Répondant à l'appel de leurs leaders, les jeunes du parti Ennahdha, ont lancé leur campagne progouvernementale baptisée «Ekbess» et ont appelé à une manifestation millionnaire à laquelle ont répondu les fidèles de ce parti. Le rendez-vous était donné depuis plus d'une semaine et l'information a circulé sur le Net. Lieu : la Kasbah, juste après la prière de vendredi 31 août.
C'est, donc, hier, qu'a eu lieu cette manifestation, déclarée non autorisée par le ministère de l'Intérieur. Les manifestants ont commencé à affluer à partir de midi, sous l'œil vigilant des policiers dont la présence était massive.
L'appel à la manifestation a été lancé par les administrateurs de la page Facebook appelée : «Ensemble pour exterminer les médias violets», pro-Ben-Ali. Plusieurs autres organisateurs et groupes se sont joints à la création de cet évènement, à l'instar de l'Association des femmes musulmanes de Tunis, «L'Islam est ma religion, le Tunisien est mon frère et Ennahdha est mon projet», «La liste honteuse des ennemis de la révolutions». Sur leur page, les administrateurs mentionnent aussi la participation des deux avocates et militantes, Maître Raja Haj Mansour et Maître Hlima Maalej, qui, toujours selon la page de l'évènement, travaille sur le dossier de la corruption financière et administrative.
Le prêche du vendredi, une aubaine pour lancer des messages politisés
Avant le début de la manifestation, ils étaient des centaines à envahir la place de la Kasbah pour la prière du vendredi, durant laquelle, l'Imam a donné un discours politisé exhortant les prieurs et les Tunisiens à soutenir le gouvernement, si ce dernier répond aux dogmes et préceptes de la religion. Les médias étaient aussi au cœur du prêche. L'Imam profitant, par la même occasion de leur faire passer un message : «Craignez Dieu et soyez neutres !».
Les dossiers de corruption et la poursuite en justice ont eu leur quart d'heure aussi, durant la prière du vendredi. L'appel au rassemblement lancé lors de la prière du vendredi, met dos au mur la décision du ministère de l'Intérieur qui a annoncé officiellement l'interdiction de manifester. En effet, la veille de la manifestation, ledit ministère a annoncé dans un communiqué que «cette marche étant non autorisée, elle sera par conséquent traitée comme tout rassemblement non autorisé». Cela ne semble pas avoir dissuadé prêcheurs, pieux, manifestants ou politiciens à profiter de l'occasion pour donner libre cour aux revendications de certains et à la psychose effrénée d'autres.
C'est ainsi que profondément hypnotisés et obnubilés par un tel discours, les prieurs métamorphosés en manifestants, cèdent la place à leur frénésie patriotique et pro-gouvernementale.
Lotfi Zitoun brave la loi et s'en donne à cœur joie
La jeunesse d'Ennahdha partie manifester, malgré les restrictions imposées par le ministère de l'Intérieur, fredonnaient des chansons contre l'Opposition et les médias et suppliait le gouvernement d'être un peu plus sévère et dur avec «ses ennemis». Ils scandaient des slogans où ils réitèrent leur soutien à leur parti et aux représentants du pouvoir actuel.
Baptisant leur campagne «Ekbess», les jeunes d'Ennahdha ont répondu à l'appel de leurs leaders, à manifester pour soutenir leur parti et le gouvernement provisoire. Sur place les manifestants, ont eu la chance inouïe d'avoir une intervention inopinée du conseiller auprès du chef du gouvernement, Lotfi Zitoun. S'adressant à son auditoire par le biais d'un haut-parleur, ce dernier a commencé son discours par une sérénade spécialement dédicacée au Chef du gouvernement provisoire Hamadi Jebali. Ensuite, il s'est plu à vanter les mérites du gouvernement provisoire actuel. Et pour mieux captiver ses auditeurs, il leur a sorti la baguette magique : le dossier des médias. Taxant la presse tunisienne de diffamatoire, il s'en est donné à cœur joie et a hypnotiser ces jeunes par des paroles mielleuses, mi-figue, mi-raisin. Ainsi donc, le conseiller auprès du Chef du gouvernement, de par son intervention, de par son discours porteur de haine envers le 4ème pouvoir continue sa guerre contre les médias et enfonce encore plus le clou.
Rappelant que Lotfi Zitoun se donne le droit de donner un discours lors d'une manifestation interdite par le ministère de l'Intérieur. Quoi de plus étonnant puisqu'il n'a même pas hésité à partager l'appel au rassemblement sur sa propre page facebook? Comme quoi, à la guerre c'est comme à la guerre. Tous les moyens sont bons et légitimes.