'ère Ben Ali et illustrent la difficulté du ministère de l'Intérieur à réformer la police », ajoute l'organisation.
Une revalorisation indispensable de la profession
Pointant le manque de professionnalisme de certains journalistes et la difficulté de certains à aborder l'actualité et à traiter des sujets sensibles, RSF estime qu'il y a lieu de mettre en place un vrai plan de formation pour revaloriser la profession. Les nombreuses formations mises en place par différentes structures médiatiques ou institutionnelles (la BBC, la Deutshe Welle, RFI, la Délégation de l'Union européenne) restent des initiatives ponctuelles. RSF préconise, à ce sujet, une révision totale des enseignements à l'Institut de presse et des Sciences de l'information (IPSI) et la création d'autres établissements universitaires concurrents, publics ou privés, pour tirer le niveau de formation vers le haut.
Un autre aspect jugé fondamental est la revalorisation financière de la profession qui permettrait de garantir l'indépendance des journalistes dont le salaire moyen avoisine les 500 dinars. « Les difficultés financières des journalistes persistent depuis la révolution du fait principalement de la résistance des patrons de médias, réticents au changement. Il est important que les professionnels de l'information aient un niveau de vie décent, seule garantie d'une réelle indépendance des journalistes aux tentatives de corruption », souligne RSF.
Déontologie pour l'Internet
Parallèlement à la revalorisation du métier de journaliste, RSF recommande la sensibilisation des internautes aux questions liées à la déontologie sur le Net. L'organisation a relevé que « diffamation, injures et atteintes à la vie privée font partie des utilisations des réseaux sociaux tels que Facebook (2,7 millions d'utilisateurs), jetant le discrédit sur la Toile ».
« Nombreux sont les journalistes et les net-citoyens à manquer de sens des responsabilités lorsqu'ils publient des informations, oubliant une des règles déontologiques de base qui est : la vérification de l'information », déclare RSF.
Sur un autre plan, RSF condamne la mise en place du système de censure et de filtrage décidé le 27 mai 2011 par la cour d'appel de Tunis. L'organisation concède que la régulation du Web est fondamentale, mais « elle doit cependant être mise en place conformément aux standards internationaux et dans le souci du respect de la liberté d'expression en ligne ». RSF recommande, non la reprise de la censure, mais l'utilisation des outils de contrôle parentaux que permettent les nouvelles technologies.


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