.Coupure d'eau à cause de l'électricité, ou l'histoire de la poule et de l'œuf .Mahdia : l'hôpital universitaire Taher Sfar privé d'eau depuis 48 heures. .El Gtar (Gabès) : à défaut de l'eau, on les arrose au gaz lacrymogène
Voilà plus d'une semaine que plusieurs régions de la Tunisie sont privées de l'élément le plus vital qui soit : l'eau. Une substance qui se métamorphose en denrée rare ou un luxe alors que la fête caniculaire bat son plein dans une Tunisie à la merci d'une chaleur infernale.
Aux oubliettes les «eaux claires, les eaux printanières et les eaux courantes » dont rêvassait Gaston Bachelard et place à une eau qui se f ait rarissime, une eau rêvée et fantasmatique.
Situation cauchemardesque au sud-ouest
L'eau potable n'est plus. Aujourd'hui, que le mercure grimpe et que la canicule fait déjà des ravages, ils sont plus d'une centaine de milliers de citoyens tunisiens assoiffés.
Une énorme vague de chaleur s'est abattue sur la Tunisie depuis l'arrivée du mois de juillet. Et pour couronner le tout, habitations, administrations, hôpitaux et dispensaires sont dépourvus d'eau. Avec un thermomètre qui affiche les 45° voire plus dans plusieurs villes, la situation frôle la crise humanitaire. Quant à l'hygiène, c'est une autre paire de manche !
Les risques de maladies et d'épidémies liées à l'absence d'eau potable et au manque d'hygiène, associée à la chaleur guettent nos concitoyens. A l'hôpital universitaire Taher Sfar, gouvernorat de Mahdia, l'eau potable est coupée depuis plus de 48 heures au point que le diner n'a pas été servi aux patients et que plusieurs soins ne leur ont pas été administrés. Comme signe de contestation, les médecins traitants ont observé un sit-in qui pourrait se transformer en grève ouverte à cause des conditions rudimentaires et inhumaines dans lesquelles ils exercent.
Le risque des fléaux est grand ! L'eau constitue, en effet, une matière vitale, intrinsèque à la vie et à la guérison des patients, surtout en ce qui concerne les personnes âgées ou les nourrissons.
Toujours à Mahdia, le quartier populaire Sidi Massoud Hiboune, qui comprend plus de 100 mille familles et qui se situe à quelques 500 mètres de la zone touristique, est privé d'eau et d'électricité depuis plus de 24 heures. Ironie du sort : le groupement d'eau est à même pas 5 mètres...
Respectivement, aux gouvernorats de Jendouba, kairouan, Gafsa, Sfax, Tozeur, Metlaoui, Om Larrayess, Rdayefou ou encore Sidi Bouzid, la pénurie en eau et les coupures d'électricité s'incrustent dans le quotidien des habitants, qui souffrent déjà de la chaleur infernale. Mal lunés, nos concitoyens, habitant des régions où même le climat, de par son aridité, ne les épargne pas, plongent douloureusement dans l'ère primitive où le moindre de leurs besoins vitaux n'est plus. Devront-ils parcourir des kilomètres pour se procurer de l'eau et se transformer en «Pierreàfeu» pour allumer leurs soirées estivales ?
Le gouvernement sort de sa torpeur et répond avec du gaz lacrymogène
Les nerfs se tendent et le ton monte en crescendo avec un thermomètre qui affiche une chaleur intolérable. La soif se fait persistante et le manque d'eau plonge les gens dans une tourmente proche de l'hystérie. Cerise sur le gâteau : pas d'explications convaincantes ou plausibles de la part des autorités.
Du haut de leur panthéon, luxueux, climatisé et paradisiaque, les responsables politiques, ont perdu le nord et n'ont plus pied sur terre. Ils demeurent sourds aux appels au secours des plus miséreux du peuple.
La pénurie de l'eau potable et les coupures itératives de l'électricité associées à la canicule et à la misère ne semblent pas peser face aux campagnes pré-électorales et aux congrès où l'on claque des milliards pour pérorer et frimer.
Alors, que faire face à ces Tunisiens assoiffés et vivant dans l'indignité depuis des semaines ? Ces trouble-fête ? Répondre par la force et se renvoyer la balle.
Depuis plus d'un mois, plusieurs régions ne sont munies d'eau potable que pour deux petites heures et encore ! Tard dans la soirée. Les habitants sortent de leurs gants et manifestent. Pour toute réponse, à la région d'El Guetar (Gafsa), et à défaut d'eau potable, les forces le l'ordre aspergent les manifestants de gaz lacrymogène.
A Sfax, on passe à la vitesse supérieure. Les Sfaxiens, dépourvus d'eau, ont, à maintes reprises, manifesté pacifiquement leur colère contre la pénurie en eau. La SONEDE Sfax, répond qu'un bon de 10% en consommation d'eau, par rapport à l'année dernière, a été enregistré. On reconnait, néanmoins, le manque en distribution d'eau potable qui est dû au faible taux d'approvisionnement. En réponse à cet état des choses, plusieurs Sfaxiens se sont rassemblés devant le siège du gouvernorat et les habitants de la région de La route de l'Aéroport, ont coupé les routes.
Le sud-ouest tunisien, doublement victime de son climat aride et de la politique de marginalisation qui l'a toujours légué aux oubliettes, a été de nouveau biaisé. Les quantités d'eau ramassées suite aux pluies torrentielles hivernales n'ont, semble-t-il pas, été réparties de manière équitable sur toutes les régions tunisiennes.
Les coupures d'électricité derrière la pénurie en eau, on n'est pas sorti de l'auberge !
La catastrophe aurait pu être évitée si jamais le grand forage de 25litre/ seconde aurait été exploité. Gafsa et ses environs auraient pu être épargnés.
De son côté, en appelant la SONEDE, on nous parle de coupure d'électricité qui serait derrière cette pénurie en eau potable qui dure depuis des semaines. Plusieurs stations de pompage des eaux comme la station de pompage et traitements des eaux du Nord de Bélli (Sfax) ont arrêté de fonctionner quand le courant a été coupé et ne peuvent plus fournir les réservoirs en eau potable.
Cette station nourrit d'habitude 5 grands gouvernorats : Nabeul, Monastir, Sousse, Mahdia et Sfax. Les perturbations enregistrées dans la distribution de l'eau potable dans ces gouvernorats et leurs environs, sont dues, toujours selon la SONEDE, aux coupures d'électricité associées à la forte consommation d'eau et aux pompes qui ont cessé de fonctionner suite aux pannes d'électricité. Les quartiers situés en basse altitude seraient plus chanceux que ceux que les habitations qui sont sur les faubourgs et les vallées, où le débit d'eau potable est très faible, voire inexistant.
En tentant de joindre la STEG pour connaitre leur version des faits, notre interlocuteur, au bout du fil, semblait vivre sur une autre planète. Il n'était aucunement au courant des coupures itératives en électricité... Donc, il ne comprend pas pourquoi la SONEDE accuserait la STEG d'être en quelque sorte, responsable de la pénurie en eau potable.
La seule bonne nouvelle, c'est que les citoyens dépourvus d'eau et d'électricité auront moins de factures à payer. En attendant Godot...