Nos rues nous appartiennent ! * Pacifistes et énergumènes étaient dehors dans les cafés pour regarder les matches de l'Euro. * Il y a eu de la violence, quelque part, mais les agents de la Sûreté ont réalisé des coups de filet ciblés. Après les derniers actes de vandalisme enregistrés dans plusieurs quartiers de la Capitale et dans quelques régions du pays, le Gouvernement de Jebali a décrété, hier, un couvre-feu dans le Grand-Tunis, l'Ariana, Ben Arous, la Mannouba, Sousse, Monastir, Jendouba et Ben Guerdane. Contrairement à ce qui se passait lors des quelques couvre-feu décrétés depuis la Révolution, les habitants des régions concernées et notamment du Grand-Tunis et de l'Ariana, ont vécu une soirée ordinaire sans aucun signe anormal. A l'Ariana, le va et vient des passants a duré une bonne partie de la nuit. Les cafés qui offraient l'opportunité de suivre les matchs de la coupe d'Europe étaient pleins à craquer. « Pourquoi voulez-vous que je ferme mes portes ? » s'interroge, Hédi, gérant d'un café au centre de l'Ariana. « Ces voyous ayant semé la panique et la terreur ne méritent pas qu'on ferme nos cafés et restaurants. Comme vous voyez, les clients de chaque soir sont tous venus suivre les matchs. Rien n'a changé. Le Gouvernement devrait résoudre ses problèmes fermement au vu et au su des citoyens qui n'ont plus confiance en Hamadi Jebali et sa troupe d'incompétents ! » affirme Hédi. «Nos rues nous appartiennent !» Zouhaier, 34 ans était venu rejoindre ses amis Kais et Noomen pour une tasse de thé. « Ma femme m'a appelé plus de dix fois depuis 21h. Je ne compte pas rentrer avant la fin du match. J'en ai ras-le-bol de ces couvre-feux. Nous n'avons pas à payer cette guerre déclenchée depuis plus d'une année entre des groupuscules qui n'ont aucun rapport avec la Révolution. Nos rues nous appartiennent et nous sommes les seuls à décider l'heure de rentrer chez nous. Une bande de barbus ne pourra en aucun cas réussir à nous faire peur », renchérit Zouhaier. Les cafés de l'Ariana n'étaient pas les seuls à recevoir des clients « nocturnes ». La Marsa, El Mourouj, Le Den-Den, Bab Soukia, Bab El Khadhra et plusieurs autres quartiers ont vécu une soirée animée. Le va et vient et les promenades en famille enregistré hier soir ne donnait pas l'impression qu'un couvre-feu était en vigueur. Au centre ville de Tunis, un groupe de jeunes était en train de chercher un restaurant ouvert pour un dîner entre amis. « Nous avons décidé de ne pas suivre les ordres de ce Gouvernement qui n'a pas su gérer quelques dizaines d'extrémistes. Ces ruelles de la capitale sont la vitrine de la Tunisie. A cette époque de l'année, nous aurions dû chercher une petite chaise vide dans l'un des restaurants bourrés de la place au lieu de passer plus d'une heure à la recherche d'un restaurant ouvert ». Salafistes : les seuls absents L'animation ne manquait pas aux autres quartiers plus ou moins populaires tels que Cité El Khadhra, Cité Al Intilaka et Le Kram, où des jeunes de 13 à 16 ans étaient sortis en groupes, jetant des pierres sur les voitures de police, en actes de provocation. « Regardez ces gamins sortis en groupes bien organisés pour nous provoquer. Que voulez-vous qu'on fasse à leur égard ! Où sont leurs parents et pourquoi ne sont-ils pas chez eux ? En répondant à ces questions vous aurez déduit les raisons du couvre-feu », crie un agent de l'ordre présent à Cité El Khadhra. Selon lui, les agents de sûreté étaient en train de mener des coups de filet ciblés. « Nous sommes venus chercher des personnes bien définies et nous voilà en train de chasser ces gamins ! Pour nous une chose est sûre : La sécurité des citoyens et des biens publiques et privés ne sera plus une affaire à négocier. Tout délinquant sera arrêté et toute violence sera sanctionnée ». Pour tout dire : Pacifistes, énergumènes, familles, jeunes et moins jeunes étaient sortis hier pour protester contre ce couvre-feu, chacun à sa manière. Les seuls absents étaient les fameux ‘barbus'. Les groupes de casseurs sortis en masse avant-hier pour semer la terreur, attaquer des bâtiments administratifs et affronter les forces de l'ordre ont respecté le couvre-feu et ont préféré rester chez-eux tranquilles et sans soucis...