Selon les principes généraux du droit positif moderne qui tient compte de l'esprit humanitaire et du sens de l'équité, l'évasion ou la fuite d'un inculpé ne constitue pas un délit. Cela a pour fondement cette compulsion de liberté, prédominant chez tout être humain. Cette tendance ne doit pas pour autant faire de la fuite ou de l'évasion un droit, et ce dans l'intérêt de la société, surtout lorsque la liberté d'un accusé, constitue une menace ou un danger. C'est donc au cas par cas que le Procureur la République, ou le, Juge en général, décide d'émettre un mandat de dépôt à un accusé, dans le cas de l'existence de sérieuses présomptions établissant sa culpabilité. La répression de la fuite ou de l'évasion est utilisée en premier lieu dans un but de sécurité mais aussi d'équité. Il serait en effet malheureux de laisser le vrai coupable se promener dans la nature et de mettre en détention un innocent. C'est dans cette optique que la procédure de la détention est régie par des règles bien déterminée et explicitement énoncée par le Code de procédure pénale. Dans l'affaire Sami Fehri, il y a eu d'autres inculpés qui ont été entendus et mis en détention provisoire (celle-ci étant préalable au jugement définitif, qui dure tant que l'affaire est en cours). Sami Fehri a été lui-même entendu plusieurs fois et laissé en liberté provisoire.
Une procédure précipitée
Brusquement et alors qu'on était en pleines vacances judiciaires, Sami Fehri est convoqué encore une fois par le juge d'instruction. Il est entendu pendant 6 heures puis laissé en liberté. Mais quelque temps plus tard, la chambre d'accusation qui se réunit en urgence émet un mandat de dépôt à son encontre. C'est presqu' une procédure en référé, ce qui constitue une hérésie car les chambres pénales ne se réunissent jamais en référé, la liberté des gens ne devant pas être à la merci d'une décision prise à la hâte. En France depuis la loi du 15 juin 2000, le juge d'instruction, qui était le magistrat le plus puissant, n'est plus à même de prendre seul la décision de mettre un inculpé en détention. Cette décision est désormais prise par un juge spécialisé, appelé juge de la liberté et de la détention. Cela constitue une garantie supplémentaire pour l'accusé, présumé innocent jusqu'à preuve du contraire.
Difficulté d'exécution du mandat de dépôt et silence de la loi
Le mandat de dépôt, permet de mettre l'inculpé en détention illico, à condition que celui-ci soit présent. Or ce n'était pas le cas en l'occurrence, puisque l'intéressé n'a pas été convoqué par la chambre d'accusation qui a décidé sa mise en détention. Donc il y a deux solution possibles : où, qu'un mandat de recherche soit lancé, en vertu dudit mandat de dépôt, ou que l'inculpé se rende lui-même au parquet. Entre-temps, l'inculpé ne pouvait être considéré comme étant en état de fuite. Toutefois et pour prouver sa bonne foi, Sami Fehri a préféré se rendre lui-même, à la justice, hier 29 août 2012 dans la matinée. Préalablement, il avait fait une déclaration sur des réseaux sociaux, dans laquelle il s'adressé notamment au ministre de la Justice en ces termes : «Monsieur le ministre, je ne suis pas en état de fuite, j'ai promis de me rendre et je le ferai demain. J'ai eu un souci de santé à cause du choc émotionnel que j'ai reçu suite à cette affaire. J'ai pris le temps d'arranger les moyens de subsistance de ma famille, tous mes biens ayant été confisqués. » Il a ajouté « qu'il était victime d'une injustice, n'ayant même pas eu la possibilité de constituer un avocat...alors que même le « Saffah » tueur en série de Nabeul a eu des garanties de représentations et de défense !» Sur le fond de l'affaire il contesta qu'il y ait eu la moindre irrégularité concernant les formalités afférentes aux appels d'offre, ainsi que le quantum de la somme présumée avoir été détournée. En attendant, il a entamé hier sa première nuit en prison, alors qu'avec la même diligence, le pourvoi en cassation présenté par ses avocats contre la décision de la chambre d'accusation a été rejeté.