Les articles relatifs aux droits de l'Homme et consacrés par l'avant projet de la nouvelle Constitution, ont suscité les réserves les plus diverses de la part de certains membres de la société civile, mais aussi de la part de certaines organisations internationales dont notamment Amnesty International. Tous les droits de l'Homme sont sacrés
La première remarque de la plupart de ces observateurs concerne l'esprit de la loi, à travers lequel ont été rédigés les articles traitant des droits de l'Homme, Ces derniers étant indivisibles, il aurait fallu que tous les textes fussent conçus dans cette optique. Ce qui n'a pas été le cas.
A titre d'exemple, c'est seulement le droit à la vie qui est qualifié de droit sacré. Or tous les droits de l'Homme sont intangibles et sacrés. Y compris que le terme « sacré » ne suffit pas si les moyens pour les préserver ne sont pas prévus.
Liberté d'expression tronquée
La liberté de chacun s'arrête où commence celle d'autrui. Cette vérité est devenue presque une lapalissade, car il va de soi que le corollaire de la liberté est la défense de l'intégrité morale et physique de chacun.
La diffamation est souvent invoquée comme l'une des formes d'atteinte à l'intégrité morale de l'individu.
Toutefois, elle peut donner matière à interprétation, car tout peut être pris pour une diffamation celle-ci allant de la raillerie jusqu'aux plus graves formes d'insultes.
Aussi dépend-elle du contexte dans lequel elle a été exercée, et de l'intention de son auteur.
Elle peut intervenir à l'occasion d'un article de presse ou d'une caricature.
Dans ce cas précis, son auteur doit-il être poursuivi pénalement ou en vertu du délit de presse, prévoyant seulement une peine d'amende si toutefois l'accusation s'avère établie ?
Selon Amnesty International la dépénalisation de la diffamation, serait plus souhaitable et ce dans le sens de la préservation de la liberté d'expression.
Effectivement, la diffamation, ainsi que l'atteinte au sacré et le trouble à l'ordre public, ont prêté le flanc aux autorités de l'ancien régime, pour empêcher la liberté d'expression et réprimer ceux qui la revendiquent.
C'est la raison pour laquelle, l'atteinte au sacré doit être consacrée, dans la Constitution, autant que la liberté d'expression.
Un article de presse qui profère ouvertement des insultes portant atteinte à la dignité et au sacré, n'est pas à considérer sur un même pied d'égalité, avec celui où il est question de critiques acerbes certes, mais fondées, et faites dans l'intérêt général.
La dépénalisation est dans ce cas logique voire légitime
Au demeurant, la diffamation en matière de presse, ne doit pas être considérée comme un délit punissable de prison. Car la voie reste ouverte à la victime pour se pourvoir au pénal et auquel cas c'est au procureur de trancher.
Il en va de même pour les articles concernant l'atteinte au sacré d'une manière générale.
Droit de la femme :égalité et complémentarité
La femme est l'avenir de l'Homme a dit Aragon. Beaucoup d'hommes y émettent des réserves en estimant qu'ils sont les guides des femmes et qu'elles leur sont de ce fait complémentaires.
Cela dépend toutefois, sous quel angle est conçue cette complémentarité.
Le combat de la femme a été en tous les cas dans le but d'améliorer sa son statut et de recouvrer ses droits, d'abord et surtout en tant qu'être humain.
Cela n'a pas manqué de poser quelques problèmes en Tunisie, depuis que la femme en a pris conscience.
Tahar Haddad, fervent défenseur des droits de la femme, a décrit la situation déplorable dans laquelle celle-ci vivait du temps de l'ère coloniale et même bien avant. Elle était acculée au dernier rang par rapport à l'homme. Celui-ci estimait que la femme était faite pour la procréation et les travaux ménagers.
Dans l'article 28 de l'avant-projet de la nouvelle Constitution, il est question d'égalité de chances entre la femme et l'homme.
Cette expression est jugée selon certains observateurs comme prêtant à équivoque, car elle n'implique qu'une égalité relative en droit et en devoir.
Elle est comprise, à contrario comme une facilité donnée à la femme pour affronter certains domaines, bien qu'elle soit différente de l'homme.
Cette égalité de chances intervient seulement à certaines occasions, comme la sollicitation d'emploi, ou l'exercice de certaines professions.
Tel que l'affirment certains observateurs, cet article ouvre la voie à la remise en cause des acquis de la femme à propos du droit à légalité avec l'homme.
Droit Syndical : des restrictions implicites
Le droit syndical, est parmi les droits publics qui ont toujours été traités avec une certaine méfiance, étant donné son caractère assez révolutionnaire.
A la suite de l'abrogation du délit de coalition en France ,en 1864, la loi du 21 mars 1884 a accordé la liberté syndicale.
En Tunisie, l'UGTT créée en 1946, joua un rôle d'avant garde aussi bien dans le mouvement de lutte contre le colonialisme, que concernant la défense des droits des travailleurs.
Aussi ce premier syndicat tunisien, s'était-il affronté à une répression exercée par l'ancien régime, aussi bien sous Bourguiba que sous Ben Ali, à l'encontre des syndicalistes qui refusaient de composer avec les autorités en place, au détriment des travailleurs.
C'est la raison pour laquelle, il faut que les membres de la Constituante tiennent compte des enseignements du passé afin de consacrer le droit syndical à sa juste valeur, dans la nouvelle Constitution.
Or dans l'avant-projet, l'article 15 concernant le droit syndical, émet des restrictions qui sont assez vagues.
Le droit syndical est garanti tant qu'il ne porte pas atteinte à la sécurité et à la santé.
Dans quelle mesure le droit syndical porte-t-il préjudice à la sécurité ou à la santé ? Cela donne matière aux interprétations les plus diverses.
C'est le cas de tous les droits consacrés par l'avant projet de la nouvelle, Constitution, restent pour cette raison à parfaire afin de garantir aux mieux ces droits dans le sens de la transition démocratique et de l'intérêt général.